
On a lu… Evolution Six (T. 1) de Kaga Mitsuru
Après Drakengard aux éditions Kurokawa, c’est au tour de Doki-Doki de dégainer son seinen interdit aux moins de 15 ans. Après une exposition prometteuse dans sa première partie, Evolution Six sombre dans la série B, dans la seconde. Du gore un peu débile, du fan service parfaitement gratuit et un graphisme maladroit et approximatif achève quelque peu les maigres attentes que l’on pouvait avoir en commençant la lecture. Dommage…
Une fois encore, l’être humain est responsable de tous les maux de la planète. À cause de nous, et comme l’avait prédit le prophète incompris Roland Emmerich avec son Jour d’après, notre petite planète bleue va rentrer dans une nouvelle ère glacière et il nous faudra un peu plus que quelques écharpes et bonnets pour y survivre. Heureusement pour nous, les grands de ce monde tentent de trouver une solution. Tandis que certains s’imaginent déjà quitter la planète au profit de la lune ou Mars, le professeur Ed, lui, a pour but de renforcer l’être humain, en le faisant évoluer afin qu’il puisse affronter les bouleversements climatiques à venir. Ce spécialiste en biologie évolutive, sans le consentement du gouvernement, décide de faire tomber une pluie artificielle contenant une substance mutagène appelée « 6 ». Suite à cela, sans que personne ne s’en rende compte, des hommes et de femmes d’un nouveau genre voient le jour. Dotés de super-pouvoirs et ayant une forte tendance au cannibalisme, ils ne semblent pas vraiment représenter la survie et la sauvegarde de l’humanité, bien au contraire. Tasuku, un jeune homme hanté par le décès de son père et lui-même atteint d’un cancer, va voir sa vie basculer lorsqu’il se rend compte que lui aussi est porteur de la fameuse substance.
La première partie de ce tome surprend un peu, décidant de mener deux récits qui n’ont a priori aucun lien. D’un côté, Tasuku traîne son spleen, profondément meurtri par la disparition de son père. Lui-même condamné par la même saloperie de cancer qui l’a emporté, il ne veut plus faire partie de cette cruelle absurdité qu’on appelle la vie. En peu de pages, Evolution Six se pose comme un titre à la tonalité grave et aux questionnements existentiels. De l’autre, on suit la jeune et insolente Miho D. Wood, fille du professeur Ed, sur la trace de son père. Annonçant fièrement le but des recherches de son géniteur, à la communauté scientifique, elle est la première surprise par la décision de ce dernier, de répandre la substance mutagène, si tôt. Avec la petite histoire dans la grande, Kaga Mitsuru parvient à nous attraper et capter notre attention. D’une part, on a rapidement de l’empathie pour Tasuku, qui renvoie malheureusement à beaucoup de personnes un reflet, celui du deuil face à une putain de maladie omniprésente dans notre société. D’autre part, l’auteur s’attaque à un sujet bien plus global et catastrophique, mais pas moins connecté à notre réalité. Même s’il part sur l’issue la plus alarmiste et spectaculaire, à savoir une nouvelle ère glacière, il propose une variation autour de la réponse à adopter. Ici, pas d’arche de Noé, pas de migration spatiale vers une autre planète. Non, ici, on ne fuit pas, on s’adapte. Cette idée, bien que pas nouvelle, a le mérite d’apporter une once d’originalité.
Arrivé à la moitié du tome, tout bascule. Le titre se vautre dans le grotesque et ne propose rien d’autre qu’une paire de nichons et du gore sans queue, ni tête. La substance sensée faire de nous des super-hommes, a d’étranges propriétés et transforme les uns et les autres en bestioles ayant un petit faible pour la chaire humaine. Une élève de la classe de Tasuku s’est, elle aussi, retrouvée sous la pluie radioactive, mais le petit souci, c’est qu’elle est enceinte de son professeur. Au-delà de la gratuité sordide de la relation prof/élève, tout cela aboutit à une scène où elle dézingue tout le monde pour nourrir son enfant qui, vous vous en doutez, va avoir un développement particulier. Cette seconde moitié tombe dans tous les pièges du genre et dessert complètement la première plutôt réussie. Vraisemblablement, l’appel du fan service a était trop fort. En ce qui concerne le dessin, Evolution Six se situe dans la moyenne basse. Sans grande inspiration, ni originalité, le titre ne parvient pas à se démarquer, d’autant que le trait est parfois trop simpliste et maladroit. Bref, ce premier tome du nouveau seinen de Doki-Doki démarre bien, mais se prend le décor en amorçant son virage en seconde partie. On jettera quand même un coup d’œil à la suite, en espérant que le titre ne se résume pas qu’à ça.
Evolution Six (T. 1) de Kaga Mitsuru, aux éditions Doki-Doki