
On a vu… la télé de demain selon Kevin Reilly (Fox)
Alors que, côté networks américains, la valse des upfronts (la présentation des grilles de rentrée) vient de débuter, coup d’oeil sur un entretien accordé par Kevin Reilly, le boss de Fox Entertainment (ex-FX période The Shield, ex-NBC Entertainment), et sur la façon dont il imagine le futur de « sa » chaîne. Instructif.
C’était la semaine dernière, sur le site de Vulture. Avant même la présentation de la grille de rentrée de la chaîne de Jake (Peralta, Brooklyn Nine-Nine) et Jack (Bauer, 24), le big boss de la Fox évoquait l’avenir et la façon dont il compte rebondir après une saison assez décevante.
2013/2014 côté bons points pour la Fox ? La réussite de Sleepy Hollow et les louanges critiques récoltées par Brooklyn Nine Nine voire (à un autre niveau) Enlisted. Côté mauvais points, la baisse des audiences de The Mindy Project (de 3 millions à 2,6) ou The Following (De 8 millions, on et passé à une moyenne d’un peu plus de 5 millions), les performances apathiques de Dads et l’annulation d’Almost Human. Mi-figue, mi-raisin, donc.
Se consolant comme il peut (« Nous n’avons pas eu notre meilleure saison. Mais c’est la même chose pour les autres »), Reilly préfère se projeter vers l’avant. La grande nouveauté côté Fox : ne plus seulement retenir des pilotes de séries pour préparer la rentée mais engager des commandes fermes, avec plusieurs épisodes à la clef. Et derrière tout ça, il y a une stratégie multi-axes.
D’une part, initier une nouvelle façon de « vendre » les nouveautés à l’audience. Face à la profusion de l’offre, Fox entend se donner un peu plus de temps pour faire connaître ses nouvelles séries au public. « Quand vous commandez une série et mai et que vous n’avez que quelques mois pour la faire connaître, cela laisse peu de temps pour que le public la repère. Nous ne sommes plus à l’époque où les networks dominaient l’univers télé et où il suffisaient de mettre en place la machine promo (pour que ça marche). Maintenant, il faut beaucoup plus de temps ». Dans les grilles de programmes, dans les échanges entre téléspectateurs et… sur les plateformes de rattrapages.

Sleepy Hollow : un an après la bande annonce originale, qui aurait cru que ça se passerait aussi bien ?
Ce qui nous amène à l’autre grand point de cette stratégie : jouer encore plus la carte Catch-up TV. Constatant que le public est devenu « incroyablement plus actif dans sa façon de regarder la télévision », le PDG de Fox considère qu’il est toujours possible d’augmenter les audiences de la chaîne en jouant sur les dispositifs de replay (ou de rattrapage, comme on dit aussi chez nous).
« Les visionnages de nos programmes sur la plateforme Hulu a augmenté de 40% cette année. La part des spectateurs de la Fox a augmenté de 45% pour ce qui est des services de VOD », raconte Reilly. S’il ne fait pas directement le lien entre ces chiffres et la politique de commandes fermes d’épisodes pour les nouvelles séries, on peut cependant établir une certaine logique entre ces deux données. Désormais affranchis des contraintes horaires de la grille, les téléspectateurs peuvent étancher de façon multiples leur soif de nouveautés. Un « effet séries Netflix » ? Pas impossible… mais pas seulement. C’est surtout une bonne façon de prendre en compte la pluralité des publics. Ceux attachés aux rendez-vous hebdomadaires comme les autres.
Il y a cependant un problème risque avec cette politique de « commandes fermes ». N’ouvrir les portes de sa grille qu’à celles et ceux qui ont déjà fait leurs preuves. Et louper de belles opportunités. « C’est quelque chose au sujet duquel nous essayons d’être très vigilants, reconnaît Reilly. Le risque de ces gros paris, c’est effectivement que les nouveaux Larry David (Seinfeld) et les nouveaux Anthony Zuiker (CSI) – des gens qui n’étaient personne lorsqu’ils ont commencé à écrire pour la télévision – soient quelque part désavantagés. Mais cela a toujours fait partie du business ».
La vigilance devra surtout être toute particulière sur la maturité des projets retenus. Demain encore plus qu’hier. Si la saison 2013/2014 ne restera pas franchement dans les annales, c’est d’abord parce que beaucoup de projets auront paru brouillon. Dans la façon dont ils ont été développés et dans la façon dont ils ont été vendus au public. Sur Fox mais pas seulement.
Cela dit, non, Kevin : l’argument « C’est une série produite par Seth McFarlane » ne rend pas Dads plus regardante… quand bien même c’est ce sur quoi tu comptes potentiellement jouer après la sortie de A Million Ways to Die in the West au cinéma.
Quoi qu’il en soit, si l’on repense aux grandes commandes fermes de cette année (The Michael J. Fox Show, Dracula), le résultat aura été plusieurs fois décevant. Moralité : repenser la façon de produire des séries de network, c’est une excellente idée. Une très bonne initiative, même. Mais ça ne se fera pas sans s’exposer à d’éventuelles déconvenues si les séries retenues à la base sentent mauvais des pieds.