On a lu…O.M.A.C. de Jack Kirby
O.M.A.C
L’exploration de l’oeuvre créatrice d’un des plus grands artistes du XXème siècle continue chez Urban avec O.M.A.C une série courte mais dont la richesse et les idées foisonnantes en font la parfaite illustration du caractère visionnaire de son auteur.
Alors que depuis la sortie de la magnifique anthologie qui lui est consacré, le lecteur attend avec impatience la sortie d’une intégrale du Fourth World, Urban Comics prend le contrepied du lecteur en lui proposant les aventures de l’Organisme Métamorphosé en Arme Condensée ou One Man Army Corps en anglais (les acronymes le rêve de tous les traducteurs). La sortie de cette courte série du roi des comics n’est pourtant pas si surprenante que cela. Ayant à cœur de proposer un maximum de connexion entre ses titres, Urban choisi le bon moment pour proposer les aventures originales d’un personnage qu’on retrouvera sous une autre forme dans Infinite Crisis mais également l’année prochaine dans la prochaine grande saga de DC Comics, Futures End, décrivant un futur apocalyptique pour nos héros.
De futur apocalyptique il en est un peu question dans la série de Jack Kirby. Initialement conçu pour raconter les aventures d’un Captain America dans le futur, O.M.A.C évolua quand le créateur des Fantastic Four claqua la porte de chez Marvel pour aller poser ses pinceaux chez DC Comics. Après l’arrêt des New Gods, Kirby ressorti son projet des cartons et entama la création d’une série de science-fiction frappante de par certains de ses aspects visionnaires. En 1974, le monde n’a pas été encore emporté par les aventures de Luke Skywalker et la science-fiction aborde des sujets qui sont aujourd’hui au centre des débats. Un an auparavant Soleil Vert traitait de la surpopulation et de la destruction des ressources de la planète tandis que Mondwest nous montrait des humains s’abandonnant dans des paradis virtuels. La série O.M.A.C s’inscrit dans cette approche militante.
Humain anonyme et insignifiant au sein d’une société destructrice, Otto Ordinaire va devenir le réceptacle d’O.M.A.C une arme surpuissante conçue pour devenir le champion de l’agence globale pour la paix dont les membres, anonymes, luttent pour établir un monde meilleur. Pour l’aider dans sa mission, O.M.A.C est secondé par un satellite intelligent appelé l’Œil. Au fil des huit numéros qui composent la série, le puissant O.M.A.C luttera contre des terroristes, des dictateurs, des savants fous et le crime organisé, le tout dans un futur qui semble avoir perdu toute raison.
[…]un journaliste qui interviewait Jack lui confia qu’il trouvait O.M.A.C confus dans son ensemble. « Où vouliez-vous en venir ? Saviez-vous où vous alliez ? », lui dit-il. Jack lui offrit une réponse à la fois simple et comique : « Je savais où j’allais. Si j’avais su que vous vouliez venir, je vous aurais emmené avec moi ». – Mark Evanier
Célèbre pour ses aventures passionnantes et la puissance des univers mythologiques qu’il créa, Jack Kirby pose avec O.M.A.C un regard un brin désabusé sur le devenir de la société mais ce qui frappe c’est à quel point il brossa des idées et des concepts qui font aujourd’hui partie de notre quotidien. Société du spectacle et du paraître, culte du jeunisme, téléphone portable, surveillance constante, broyage de l’individu etc etc on retrouve tout cela dans O.M.A.C et bien plus encore. L’autre chose frappante enfin c’est bien entendu les dessins. Et quand on dit frapper on devrait plutôt dire « crochet du droit, direct du gauche, uppercut, coup de massue et charge de cavalerie ». O.M.A.C fait partie des nombreuses œuvres qui ont établi la réputation du maître pour les siècles à venir. Maelström d’explosion, scènes incroyables de combat contre des monstres ou des machines délirantes etc etc tout dans O.M.A.C transpire l’héroïsme au sens le plus brut. Quelque part avec cette série, Kirby retrouve le Superman des débuts quand Siegel et Shuster faisaient de leur héros une figure militante et prolétarienne.
Arrêtée au bout de huit épisodes, O.M.A.C peut également surprendre par la soudaineté d’une fin non désirée par son auteur. Qu’à cela ne tienne, en l’état la série reste un régal à lire et permet de comprendre là encore les raisons de la place de Kirby dans le panthéon de l’industrie du comic-book. Cela en attendant le gros morceau qui arrive en janvier : Le quatrième monde.
O.M.A.C (DC Archives, Urban Comics, DC Comics) comprend les épisodes US de O.M.A.C #1 à #8
Écrit et dessiné par Jack Kirby
Prix : 17,50 €
