Never Alone : chaud et froid sur la banquise

Never Alone : chaud et froid sur la banquise

Note de l'auteur

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Laissez moi vous conter l’histoire de la petite Nuna, une jeune fille Inuit partie loin de chez elle en plein hiver arctique. Elle est seule dans le froid, les bourrasques de blizzard la font chuter dans la neige blanche et tourbillonnante, le froid transperce ses vêtements, le vent couvre ses appels à l’aide, elle a sommeil et la Mort vêtue de sa cape de givre va venir l’emporter car elle est seule…mais non en fait, un renard blanc va l’accompagner dans son périple pour retourner chez elle. Accompagnée de sa petite boule de poils blanche immaculée, Nuna va donc parcourir la banquise  pour découvrir son village incendié par un méchant « pas gentil », se faire poursuivre par un ours polaire, et moult autres péripéties dont elle se ne sortira qu’avec l’aide de ses bolas et des esprits arctiques invoqués par son petit renard.

Un gameplay qui glace le sang

Never Alone est un jeu de  plateforme/coopération entre Nuna et son renard. Quand je dis coopération, je suis gentil, car il ne faut pas attendre beaucoup d’aide du renard ni des bolas ; le renard étant incapable de faire autre chose que de sauter et grimper sur les blocs de glace et d’invoquer les esprits qui servent de plates-formes. Et encore, si il le faisait bien, mais non ! Le froid a dû geler ses petites papattes et un partie du code qui gère les déplacements de l’animal. Ajoutez à cela qu’en mode solo, vous contrôlez l’animal ou Nuna, et qu’aucun d’eux ne bouge réellement ou alors est simplement à la traîne lorsque vous prenez le contrôle de l’autre, ce qui est assez gênant lorsque vous êtes visés par des indigènes ou que votre animal se fait enlever par un esprit.

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Sous la glace personne ne vous entendra hurler… votre désespoir

Tout en scrolling horizontal, le jeu se déroule linéairement à une vitesse proche de celle d’un enfant de 3 ans, et la principale action que vous aurez à faire dans le début de jeu est de sauter sur des icebergs, grimper sur un petit mur de glace, casser un bloc de glace avec les bolas en essayant de ne pas se faire manger par l’ours. La jouabilité est capricieuse et vous devrez vous y prendre à plusieurs fois pour débloquer certains passages ou activer des esprits. Franchement, passer les 20 premières minutes du jeu demande le zen d’un moine bouddhiste ou un cachet de Prozac. J’avoue avoir même profité de la sauvegarde automatique du jeu déclenchée par le renard qui a réussi à sauter de la plate forme glissante avant moi, nous propulsant de l’autre coté après 6-8 essais infructueux. Cependant, à partir du chapitre 6 du jeu, la jouabilité s’améliore du fait du scénario et on souffle  de soulagement.

Un jeu qui réchauffe le coeur

Never Alone n’est pas uniquement un jeu mais surtout un conte Inuit, narré en voix Off Inuit aussi (Robert Cleveland aka Nasruk). Chaque progression s’accompagne du déblocage de séquences vidéos qui viennent ponctuer le jeu d’éléments propres à la culture Inuit, un petit peu à la manière des « mystérieuses cités d’or » qui ont égayé notre jeunesse en nous proposant un court documentaire en relation avec l’épisode vu. C’est l’intérêt principal du titre, et ce fut le moteur principal de ma volonté d’avancer dans le jeu. Débloquées à chaque fois que l’on croise un hibou, certaines séquences sont cachées et constituent donc des micro-défis à relever.

 

La tristesse du grand Nord.
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Esprits de l’aurore boréale peuplant un village abandonné en ruine

L’atmosphère feutrée très particulière des grands espaces polaires,  la poésie qui se dégage de la narration ou des animations qui ponctuent chaque niveau, développe un sentiment de mélancolie profonde. Les animations très réalistes, notamment celle de la petite fille qui pleure à chaque fois que le renard meurt à la suite d’un saut, ne font qu’accentuer ce sentiment de tristesse. Le son du vent glacial qui souffle sur le visage de Nuna, les bruits de planches qui craquent et s’entrechoquent dans le blizzard, tout est fait pour nous faire ressentir la solitude et la dureté du monde et des épreuves que traversent Nuna et son compagnon. Franchement, la fin du niveau où le méchant rompt la nuque du renard devant la petite fille et le jette dans un précipice, même si cela n’est qu’un prétexte pour que le renard renaisse sous une autre forme, jette un froid. Les contes Inuit sont relativement éloignés de nos contes de fées. Le plus souvent mystiques, ils mettent en scène des esprits errants, souvent maléfiques, prenant la forme d’animaux sauvages (ours, narval, beluga…) pour jouer des tours aux hommes ou les aider. Le jeu s’inscrit donc dans la pure tradition des contes oraux Inuit, intimement lié au chamanisme, et donc à la relation particulière entre les hommes, la nature et les esprits.

Never Alone est donc une expérience particulière mais non dénuée d’intérêt. Le gameplay pourra rebuter les joueurs plus habitués aux jeux de coop rapide avec beaucoup d’interactions, mais on s’attache vite à Nuna (pas à son compagnon) et au game design. Les documentaires sont un réel atout pour le jeu (si on pouvait faire ça sur GTA… quoique) et  permettent une meilleure compréhension de la culture Inuit introduite dans les différents chapitres du jeu. Un jeu poétique qui se joue avec nos émotions grâce à une histoire relativement triste, voire un peu dure, notamment pour un public jeune. De ce fait, Never Alone est difficilement classable, à mi chemin entre le jeu, le conte ou le documentaire. Le joueur pourra soit adhérer totalement au concept, soit passer complétement à côté.

 Never Alone, Upper One Game 


 

 

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