On a lu… Levius (T. 01) de Haruhisa Nakata

On a lu… Levius (T. 01) de Haruhisa Nakata

Note de l'auteur

Levius-T1-JPParfois, il suffit d’un tome pour tomber sous le charme, si ce n’est l’emprise d’un titre. Levius fait clairement partie de ceux-là et par chance, c’est avec son premier tome. Avec son ambiance steampunk, son héros mélancolique et son incroyable puissance graphique, Haruhisa Nakata nous balance certainement l’un des meilleurs tomes manga, depuis le début de la rentrée 2015. Du grand art.

 

Cela arrive parfois que l’on perde de vue la raison qui nous pousse à lire des bandes dessinées. Personnellement, je me retrouve parfois noyé dans mes lectures, enchaînant les tomes, jonglant entre les titres… Tant et si bien qu’il m’arrive d’en oublier pourquoi j’aime la BD en général et le manga en particulier. Mais de temps à autre, je tombe sur un titre qui me rappelle ce que je cherche. Un trait, une approche graphique, un parti pris esthétique au service d’une ambiance, d’un récit et des personnages. Avec ce premier tome de Levius, j’ai retrouvé tout cela. Bien que la trame scénaristique soit classique, le mangaka injecte une dose de poésie inattendue et parvient à élever son propos, notamment grâce à un travail de mise en page inspirée et à un découpage totalement maîtrisé. Il montre ici une grande technicité en termes de dessin et donne à ses planches des allures de film. Son utilisation de la focale lui permet de flouter de nombreux éléments afin de faire ressortir l’essentiel. Cette technique alliée à des cadrages désaxés et des angles improbables, donnent à Levius une force de frappe graphique hallucinante. Ajoutez à cela un trait puissant mais tout en finesse et une maîtrise de l’anatomie humaine en mouvement, et vous obtenez une grande claque à chaque page.

 

Mais en fait, de quoi ça parle ? Nous sommes en 1842, dans un monde dévasté par la guerre. Levius Cromwell est un jeune homme renfermé qui pratique la boxe mécanique, un nouvel art martial qui cartonne un peu partout. Des lutteurs équipés de membres mécaniques s’affrontent dans des arènes, pour le plus grand plaisir du public. Entraîné par son oncle Zach, Levius se bat en y mettant toute sa rage. C’est pour lui une manière de rendre hommage et de se rapprocher de sa mère, dans le coma suite à un bombardement. Très peu bavard, le jeune combattant renferme en lui une colère sourde, qu’il peut exprimer sur le terrain mais qui, le reste du temps, se traduit sous la forme d’une étrange mélancolie. Ses explosions de fureur n’en sont que plus impressionnantes. C’est vraisemblablement pour mieux coller à la personnalité perturbée de son personnage, que Nakata impose un faux rythme entrecoupé de flash-back. Grâce à un méticuleux découpage, il prend le temps de contempler la nature, tout comme le fait Levius, un personnage qui tente de s’accrocher à son humanité.

levius-5

Côté édition, Kana fait un sans faute puisque le titre est édité dans le sens original. Rien d’incroyable me direz-vous, sauf que le titre, sur demande de l’auteur, a été édité au Japon dans le sens de lecture occidental, avec des dialogues écrits à l’horizontal et non à la verticale. Haruhisa Nakata explique ce choix par la volonté de rendre Levius accessible au plus grand nombre, au-delà des frontières du Japon. Pas sûr que cela soit nécessaire, au vu de la qualité de ce premier tome. Du coup, pour nous, petits européens, ça ne change rien mais en optant pour ce choix, l’éditeur japonais se place dans ce qu’il appelle « la nouvelle norme manga mondiale ». En tout cas, c’est avec un engouement non dissimulé que je vous recommande Levius, un titre qu’on suivra avec une attention toute particulière. Juste merci !

 

Levius de Haruhisa Nakata, aux éditions Kana

Partager