
L’Étrange Festival 2013 : Jour 10 (Man from the future, Omnivores)
Dixième et avant-dernier jour de ce dix-neuvième Étrange Festival avec les chroniques de Man from the future et Omnivores.
MAN FROM THE FUTURE, DE CLAUDIO TORRES
Joao est un professeur de physique aigri qui enseigne la mécanique quantique. Durant son temps libre, il travaille sur une forme d’énergie alternative. Mais une erreur de manipulation va le renvoyer vingt ans auparavant, le jour même où il s’est fait publiquement humilier lors d’une soirée où il perdit l’amour de sa vie, Helena…
Le film de science fiction basé sur un voyage dans le temps est un sous-genre très balisé et déjà remarquablement bien exploité par des films marquants comme Timecrimes, Retour vers le Futur, la Jetée et d’une manière détournée Un jour sans fin. Conscient de ce lourd héritage, Cláudio Torres n’essaye jamais de réinventer la roue et prend le parti de citer ouvertement ses aînés, recyclant ainsi des figures bien connues du public. On retrouve donc dans ce Man from the future le double utilisant des bandelettes afin de dissimuler son identité de Timecrimes, la féerie dansante des sirènes et le futur dystopique de Retour vers le Futur, la quête éternelle de l’amour perdu de la Jetée et le personnage principal désabusé s’améliorant petit à petit d’Un jour dans fin.
Et malgré tout ces emprunts, ce film ne semble jamais tomber dans la redite pure et simple, grâce à un scénario extrêmement bien structuré ne laissant pas une minute de répit au spectateur et à un ton maîtrisé qui lui est propre. L’interprétation parfaite de Wagner Moura dans le rôle central du professeur responsable de cette boucle temporelle aide également beaucoup à l’immersion dans cette histoire. Son jeu à la fois crédible et souvent hilarant fait du personnage de Joao l’axe essentiel autour duquel tourne ce manège temporel. Un héros attachant donc, bien développé, dont on parvient à comprendre les intentions et qui servira d’ancre au spectateur dans ce va-et-vient entre passé et présent(s).
Même s’il ne révolutionnera pas le genre, ce qu’il ne prétend à aucun moment, Man from the future est un divertissement intelligent et très agréable. Une comédie maîtrisée, doublée d’une belle aventure, suivant le parcours chaotique d’un homme essayant de changer sa propre histoire pour, petit à petit, se rendre compte qu’il est préférable de composer avec ce que la vie nous offre. Une belle surprise.
OMNIVORES, D’OSCAR ROJO
Sur le papier Omnivores est plutôt séduisant. Un critique gastronomique reconnu accepte d’écrire un livre s’intéressant à un réseau de restaurants clandestins. Il commence donc à fréquenter ces dîners où sont proposés des mets rares et sophistiqués jusqu’au jour où il découvre l’existence d’un établissement proposant des plats faits de viande humaine à des prix exorbitants. Poursuivant cette piste qui propulsera son ouvrage en tête des ventes, il se trouve piégé dans un cercle dans lequel il est beaucoup plus facile d’entrer que de sortir.
Oscar Rojo passe complètement à coté de son sujet prometteur avec ce film dénué de tension explorant de manière superficielle un univers pourtant plein de potentiel. Parvenant à rendre un film sur un groupe de cannibales bourgeois aussi effrayant qu’un épisode d’un dîner presque parfait, le réalisateur tourne autour du pot pendant plus d’une heure avant se prendre magnifiquement les pieds dans le tapis avec une conclusion bâclée des plus bancales. Et ce n’est pas ses personnages totalement plats et stéréotypés qui viendront sauver l’affaire du naufrage. Tout ici semble creux et sonne faux. De la réalisation sans âme à la photographie générique en passant par la musique caricaturale, rien ne fonctionne vraiment.
L’intrigue elle-même ne surprend jamais et ne fait que proposer des scènes attendues sans chercher à réellement traiter son sujet. Omnivores affiche ainsi constamment une volonté évidente de provoquer ou de choquer mais n’atteint que rarement son but par manque de courage ou peur du ridicule. N’approfondissant donc jamais aucune idée, trop prudent et frileux, il ne fait qu’effleurer la surface des choses et propose une expérience extrêmement frustrante où tout semble prêt à exploser à tout moment sans que cela n’arrive jamais. À éviter.
L’Étrange festival : jusqu’au 15 septembre au Forum des Images de Paris – Plus d’infos sur le site de l’Étrange festival.