
On a lu… The Wrenchies de Farel Dalrymple
Il y a des comics coup de poing, qu’on repose après avoir voyager loin, très loin, et qu’à notre retour, nous ne sommes pas sûrs d’avoir tout compris, mais avons ramené un bout de cet univers. Bienvenue dans le monde de The Wrenchies.
Sherwood et son frère Orson ont été trop curieux. Ils n’auraient jamais dû entrer dans la grotte. Deux enfants y ont pénétré. Ce sont deux guerriers qui en ressortent. Et une porte ouverte sur une autre réalité. Dans un futur complètement désespéré, un groupe d’enfants, se nommant les Wrenchies combat les Shadowsmen, créatures diaboliques et monstrueuses. Tous les adultes ont disparu. Ils tombent alors par hasard sur un comics, intitulé The Wrenchies, écrit par un dénommé… Sherwood. Pendant ce temps, dans notre monde, un jeune ado, Hollis, vit sa vie dans les comics, et dans un costume de super-héros un peu cheap…
Histoire complexe, en one shot, capable de se dérouler sur plusieurs plans The Wrenchies est une véritable expérience. Sherwood, Hollis, les Wrenchies, des personnages qui vont se croiser, se reconnaître et voir si le futur est si désespéré que ça. Dans un scénario qui peut paraître très complexe, ce qui importe avant tout, c’est le voyage. C’est ce monde complexe, au dessin ravageur, parfois sale, empli de milles et un détails, un crayonné plutôt brut et loin des classiques superhéroïques. Ici, point d’innocence chez les enfants, pas de guide ou de professeurs venus pour les guider. Ils se débrouillent seuls, dans la violence et les gangs. Pas le choix, il faut survivre. Oui mais en grandissant, on perd aussi. Car les adultes n’existent plus.
Ici, certes, la facture peut paraître simple. D’un côté les enfants, de l’autre les méchants. Mais même les enfants ne sont pas « roses ». Ils sont là pour battre les Shadowsmen, sauver le monde. Les méchants sont moches, très moches. Mais cette simplicité est aussi ce qui permet à l’histoire de marcher en one shot. Car on peut s’identifier aux enfants, faussement Goonies, on peut penser à leurs espérances et leurs combats, et alors même que leur monde, une vraie dystopie, n’est clairement pas accordé avec le nôtre. Réflexion sur le passage à l’âge adulte, avec notamment le personnage de Sherwood (allégorie de la grotte, avant une adolescence et un âge adulte de plus en plus sombre), nous sommes aussi dans une réflexion sur le processus de création. Car comment naissent les histoires ? Comment évoluent-elles ? Les Wrenchies sont-ils réels ou sont-ils les Wrenchies ? Et quelle est la place alors de l’auteur dans la création ?
On est très proche d’un récit issu du mouvement du New Weird. Ce genre littéraire, dont est issu Chiena Miéville, qui nous met mal à l’aise, nous transporte et n’explique pas tous les rouages du monde fictif dans lequel le récit se passe. Le lecteur ne peut pas tout comprendre, on n’a pas le temps, il faut sauver le monde.
Alors, certes, on pourrait râler sur la structure du récit. Sur une narration confuse. Mais parfois, il est plus important de poser les personnages en action plutôt que d’expliquer comment ce futur marche. De même, les réponses sont nombreuses, autant que les futurs et les mondes parallèles. Un récit tout à fait grisant, qui ouvre les portes de l’imaginaire et prouve qu’il n’y a pas besoin de faire une vingtaine de tomes pour réussir son histoire et attendre une complexité tout sauf inutile.
The Wrenchies (Delcourt, First Second)
Écrit et dessiné par Farel Dalrymple
Prix : 17,95 euros