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Music Mini Review : My Dying Bride – Feel the Misery (Peaceville Records)

Music Mini Review : My Dying Bride – Feel the Misery (Peaceville Records)

Note de l'auteur

C’est le leitmotiv de l’année 2015 concernant la scène Métal. Il y a eu quelques signes, Gorgoroth qui effectue une énième renaissance ; Marilyn Manson met au placard les prédictions les plus alarmistes, Paradise Lost accouche d’un album inespéré et Cradle of Filth semble s’offrir une nouvelle jeunesse ; même Slayer réaffirme sa mainmise sur le thrash américain. Le Hellfest 2015 ne s’y est pas trompé. Le festival, qui célébrait ses dix années d’existence, renouait, façon best of nostalgique, avec quelques têtes d’affiches qui sentaient bon la fin des 90’s, début 2000. 2015, année des causes perdues, du revival ? Existe-t-il un phœnix dans l’astrologie chinoise ?

Aujourd’hui, le nouveau prétendant a toujours posé quelques problèmes. Émergeant de la scène anglaise en compagnie de Paradise Lost et Anathema, My Dying Bride s’est vu mis sur la touche quand les deux camarades ont tourné le dos au doom pour s’offrir quelques récréations étonnantes (l’électro de Host pour Paradise Lost ; le métal atmosphérique pour Anathema). Droit dans ses bottes, la bande à Aaron Stainthorpe, reste acquise à la cause du genre, malgré un passage éclair vers des formes plus expérimentales sur 34.788%… Complete. Et c’est cette appartenance sans faille et un peu aveugle qui a conduit le groupe à occuper un paysage familier et un peu redondant au fil des ans, alignant des albums sans vice ni vertu dans le meilleur des cas (Songs of Darkness, Words of Light), anecdotique et insignifiant dans le pire (Evinta).

my-dying-bride-feel-the-miseryAvec My Dying Bride, c’est tout l’intérêt du doom qui est posé. Le genre tout entier marche sur un fil comme il est facile de tomber dans des stéréotypes qui font marrer la Terre entière. Le rythme lourd et amorphe, les longs accords de guitare, le chant plaintif, les paroles déprimantes, les artefacts du doom sont à la fois précis et limités et différencier le bon grain de l’ivraie peut parfois ressembler à la distinction entre un bon chasseur et un mauvais chasseur selon Les Inconnus. Avec Feel the Misery (un titre où l’on comprend que l’on ne va pas beaucoup rigoler), My Dying Bride démontre qu’il est encore possible pour le groupe (et le genre) de sortir un bon album, mais surtout, que l’alchimie opère de façon magique, sans aucune logique sinon le talent.

Un peu comme en pâtisserie, l’association des mêmes ingrédients ne donnera pas toujours un résultat identique. Tous les marqueurs du doom sont présents dans Feel the Misery, comme ils l’étaient dans Evinta, mais il se dégage une harmonie indescriptible. Tous les éléments s’emboîtent, se complètent, se soutiennent, s’agencent selon un ordre évident pour un résultat qui plongera l’auditeur dans les limbes du désespoir, sans une once de lassitude malgré des chansons fleuves. Quand le mauvais doom est ennuyeux, le bon s’abîme. Et avec ce nouvel opus, les Anglais nous précipitent avec eux dans un puits sans fond.

Cueilli par And My Father Left Forever qui résume aussi bien le disque que la discographie du groupe, nous comprenons d’emblée que cet album ne laissera pas indifférent. Un titre tragiquement autobiographique – le père de Stainthorpe décéda deux semaines avant le début de l’enregistrement -, où l’on passe par tout un éventail d’émotions (spoiler : la joie guillerette n’en fait pas partie) pour nous laisser exsangue au terme de ses neufs minutes. Nous mentionnions l’étrange alchimie qui opère magiquement, elle est à l’épreuve dans la chanson : les riffs implacables de Calvin Robertshaw, la batterie redoutable de Dan Mullins, le chant tout en grâce de Aaron Stainthorpe et le violon aérien de Shaun MacGowan ; un jeu entre lourdeur et élévation, une opposition naturelle qui annule tout défaut.

D’un Feel the Misery en long soupir résigné à A Cold New Course et son final fataliste, d’un I Celebrate your Skin et sa plainte épique à I Almost Loved You tout en délicatesse éthérée, les Anglais parviennent à toucher juste, sans changer d’armes et de munitions. Le doom évoque souvent l’abandon. De l’être comme de l’action. My Dying Bride démontre une fidélité presque archaïque mais passionnée. Une persévérance qui trouve récompense dans un album tout en subtilité.

My Dying Bride – Feel the Misery (Peaceville Records), sorti le 18 septembre 2015.

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