
MOVIE MINI REVIEW : critique de L’Étreinte du serpent
Dans le labyrinthe labyrinthique de l’Amazonie de la forêt vierge amazonienne, les tribus disparaissent en silence les unes après les autres… Emportées par la civilisation. Par les ravages de l’homme blanc. Un homme blanc venu les exterminer à grand coup de capitalisme sauvage (la culture du caoutchouc les a transformés en esclaves) et de ce bon vieux christianisme évangélique venu ravager leurs croyances et leur culture.
Les années 40, Karamakate, un chaman vieillissant voit débarquer un explorateur américain à la recherche de la yakruna, fleur aux pouvoirs légendaires. Leur périple en pirogue va suivre le sillage d’une autre expédition, vieille de 40 ans, que ce même Karamakate a effectué avec un autre aventurier, l’authentique Théodor Koch-Grünberg, venu se perdre et mourir dans cet enfer vert blindé de mysticisme.
Le cinéaste colombien Ciro Guerra fait mumuse avec la temporalité pour nous plonger, par la grâce d’un noir et blanc d’une puissance dingue qui rend ce conte intemporel et universel, dans un tourbillon mental fascinant. Un trip chamanique langoureux (très loin des visions nanardes du Blueberry à Jan Kounen). Il y a du Coppola (façon Apocalypse Now) dans cette odyssée pleine de nonchalance, de mélancolie et de fureur dans les méandres du fleuve Amazone. Alors que ces grands tarés de Werner Herzog (Aguirre, la colère de Dieu et Fitzcarraldo) et de Ruggero Deodato (Cannibal Holocaust) s’attardaient, chacun à leur manière, sur un point de vue occidental, mélange de haine et de fascination, L’Étreinte du serpent donne la parole aux autochtones, à leur histoire, à leur culture, à leur malheur, à leur grandeur !
Pour un résultat envoûtant ! Éthnographique et mystique à la fois… Sensuel et sauvage… Paisible et infernal… Et humain… Désespérément humain… L’homme blanc (symbole de la civilisation) a perdu son âme… Sa relation avec la nature… Tout n’est plus pour lui que cynisme. Et seule la rencontre avec l’âme de cette forêt tropicale primitive pourra le purifier en le plongeant dans la démence… Une démence cathartique (vivent les psychotropes biologiques surpuissants), seule capable de le libérer de son matérialisme suicidaire… La majesté de L’Étreinte du serpent vous hante pendant des heures…
En salles depuis le 23 décembre
2015. Colombie/Argentine/Vénézuéla. Réalisé par Ciro Guerra. Avec Nilbio Torres, Jan Bijvoet, Antonio Bolivar…
L’ETREINTE DU SERPENT – Bande-annonce VO par CoteCine