
Mauvaises graines (critique de Savages, de Oliver Stone)
Que c’est rageant, ho mais que c’est rageant ! Non pas que Savages soit une fumisterie intégrale. Mais alors qu’il avait tout pour trousser un thriller cannabis jouissif, Stone se contente de nous rouler un gros pétard souvent brutal, parfois hilarant mais aussi hélas trop, bien trop chargé. Un trip tantôt mou, tantôt fun mais loin d’être carré, jusqu’à une fin qui elle-même tourne en rond.
Pour son 19e long métrage de fiction, Papy Stone (66 ans, les enfants !) se la joue plus canaillou que jamais, renouant avec le soufre du polar polisson et vaguement parodique façon U-Turn, via un tout autre itinéraire. Point ici de sombre intrigue vaudevillesque en plein désert avec petite frappe en cavale et perfide femme fatale. Dans Savages, Stone fait encore plus basique avec une « simple » affaire de clash entre, d’un côté, deux « Steve Jobs » californiens du trafic d’herbe et, de l’autre, le puissant cartel mexicain affamé par leur juteux business. Au centre, la belle Ophelia, dont Ben et Chon se partagent cœur et croupe, kidnappée par les narcotrafiquants moustachus décidés à faire plier les gringos récalcitrants. J’ignore à quel point le second degré était déjà présent dans le roman originel de Don Winslow, qu’on a connu en revanche des plus sérieux dans le génialissime La Griffe du chien, mais dés ses premières secondes, Savages confirme à quel point Stone ricane sous cape de son intrigue clownesque.
Qu’il s’agisse de la grotesque voix off de l’insupportable Blake Lively et ses répliques tartos (au sujet de Chon : « I had orgasms, he had wargasms ». Okayyyy…) ou de la brochette de caricatures en action (tacos d’or à Benicio Del Toro en tueur grimaçant à mulet, j’y reviens), on nage en pleine farce. Ajoutons John Travolta déchaîné en agent des stups marron jusqu’à l’os et régulièrement filmé en train de se goinfrer, plus une Salma Hayek en mafieuse perruquée éructant ses « puta madre » et autre chapelet d’injures marrantes, et l’on se croirait presque chez Rodriguez. Tranquilo, les fans : Stone ayant davantage le souci de la belle image que l’ami Robert, Savages et sa photo anamorphique rutilante dispensent de superbes plans en cinemascope, régulièrement parasités par des affèteries clipeuses aussi jolies que totalement gratuites. Quant au fumet hautement parodique se dégageant de ce chili (très) con carne : pourquoi pas mais franchement, fallait-il vraiment 2h10 pour raconter une intrigue finalement sans grande envergure, quand trente minutes de moins auraient amplement suffit ? On fait de la série B, oui ou mierda ? Incapable de faire court, Stone s’attarde énormément sur ses personnages, sur le trio amoureux babos et sensuel unissant Ben, Chon et O, ainsi que sur l’éternel jeu de dupes entre le Mexique et les Etats-Unis en matière de lutte contre le trafic de drogue. Un thème cher à Don Winslow, qui a brillamment démonté l’hypocrisie des deux Etats sur ce sujet tragique dans le génialissime La Griffe du chien (comment ça, déjà dit ??).
Mais rien à faire : au générique de fin, l’impression d’un film boursouflé, en roue libre une bobine sur deux et vaguement vain surnage au-dessus de la mare d’images choc distillées au fil d’un récit mal rythmé. Je ne parle même pas d’une double fin raisonnablement qualifiable de whatdafuck, qui achève de nous prouver à quel point Stone se paie notre fiole depuis le début, via la pseudo raillerie facile d’un certain climax « à l’américaine ». Rageant, je le répète, parce qu’ici et là, Stone montre qu’à l’automne de sa carrière, il en remontre encore aux jeunes blancs becs côté mise en scène. La violence graphique ne fait pas de quartier dans Savages : elle frise parfois l’insoutenable et l’on peut au moins accorder au film sa proposition plutôt radicale et ses personnages moralement ambigus, qualités devenues rarissimes dans le paysage actuel des grands studios. De même, malgré ou grâce à leurs excès, les jeux désopilants de Del Toro et Travolta offrent de purs moments de plaisir coupable et volent sans mal la vedette au trio de jeunes héros trop lisses. Si Taylor Kitsch s’en sort plutôt bien en ex-navy seal badass et psychotique, Aaron Taylor-Johnson n’imprime pas plus que ça le cervelas en golden boy de la dope bardé de diplômes. Et Blake Lively, antipathique, vulgaire, surprésente via son agaçante voix off, ne parvient définitivement pas à me convaincre de valoir le coup d’aller se frotter à un cartel de sauvages pour sauver ses rondes miches. Qu’on ne verra d’ailleurs jamais de tout le film malgré deux ou trois scènes bien caliente. Arnaque ! Bref : comme dirait un critique nul qui souhaite en finir rapido avec sa review peu inspirée, Savages ne m’insupporte pas forcément, mais il Mexique pas trop non plus. Buenas Noches !
SAVAGES, de Oliver Stone (2h10). En Salles.
Oh la vache ! Avoue que tu as écrit la review rien que pour le calembour final, avoue !
100% d’accord pour Blake Lively. C’est bien simple, j’ai eu pendant un instant envie de me lever et de lui coller une baffe (oui, contre l’écran, ça n’a aucun sens, mais son jeu et son personnage n’en avait pas non plus alors bon…)
Sinon, bien content de retrouver un Stone un peu saignant. Parce que World Trade Center hein..
p.s : Salma Hayek est définitivement ma MILF préférée !
A peu près du même avis que toi. Super Mario Bros contre le Cartel Mexicain : la princesse Peach-Bitch se fait une nouvelle fois kidnapper et Mario et Luigi accourent le bédo au bec. Tu fais des jolies graphismes à la mode, tu rajoutes un peu de viande froid pour le mettre en PEGI 18+, t’invites quelques guests et voilà tu as un jeu… euh film.
@ Sheppard : OUAIS !!!!
@ Léo : merci ca fait du bien de sentir que je suis pas le seul à avoir eu ce sentiment.
@Kasi : alors toi on sent bien que t’as pas aimé du tout, mais alors pas du tout on dirait !
Tout à fait d’accord avec ton avis, même si je serai encore plus méchant…
Je n’ai pas du tout aimé, trop simpliste, trop long, rien de nouveau sinon du vu et revu et pas mal de plans juste pour dire « non c’est pas qu’un mauvais film, on a travaillé le truc… » Dommage, certains devraient arrêter de faire des films et se mettre au jardinage, on garderait d’eux de bons souvenirs…