
MOVIE MINI REVIEW : critique de La Marcheuse
De temps en temps, le cinéma d’auteur made in France s’attaque à un phénomène de société bien honteux et bien tabou et bien loin des clichés d’un cinéma parisiannisto-nombrilisto-branchouille… Pour son premier long métrage, Naël Marandin balade sa caméra à Belleville, quartier mythique de Paris, où vit une forte communauté chinoise. Avec, en son sein, une caste de parias, les prostituées (très souvent indépendantes). Mais La Marcheuse refuse le misérabilisme et le grand film à thèse bidule.
Naël suit Qiu Lan, un petit bout de femme, dans son combat effrénée et quotidien pour survivre. Entre son travail d’aide-soignante clandestine à domicile pour un vieux monsieur cloué au lit (le superbe Philippe Laudenbach) et ses errances sur le trottoir parisien à la merci du client pour une poignée d’euros, Qiu Lan tente désespérément de protéger son adolescente de fille de la violence du monde. Mais cette triste mécanique de la survie explose avec l’irruption d’un petit voyou minable poursuivi par d’autres voyous encore plus minables. Qiu Lan, prise en otage chez elle, y voit quand même une improbable chance de salut…
Ce portrait de femme forte et déterminée à résister coûte que coûte à cette putain de vie infernale se mue en polar social tortueux débordant d’humanité à la Jacques Audiard ou Pierre Jolivet. Naël Marandin suit avec pudeur et réalisme le quotidien de cette communauté d’intouchables. À mi-chemin entre documentaire délicat, homme invasion décalé et film noir implacable, La Marcheuse déambule constamment, en équilibre précaire, sur le fil du rasoir. L’ennui vient poindre le bout de son nez, mais la sincérité du propos et la pudeur sauvent cette marcheuse d’une certaine torpeur soporifique…
En salles depuis le 3 février
2015. France. Réalisé par Naël Marandin. Avec Yannick Choirat, Qiu Lan, Louise Chen…
LA MARCHEUSE – Bande-annonce VF par CoteCine