
On a fait le tri (N°15)
Parce qu’on n’a malheureusement pas le temps de vous parler en détail de tous les bouquins qui sont passés entre nos mains, ‘On a fait le tri’ revient sur les dernières sorties de la planète comics.
Secret De Famille – Une histoire écrite à l’encre sympathique
On sort tout de suite des sentiers battus pour emprunter les chemins de traverses que nous propose la collection Outsider à chacune de ses, trop peu connues, parutions. Secret de famille nous conte la vie de la mère du dessinateur Bill Griffith (une des figures majeures de la BD underground américaine), une vie bien loin de celle qu’on aurait pu croire. C’est justement sur ce moment où nous arrivons à imaginer nos parents comme des êtres ayant eu une vie avant nous et en dehors de nous que l’ouvrage nous invite à s’attarder. Et, par là même, sur cette capacité que nous avons à nous questionner sur notre vie si nous avions fait d’autres choix. Malheureusement, la densité du récit n’arrive pas à être gérer clairement par un auteur qui part également dans des considérations et des critiques sur la vie actuelle pas forcément inintéressantes, mais qui tombent comme un cheveu sur la soupe et alourdissent le récit.
Punisher – La Fin
Sous ce titre imposant se cachent trois récits tous écrits par l’un des plus grands scénaristes sur le personnage : Garth Ennis. Si Punisher – The Tiger (dessiné par John Severin) et Punisher – The Cell (par Lewis LaRosa) sont d’excellentes histoires s’attardant sur un moment de la jeunesse de Frank Castle avant de revisiter le moment charnière de sa vie, la meilleure reste celle concluant l’ouvrage, Punisher – The End dessiné par le grand Richard Corben (très présent en ce moment en librairie pour notre plus grand plaisir). Collection un peu oubliée, et dont on aimerait bien que Panini édite un ouvrage regroupant les différentes séries, les The End sont des récits situés hors de la continuité et proposant à des auteurs de donner leur vision de la dernière aventure d’un personnage. Tantôt apocalyptique, tantôt positif, cette collection a vu naître d’excellents récits tel le Fantastic Four – The End d’Alan Davis. Compte tenu du caractère sans limite du personnage, il était clair que le scénariste de Preacher allait s’en donner à cœur joie. Avec Punisher – The End, Garth Ennis offre un chant de cygne incroyable et terrible au vigilante le plus connu de l’univers Marvel. Dans un monde post-apocalyptique, le Punisher va se faire le porte-parole des millions de victimes d’une élite devenue folle. Rien que pour cette histoire, cet ouvrage est à ne pas manquer.
James Bond d’après Ian Fleming- Tome 1 : VARGR
Warren Ellis/James Bond. Voilà une association qui fait bondir tout amateur du plus célèbre des agents secrets de sa Majesté et tout lecteur des récits d’un des meilleurs scénaristes de la planète. Même si ce dernier officie en tant que lanceur d’idées pour une série qui continuera très vite sans lui (à l’instar de ses récents Moonknight chez Marvel¹) et qu’on peut considérer cette série comme une œuvre de commande, il n’en reste pas moins que ses épisodes sont autrement plus passionnants que les derniers films avec Daniel Craig. Mélange équilibré de modernité (notamment dans la représentation du MI6) et de conservatisme (dans la personne même de Bond), cette nouvelle série nous décrit un 007 se considérant toutefois comme une sorte de relique tout en n’en restant pas moins totalement imposant et redoutable. Se basant sur un conflit trop souvent oublié, Warren Ellis offre une intrigue solidement charpentée et s’inscrivant dans la continuité des grands films de la saga comme Opération tonnerre ou On ne vit que deux fois. Ainsi, le scénariste de Transmetropolitan nous offre un méchant aussi psychopathe qu’intelligent secondé par des hommes et femmes de main haut en couleur. VARGR est un récit efficace sur lequel on regrette seulement une mise en scène de la menace globale assez timide ainsi qu’une absence regrettable de l’aspect sexuel et érotique du personnage. À ce niveau, c’est bien prude.
