Mini Music Review : Shady XV (Shady Records/Interscope/Polydor)

Mini Music Review : Shady XV (Shady Records/Interscope/Polydor)

Note de l'auteur

shadyxv15 bougies pour le label de Eminem, et toujours beaucoup de vitriol, d’humour noir et d’acrobaties verbales au programme. Oui, mais voilà : Shady Records le label a eu beaucoup de mal à exister dans l’ombre de son boss. Boss qui ouvre les festivités de cette compilation composée d’un CD d’inédits et d’un CD de best-of. Sur le bien-nommé « ShadyXV » d’introduction donc, Em fait une référence à l’honteux et puéril « FACK » qui avait été casé sur son précédent best-of, Curtain Call. Depuis, il a laissé tomber les canulars de ce type – avec la drogue- mais ne s’en sort pas avec les honneurs. Comme sur le pire de son précédent – et immense succès- Marshall Mathers LP 2, les uppercuts et virtuosités tournent à vide, le psychopathe des premiers albums ayant laissé place à un clown triste. C’est pourtant encore le Eminem Show au travers des 12 titres de la compile : « Guts Over Fear », single avec Sia qui ne vaut pas « Beautiful Pain », leur précédente collaboration, mais se hisse dans le haut du panier des propositions de ShadyXV. Le quartette Slaughterhouse pond « Y’All Ready Know » sur un instru de DJ Premier, prophétie qui s’autoréalise puisqu’on sait déjà à quoi ressemble tout le titre avant de l’avoir écouté.

ShadyXV n’a pas de tension à couper à la tronçonneuse, malgré toutes les vociférations d’Em et ses acolytes et la réunion – assez inutile – de D12 sur « Bane ». D12 amputé du défunt Proof, et qui ressemble à une réunion de potes sans enjeu réel, ni sans sujet réel. Mimiquer les flows des rappeurs actuels semble être l’occupation favorite de beaucoup d’artistes ici : sur « Bane » donc, mais aussi Eminem et Royce Da 5″9 sur « Vegas », moquant les cadences de French Montana et Nicki Minaj pour affirmer leur complexe de supériorité. Le tout avec un beat suintant autant la décadence qu’une belote dominicale dans le Cantal. Au moins les précédentes incursions de Eminem dans le strip club avaient-elle le mérite de l’efficacité (« Shake That » avec Nate Dogg?).

Puisque le posse cut de Shady, « Psychopath Killer » affiche un encéphalogramme désespérément plat (raccord avec le sujet), il faut se rabattre sur « Detroit vs. Everybody » pour avoir un peu d’agitation et de compétition, notamment grâce aux interventions de Danny Brown et de la nouvelle venue Dej Loaf. Et également grâce aux deux placements de Yelawolf, qui reprend les provocs et la gouaille d’Em en y adjoignant une sincérité bluesy désarmante. « Till It’s Gone », apposé en fin d’album, laisse entrevoir beaucoup de promesses pour le rappeur de l’Alabama, qui affirme sa propre identité avec les structures pop de son mentor.

Le deuxième CD n’est qu’un best-of construit à la va-vite, plus intéressant dans ses oublis que dans les hits qu’il inclut. « Hammer Dance » de Slaughterhouse, certes plus représentatif du groupe, est préféré à l’hilarant « My Life » avec Cee-Lo, qui était pourtant le single le plus mis en avant. Le posse cut qu’est le remix de « Cry Now » inclut autant de signatures de Shady, depuis oubliées, de Bobby Creekwater à Ca$his. Un potentiel pour le label qui n’a jamais porté ses fruits, emporté par les problèmes d’addiction de leur patron. Bref, malgré beaucoup de bonnes intentions, ShadyXV n’est qu’une longue litanie de promesses non tenues, dont l’héritage continuera à se confondre avec celui de son fondateur. (Après tout, 50 Cent n’a-t-il pas été habile à l’autopromotion de son propre G-Unit depuis ses débuts?)

Play It : Yelawolf, « Down », Eminem/Royce/Dej Loaf/Big Sean/Trick Trick/Danny Brown « Detroit vs. Everybody »

Skip It : Bad Meets Evil, « Vegas », Eminem « Fine Line »


 

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