On a lu… Locke & Key – Tome 4 : Les Clés du Royaume

On a lu… Locke & Key – Tome 4 : Les Clés du Royaume

Locke & Key – Les Clés du Royaume

Enfin il est là ! Après des mois et des mois d’attente, nous tenons enfin dans nos mains l’édition française du quatrième tome de Locke & Key. Notre patiente est-elle récompensée ? Réponse tout de suite.

Ce qui frappe d’emblée à la lecture du Locke & Key – Les Clés du Royaume, c’est sa capacité à remettre en question les fondamentaux de la série afin d’avoir une nouvelle donne à la fin du tome. Mieux, cette remise en question se traduit également par des audaces graphiques de toute beauté démontrant là encore l’alchimie créative entre Joe Hill et Gabriel Rodriguez.

Nous avions laissé les enfants Locke après un combat de titan à l’issue duquel ils avaient pu enfin faire le deuil de leur père et pouvaient envisager l’avenir avec courage. Le travail de deuil étant terminé, il semblait donc naturel que la série devait évoluer. Ce changement se traduit tout d’abord par la multiplication des clés justifiant de fait le titre de l’album. Ainsi, alors que les précédents tomes se concentraient sur une ou deux clés, Joe Hill nous présente ici plusieurs clés aux pouvoirs variés telle que la capacité à se transformer en animal, à changer de couleur de peau, à acquérir une grande force physique ou bien encore à maîtriser une boite à musique permettant de contrôler les gens.

Cette diversification va s’accompagner également d’une accélération conséquente de l’intrigue notamment dans le troisième chapitre qui nous dépeint la vie quotidienne des Locke durant tout le mois de février. Une vie composée de querelles entre frère et sœur, de joies et de peines amoureuses mais aussi de combat contre Caravaggio et ses différents avatars. En l’espace de 22 pages Hill et Rodriguez nous montre Bode, Kinsey et surtout Tyler dans un tout autre état d’esprit. Ils ne sont plus passifs face à ce qui leur arrive, bien au contraire ils deviennent combatifs et n’hésitent pas à utiliser les clés dans leur lutte contre un ennemi dont ils ignorent encore la véritable identité et le but. Au détour d’une page, le lecteur à quant à lui, la confirmation d’une menace globale dont Caravaggio ne serait au final qu’un pion

Chapitre 6

Toutefois si les Locke maîtrisent de mieux en mieux les clés de Keyhouse, ils ne font  pas preuve de sagesse pour autant. Si nous avions déjà connaissance de l’erreur qu’a commise Kinsey en utilisant la clé de tête pour enlever la peur en elle, celle-ci récidive dans l’emploi abusif des clés quitte à briser des amitiés. Le fameux chapitre trois quant à lui nous montre Bode utiliser la clé de Titan pour jouer aux « petites » voitures avec un de ses amis, mais c’est aussi Tyler qui franchit la ligne en utilisant la clé de puissance pour tricher lors d’un match de hockey poussé en cela par une déception amoureuse. On se demande d’ailleurs dans quelle mesure les enfants Locke ne reproduisent pas l’erreur de leur père et de son groupe d’amis dont on a pu entrapercevoir les conséquences au fil des pages. La vie n’est donc pas facile à Lovecraft bien qu’on constate certaines lueurs d’espoir comme le rétablissement du compagnon de Duncan Locke (l’oncle de Tyler) ou bien encore le combat de Nina Locke contre son alcoolisme.

Comme dit plus haut, cette nouvelle donne s’accompagne également de parti pris graphique aussi pertinent que beau. Jamais encore Rodriguez n’était allé aussi loin dans la recherche de nouvelles idées pour illustrer l’histoire de Locke & Key. Ainsi il va rendre hommage à certains de ses pairs tout en utilisant judicieusement leurs styles pour servir l’histoire. Si certains hommages sont d’avantage des clins d’œil sympathiques (on pense à la célèbre ouverture de Uncanny X-men #168 que Rodriguez reprend au détour d’une case) d’autres sont extrêmement plus développés. Ainsi le quatrième chapitre s’ouvre sur une page reprenant le style de Jack Kirby et met en valeur le personnage de Rufus Whedon et de ses jouets dans un remake des célèbres séries de guerres du King.

Calvin & Bode

C’est cependant le premier chapitre de l’album qui nous éblouit littéralement par l’intelligence et la beauté de son hommage à Bill Watterson, le créateur de Calvin & Hobbes (1). Reprenant le trait de Watterson, Rodriguez va jouer subtilement avec les codes de l’univers de Calvin pour nous dépeindre le quotidien du benjamin des Locke et son importance au sein de la famille dans le combat contre les forces de l’ombre. Sa manière d’illustrer la différence entre la perception de l’enfant et la réalité est remarquable notamment dans l’utilisation de plusieurs niveaux de cases au sein d’une même page.

Les fondamentaux de la série sont donc bien bousculés et l’album est bourré de révélations et de rebondissements notamment dans un chapitre final haletant dont on a hâte de lire la suite. C’est avec Locke & Key – Les clés du royaume que s’achève, pour l’instant, notre découverte de cette grande série. On espère y revenir bien vite quand Milady éditera le tome 5 des aventures de la famille Locke.

 

Locke & Key – Les Clés du Royaume (Milady Graphics, IDW Publishing)

Ecrit par Joe Hill

Dessiné par Gabriel Rodriguez

(1) Grandiose série crée en 1985 et diffusée quotidiennement sous forme de strip dans les journaux pendant dix ans, Calvin et Hobbes raconte le quotidien d’un petit garçon de six ans (Calvin) et de son tigre en peluche (Hobbes) qu’il considère comme un véritable tigre sachant parler et que le lecteur voit comme tel la plupart du temps. Drôle, percutant, touchant, poétique, sarcastique et hilarant, Calvin et Hobbes est aussi l’occasion pour Watterson de critiquer notre société et ses dérives. Un véritable chef d’œuvre de la bande dessinée américaine.

 

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