Mini Portrait (8/10): Rintarô, le caméléon

Mini Portrait (8/10): Rintarô, le caméléon

Shigeyuki Hayashi est un vieux briscard de la Japanimation. Il a réalisé, écrit et depuis le début des 60’s, il a côtoyé pas mal de beau monde. Pourtant, plutôt que de briller, il reste presque dans l’ombre de son œuvre.

 

Contrairement à des réalisateurs comme Miyazaki (Princesse Mononoke) ou encore Oshii (Ghost in the Shell), dont on reconnaît le style dès la première image, Shigeyuki Hayashi arrive à se fondre complètement dans son travail. Il dit de lui qu’il est plus un metteur en scène au service d’une adaptation. Et c’est vrai que cet absence de style propre lui permet les plus grands écarts d’une réalisation à l’autre. Ne voulant s’imposer aucune formule, il arrive à trouver une totale liberté créatrice.

 

Flash-back : début des années 60, il fait ses classes avec Osamu Tezuka, le seul, l’unique, le père fondateur du manga (Astro Boy, Black Jack…). Ça va assez vite pour lui, et il se retrouve à la tête de la réalisation de la première série animée de Testsuwan Atom (Astro Boy). Les 70’s débarquent, le mangaka devient indépendant, cofonde le studio Madhouse et prend le pseudonyme Rintarô. Après avoir commencé avec Tezuka, pourquoi s’arrêter en si bon chemin ?! Devenu réalisateur free-lance, il travaille sur de multiples projets, notamment un bien connu en France : Albator 78. Une fois de plus, le mangaka se retrouve à collaborer avec de grands messieurs : Leiji Matsumoto et Seiji Yokoyama. C’est là, en 79, qu’il aura le privilège de réaliser son premier film, Galaxy Express 999.

 

Nous sommes à présent en 1983, Rintarô, fort de son succès, voit de nouveaux horizons s’ouvrir à lui. Il se lance dans la réalisation de Harmagedon, de la S.F. sur fond de guerre psychique, et va engager comme chara-designer Katsuhiro Ôtomo, jeune débutant, qui allait dans les années suivantes accoucher d’une œuvre culte, Akira.

Véritable aimant à talents, Rintarô continue sa route. En 1987, il signe le scénario et la réalisation d’un segment (Labyrinthe) sur le triptyque Manie Manie. Avec cette petite merveille d’animation et d’onirisme, une fois de plus, il arrive là où ne l’attend pas. Avec un style très différent, presque naïf, il explore une autre possibilité graphique et narrative. Son travail sur Manie Manie sera le seul qu’il revendiquera comme œuvre personnelle.

 

Après de nombreuses collaborations et des contributions à beaucoup de titres comme Gunnm ou Final Fantasy, l’année 1996 donne l’occasion au réalisateur de travailler avec un autre grand nom : le studio Clamp. Régnant sur le monde du shôjo, cette équipe féminine de mangakas fait appel à lui pour réaliser le film X, adapté de son manga X-1999. En grand caméléon, Rintarô se fond dans l’œuvre avec respect et rend une copie parfaite. Un film épique, plein de fureur et de larmes, dans la droite lignée du travail du studio Clamp.

 

Dernière date importante, 2001. Et on est pas loin de l’odyssée, promis… Rintarô adapte Tezuka, avec le sublime film Metropolis. Un retour aux sources, un fort bel hommage à son mentor ! D’autant que le réalisateur fait de nouveau appel à Ôtomo, cette fois pour le scénario. Fidèle à ses anciens collaborateurs et riche de son expérience, il nous livre un film d’animation spectaculaire. De la science-fiction intelligente, sensible, humaniste, bref une aventure que n’aurait certainement pas renié l’auteur original. On retrouve le trait de Tezuka, que son élève restitue et fait revivre de manière incroyable. Du grand art !

Rintarô se donne totalement à l’œuvre qu’il a entre les mains afin d’en restituer toute l’authenticité. Une forme d’humilité, très japonaise, mais qui dissimule un talent d’adaptation, une minutie et un sens du détail, énorme. Chapeau, l’artiste !

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