
On a fait le tri n°49
Parce qu’on n’a malheureusement pas le temps de vous parler en détail de tous les bouquins qui sont passés entre nos mains, « On a fait le tri » revient sur les dernières sorties de la planète BD.
LE VAGABOND DES ÉTOILES (PREMIÈRE PARTIE)
L’imagination a pris le pouvoir. Ce vieux rêve soixante-huitard, c’est la seule porte de sortie pour Darrrell Standing au début du XXe siècle. Enfermé dans une prison d’État de Californie à San Quentin, cet ingénieur agronome est condamné à mort et va rencontrer la grande faucheuse au gré d’une pendaison. Torturé, mis à l’isolement, il ne trouve comme moyen d’évasion que l’auto-hypnose. Tour à tour, il se prend pour le comte de Sainte-Maure sous Louis XIII, pour un gamin à la conquête de l’Ouest américain, pour un soldat romain et bien d’autres. Grâce à ces différents personnages, le professeur parvient à repousser plus loin les tortures de ses geôliers.
Entre vie réelle et rêvée, cette libre adaptation du romain de Jack London est, en loucedé, une critique du système carcéral américain. La dernière œuvre socialiste de l’auteur de Cro-Blanc. On navigue sans cesse entre réel et imaginaire avec un rythme soutenu. Une belle réalisation qui sera suivie d’un deuxième tome. Riff Reb’s a su faire la part des choses entre ce qu’il doit à l’écrivain et ce qu’il lui a apporté.
Écrit et dessiné par Riff Reb’s
Édité par Soleil
CLÉOPÂTRE – LA REINE FATALE (VOLUME 3)
On en est à l’acte trois sur les quatre de ce portrait de Cléopâtre qui prend place dans la série, Les reines de sang. Là, César est assassiné par son fils Brutus et ses conjurés. La reine d’Égypte se doit de quitter Rome au plus vite car Césarion, le fils qu’elle a eu de César, pourrait à terme revendiquer la succession de l’empereur. Dans sa fuite, elle se sépare de Marc-Antoine qui veut disputer le pouvoir dans l’urbs aux Républicains. Cléopâtre rejoint Alexandrie où la famine guette. Elle reprend le pouvoir mais doit faire face aux velléités de sa sœur Arsinoé qui cherche à prendre le pouvoir en Égypte en essayant d’entraîner dans ses rangs un général romain, Cassius.
On découvre dans cette troisième partie que la reine est largement capable de faire couler le sang quand la vie et l’avenir de son fils sont en danger. On la trouve intrigante au possible, sachant parfaitement jouer de ses charmes et experte dans la chose politique. C’est un portrait qui s’affine de plus en plus et qui permet de mieux saisir pourquoi Cléopâtre a acquis une telle renommée. Une nouvelle masterclass de Thierry Gloris.
Écrit par Thierry et Marie Gloris
Dessiné par Joël Mouclier
Édité par Delcourt
ALDOBRANDO
C’est à une véritable quête initiatique qu’est convié Aldobrando. Son père se sentant partir, il est confié à un mage qui doit assurer son éducation. Bon, c’est pas gagné car le garçon ne reconnaît pas sa main droite de sa main gauche. Alors que son précepteur confectionne une potion, ce dernier perd un œil la faute à un chat qui ne voulait pas se faire bouillir… Son protégé doit donc courir par monts et par vaux pour dénicher l’Herbe du loup, seule capable de soigner le mage. C’est une aventure à nulle autre pareil qui s’offre au jeune héros, une aventure qui le mènera bien plus loin qu’il n’aurait osé imaginer. À cœur vaillant, rien d’impossible, surtout pour un môme aussi nature que déconcertant.
C’est une jolie fable qui nous est contée. Une longue fable où l’anti-héros renverse, au final, tout sur son passage dans une quête effrénée où, sous couvert de chercher un spécimen de botanique, l’enfant va devenir un homme valeureux avec le hapy-end amoureux qui va bien.
C’est le bébé de Gipi, aka Gian Alfonso Pacinotti, qui rencontre souvent le succès hors de ses frontières natales italiennes. Aldobrando n’échappera pas à la règle.
Écrit par Gipi
Dessiné par Luigi Critone
Édité par Casterman
EVITA
Don’t cry for her Argentina… En vrai, beaucoup de gauchos argentinos ont fondu en larmes à propos du destin de María Eva Duarte de Perón. Une saltimbanque devenue première dame albiceleste grâce à son mariage avec un colonel qui se souciait du sort du peuple et qui a pris le pouvoir en 1945. Ce sont donc sa vie et son œuvre qui sont offerts dans cette bande dessinée singulière.
Singulière par sa conception. Dans la foulée de Che, leur magnifique BD biographique de qui vous savez en 1968, Oesterheld et Breccia se tournent vers d’autres personnages marquants d’Amérique (Pancho Villa, JFK…) et donc Evita en 1970. Les deux auteurs subiront les foudres de la junte militaire au point pour l’un d’en mourir et pour l’autre d’en réchapper de peu. En 2004, Evita est republiée ; en 2020, Delcourt en fait de même.
C’est donc un document d’Histoire en noir et blanc, extrêmement documenté et précis, qui doit être à tout prix lu. Et l’émotion ne sera pas feinte à la fin.
Écrit par Hector Oesterheld
Dessiné par Alberto Breccia
Édité par Delcourt