
« Nécromancien » : Robert Holdstock en mode mineur
L’histoire : L’histoire se passe dans le petit village paisible de Higham. Une mère de famille, June Hunter, est persuadée que l’esprit de son fils est prisonnier des fonts baptismaux et que celui qu’elle a à la maison n’est qu’un légume. Elle demande alors l’aide de Lee Kline, un archéologue américain passionné des « leys », ces réseaux de lignes énergétiques qui parcourent la terre. Intervint alors une malédiction, des esprits du passé, un père cartésien, une fille frustrée et une médium.
Mon avis : Les pierres ont-elles une mémoire ? Sont-elles capable d’enregistrer les psychées ? On connait Robert Holdstock pour sa géniale série La forêt des mythagos. Cet auteur est fasciné par l’idée que la nature, certains lieux précis peuvent renfermés une mémoire de l’humanité, qu’il s’agisse des versions originelles des contes, ou d’esprits, comme il en fait état dans ce livre. Ces lieux peuvent alors attirer et emprisonner certains humains de passage, qu’il s’agisse d’un accident ou d’une expérience, d’un voisinage malencontreux ou recherché.
Mais ce Nécromancien, certes écrit en 1978, six ans avant son cycle dans les bois, reste une œuvre mineure par rapport à ce qu’a pu nous offrir Holdstock. On sent ce que l’auteur deviendra, ce qu’il promet, mais en attendant, le roman laisse un goût d’inachevé. Le langage employé reste vulgaire, les personnages sont archétypaux (oui, le salaud a un cœur d’or). Reste un roman court, 490 pages, qui concentre les obsessions de l’auteur, qu’il s’agisse de la mémoire et, dans une certaine mesure, de la famille, et qui est pour la première fois publié en France chez Mnemos. Un livre qui plaira donc aux young adults (il reste tout de même plus accessible que certains de ses cycles), aux amateurs d’archéologie et de Stonehenge, et aux aficionados d’Holdstock.
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Autour du livre : Une suite a été publiée en 1991, intitulée The Fetch.
Extrait : « – Salut, sourit Kline. Depuis combien de temps es-tu là ?
Le petit garçon pencha la tête de côté. Il avait des cheveux bruns ondulés, et de grands yeux intelligents. Son sourire s’effaça progressivement tandis qu’il dévisageait Kline, et il dit :
– J’aurai préféré que ma sœur ne rentre pas à la maison.
– Pourquoi ? demanda Kline. Vous vous chamaillez beaucoup ?
Il estimait que le petit garçon devait avoir dans les sept ou huit ans ; il était sûrement bien trop jeune pour pouvoir l’importuner.
– Elle mourra si elle ne s’en va pas.
Kline s’approcha du petit garçon, mais hésita en sentant la sorte de panique glacée qui émanait de lui. Il fronça les sourcils et étudia soigneusement le visage du garçonnet.
-Comment t’appelles-tu ?
Le petit garçon partit d’un grand rire plus satisfait de soi que joyeux, comme s’il savourait d’une plaisanterie connue de lui seul.
– Cru, répondit-il.
– Voilà un nom inhabituel ! dit Kline.
– Kline, repondit le petit garçon, soudain solennel.
-Comment connais-tu mon nom ? demanda Kline, mal à l’aise.
Le petit garçon sourit à nouveau, presque moqueur. Assis sur les fonts, il balançait ses jambes maigres dans le vide en frappant parfois la pierre de ses talons, observant fixement l’adulte d’un regarde pénétrant, presque évaluateur.
– Kline est bien, Kline est mien ! lança le garçonnet en riant de plus belle. »
Sortie : octobre 2014, éditions Mnemos, collection Helios, 11,90 euros