
Malcolm Max – 1. Les pilleurs de sépultures de Peter Mennigen et Ingo Römling
Ce n’est pas le bal des vampires mais cela s’en approche un brin. Marchez dans les pas d’une demi-vampire et de son séducteur d’acolyte qui se lancent dans une enquête ésotéro-crimino-hérotique. Ça fait un peu beaucoup il est vrai mais cela donne quand même envie de se promener dans les bas-fonds de l’east end london des années 1890. Attention tout de même à ceux que vous allez croiser. C’est un peu long mais ne dit-on pas que quand c’est long, c’est bon ?
L’histoire : le trafic de défunts bat son plein dans le Londres de la fin du XIXe siècle. C’est en enquêtant sur ces détrousseurs de tombes que Malcolm Max, membre d’une société secrète, et sa complice la demi-vampire, Charisma Myskina, tombent nez-à-nez avec un tueur en série. Insaisissable, ce dernier utilise la même signature de crime qu’un homme condamné et guillotiné depuis fort longtemps. Un copycat ? Un adepte ? Un mort-vivant ? Nos deux héros de charme vont remonter la piste. A leurs risques et périls.
Mon avis : dense ! En un mot comme en cent, c’est un récit long, empli de smog et très épais. Cela colle parfaitement à l’idée qu’on se fait de la période, en pleine Angleterre victorienne. On s’attend à croiser Dickens à chaque carrefour de la capitale d’Albion. L’atmosphère y est moite de brouillard, de nuit, d’angoisse et de peur. C’est la force de cette BD. Narrer des aventures extraordinaires dans une ambiance glaçante, forcer le lecteur à s’imprégner, à marcher à côté des acteurs dans ces rues suintantes de noirceur et de misère.
Le scénario est également au rendez-vous. On ne sait pas trop où cette enquête va nous mener. On n’en sait pas forcément beaucoup plus à la fin de ce premier tome car l’auteur a su et nous perdre et faire grimper le suspense à son paroxysme au fil des 59 pages. Il y des chausse-trappes, des fausses routes, pas mal d’incertitudes et un méchant cliffhanger dans le final. Cela nous contraint presque à ne pas lâcher l’affaire et à attendre avec impatience le deuxième acte.
Et puis, il y a aussi, au crédit de cet ouvrage, tout un univers légèrement grivois et érotique, un rapport à la mort décomplexé, un humour très anglais et un mélange des genres entre humains et demi-vampire.
Dans les limites, mais c’est inhérent à la conception, il y a à vous armer de patience pour aller au bout de ce premier opus. Ce n’est pas forcément une lecture du soir. Ou alors de plusieurs soirs consécutifs. Avec la difficulté à se rappeler de chaque détail le lendemain du dodo.
Ça n’en reste pas moins une bande dessinée à lire et à relire avec une intrigue vraiment bien foutue.
Si vous aimez : la filmographie d’Angelina Jolie à qui Charisma Myskina ressemble méchamment.
En accompagnement : Les Hauts de Hurlevent, l’unique roman de la poétesse Emily Brontë. Avec un certain cousinage.
Autour de la BD : Malcolm Max, c’est d’abord une pièce radiophonique qui est adaptée en BD. Avec la volonté de Peter Mennigen, auteur qui a l’habitude de travailler à l’international, de trouver un dessinateur teuton pour une œuvre complètement germanique. Mennigen, aperçu avec Morris, sur Lucky Luke ou avec Tabary sur Izonogoud, a su multiplier les collaborations dans les différents univers (télé, radio, film…). Son compère, Ingo Römling, s’essaie à la BD par son entremise avec ce Malcolm Max. Lui aussi est un artiste protéiforme.
Extraits : « Parlez-moi de baisers »
« Quoi ? »
« Vous savez, cette étrange pratique de bouche-à-bouche ? »
« Je sais ce qu’est un baiser »
« Alors vous pouvez probablement m’expliquer pourquoi tout le monde est si friand de cette forme de contact labial. Je dois bien avouer ne rien savoir à ce sujet. »
« Vous n’avez jamais embrassé personne ? »
« Comment le pourrais-je ? J’ai grandi parmi les vampires et ils n’ont pas pour habitude de presser leurs lèvres sur d’autres lèvres mais plutôt sur des jugulaires. »
« Pardon, mais c’est répugnant. »
« Pardon, mais je n’en pense pas moins de vos histoires de bouche-à-bouche. »
Écrit par Peter Mennigen
Dessiné par Ingo Römlig
Édité par Delcourt