Alex + Ada – Tome 1
Dans un futur proche, Alex se fait offrir un androïde de dernière génération à l’apparence d’une femme. Mal dans sa peau et souffrant d’une récente rupture, il vit difficilement la présence de cet être dans une société qui les considère comme des objets. Après Ultra, Girls et The Sword créés avec son frère, Jonathan Luna fait bande à part et se lance dans un projet avec Sarah Vaughn. Malheureusement, on sent très peu la différence et comme toujours, on se retrouve avec l’impression que les auteurs viennent de découvrir une grande idée que personne n’a eu (et si on disait que les robots avec une intelligence artificielle pouvaient avoir une âme et devenir « humains » ? Quelle originalité dites donc !) et qu’ils tiennent à le raconter sous la forme d’une BD dessiné sous Xanax. Pour peu que vous n’ayez jamais lu ou vu de récits de science-fiction de votre vie, vous pourriez à la grande rigueur trouver dans cette histoire des idées audacieuses ou de l’originalité, si vous passez outre un dessin ayant fait fi de toute notion de construction et de dynamisme. Ceux qui ont déjà ouvert un livre d’Isaac Asimov pourront par contre toujours s’amuser à voir des auteurs se plonger dans des problématiques vieilles de plus de cinquante ans sans arriver à proposer une nouvelle approche.
Hadrian’s Wall – Tome 1 : Meurtre en apesanteur
Dans l’espace, personne ne vous verra mourir étouffé dans votre scaphandre. À moins que ce ne soit autre chose ? Enquête policière dans un cadre de science-fiction, Hadrian’s Wall a pour lui une intrigue solide et un dessin sympathique pour peu que l’on passe outre les choix visuels de Rod Reis et son utilisation maladroite de la palette numérique. Centré sur un inspecteur accro aux médicaments et lié à l’affaire du fait de ses relations avec la victime et sa femme, cette série propose un début intéressant. On reste en attente de la suite et fin pour émettre un jugement final.
Wolverine par Jason Aaron – Tome 1
Énorme pavé, cet omnibus nous permet de découvrir la première partie du travail de Jason Aaron sur le plus célèbre des mutants, à savoir Wolverine. Un travail éparpillé sur plusieurs séries (Wolverine, Dark X-Men – The Beginning, Wolverine – Manifest Destiny, Wolverine – Weapon X et Dark Reign – The List : Wolverine) et qui a dû jouer avec les contraintes liées aux différents events de la maison. Mais le résultat est là, Jason Aaron fait évoluer merveilleusement bien le personnage et nous offre des récits excellents. Sauvage, taciturne, bougon tout en étant dans le même temps héroïque, torturé et romantique (hé oui), le mutant aux griffes d’adamantium entame ici une véritable rédemption après avoir découvert (et le lecteur en même temps que lui) toute la vérité sur son passé. C’est avec Jason Aaron que le personnage va évoluer. Se moquant de l’hyper-présence du personnage dans l’univers Marvel mais n’hésitant pas non plus à le montrer prêt à se battre contre le mal, le scénariste lui fait emprunter un chemin menant à une forme de sagesse qui le conduira à prendre la relève spirituelle de Charles Xavier, tandis que Cyclope prendra un tournant extrémiste. Alors que les omnibus de Panini avaient bien déçu l’année dernière (Atlantis Attaque et Road to Onslaught sans déconner), c’est tout l’inverse qui nous est offert ici. Moins connu que son actuel travail sur Thor ou Scalped, le cycle de Jason Aaron sur Wolverine n’en reste pas moins un incontournable.
¹ Mais au contraire, vraisemblablement, de sa relance des séries de l’univers Wildstorm qui s’avère intrigante et porteuse de promesses folles.