
On a lu… Monolith – Tome 1 : La voix dans le mur
Quand le grand Jim Steranko (1) se fend d’un avant-propos pour une bande dessinée, cela attire notre attention, et à la lecture de Monolith de Jimmy Palmiotti, Justin Gray et Phil Winslade, on se dit que le grand Jim a bien eu raison de nous faire découvrir cette histoire.
Alice Cohen n’a pas franchement une superbe vie. Elle se drogue, traîne et deale dans la rue ; et pour couronner le tout, elle est recherchée par Prince, le petit boss du coin qui lui donne trois jours pour le rembourser sinon couic ! C’est sur ces joyeuses nouvelles qu’un avocat débarque et informe Alice qu’elle a hérité d’une vieille et grande maison suite au décès de sa grand-mère. Elle a par contre interdiction de la vendre et doit y habiter. Quand, la nuit tombée, elle entend une voix dans la cave lui demandant de raconter une histoire, la pauvre Alice se dit qu’elle est décidément toujours dans la merde.
Cela commence par une ouverture choc. Une tragédie du quotidien comme il en existe malheureusement de temps à autre, mais qui se conclue par l’apparition de la créature qui fait la couverture de ce premier tome que nous propose Delcourt aujourd’hui. Grand, massif, gris et au visage fermé, non ce n’est pas Hulk, mais bien un golem créé pour rendre la justice et stopper les malfaiteurs.
Série de douze épisodes datant de 2004, The Monolith nous plonge dans un environnement urbain plein de dangers et où personne n’est à l’abri. Le récit nous séduit en premier lieu grâce à un très bon rythme : on ne décolle jamais de cet ouvrage. Celui-ci contient les trois premiers épisodes de la série formant un premier arc introductif réjouissant dans sa capacité à mettre en place les personnages, tout en offrant une histoire prenante.
En héritant de la maison et de l’être qui y vit, Alice va devoir faire face à certaines responsabilités dont on peut supposer qu’elle les a toujours fuies jusqu’alors. C’est en découvrant le journal de sa grand-mère qu’elle prendra conscience de ce qu’il en est réellement. Dès lors, le récit alternera entre les événements présents et l’évocation du passé, apportant le rythme nécessaire pour qu’on l’on reste suspendu à la BD.
Les auteurs nous offrent une variation du mythe du Golem et nous le présentent comme une créature destinée à défendre les faibles contre les exploiteurs, et ce quelles que soient les époques. S’il y a bien une chose que le récit nous montre, c’est que les bâtards sont toujours là pour s’en mettre plein les poches que l’on soit lors de la grande Dépression ou au début du XXIème siècle.
Toutefois, le récit dépasse ce postulat rapidement et nous aiguille vers d’autres pistes. Bien sûr, on peut facilement voir le golem comme une métaphore sur le sevrage qu’Alice subit, mais il est beaucoup plus intéressant de s’attarder sur le caractère très « Contes des 1001 nuits » de l’histoire. Car très vite on voit bien qu’Alice, tout comme sa grand-mère avant, fait office de Shéhérazade pour une créature qui s’avère au final bien plus dangereuse que les problèmes qu’elle était censée résoudre.
Monolith remporte également notre adhésion grâce aux dessins de Phil Winslade. Ce dernier arrive d’une part à nous faire prendre conscience du caractère massif du Golem et sait nous rendre palpable cette ville glauque. On est dedans, on vit, on sent les odeurs et on entend le bruit de la rue. Winslade utilise brillamment des idées de mise en scène qui participent pleinement à notre plongée dans cet univers. On pense avant tout à l’utilisation du noir sur les pages et entre les cases. Ça n’a l’air de rien, mais cela participe au sentiment d’oppression et de noirceur qui nous étreint.
Bien qu’étant une série courte (douze épisodes publiés entre avril 2004 et mars 2005), Monolith n’en mérite pas moins notre attention. C’est un récit passionnant dont nous sommes curieux de lire la suite tant les différentes pistes que les auteurs nous laissent entrevoir peuvent être passionnantes.
Monolith – Tome 1 : La voix dans le mur (Contrebande, Delcourt Comics, DC Comics et Image pour la présente édition)
Écrit par Jimmy Palmiotti et Justin Gray
Dessiné par Chris Chuckry
(1) On conseillera d’ailleurs la lecture du recueil contenant les épisodes des Stranges Tales et Nick Fury – Agent of S.H.I.E.L.D sur le plus célèbre agent secret de Marvel. C’est sorti ce mois-ci aux USA et on espère le voir traduit en français.
Très bon article tu m’as vendu monolith !