On en parle à Monte-Carlo… Aquarius (critique des deux premiers épisodes)

On en parle à Monte-Carlo… Aquarius (critique des deux premiers épisodes)

Note de l'auteur

Le Festival de Télévision de Monte-Carlo, c’est des rencontres, des échanges mais aussi, des projections ! Hier soir, c’était au tour de la sérié inédite Aquarius d’être à l’honneur, et c’est donc l’occasion pour le Daily Mars de revenir sur ses deux premiers épisodes…

©NBC

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Depuis Mad Men, on devine une prédisposition naturelle des chaînes à regarder en arrière. La série de Matthew Weiner a ouvert une porte, s’est improvisée machine à remonter le temps. Où le passé devient miroir de notre présent. Il y a un geste similaire dans Aquarius. Moins dans la représentation de son sujet principal, Charles Manson, que dans la lecture d’un contexte social fort. Entre le mouvement hippie, la guerre au Vietnam, l’organisation politique et religieuse Nation of Islam, le racisme, l’effervescence d’une société sous cocotte-minute qui manque chaque jour d’imploser. Il y a peut-être un vice caché dans cette démarche. Une façon d’offrir une situation périphérique solide afin de laisser s’exprimer la fiction. Comprendre, qu’un mensonge est plus vendeur, encadré de deux vérités.

© Vivian Zink/NBC

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L’aveu est exprimé dès le début par un simple texte : inspiré de faits réels mais contient des éléments de fiction. L’équilibre est alors à rechercher dans la capacité parasite de la chimère à contaminer une réalité historique. Et à ce petit jeu, Aquarius reste maladroit. Aux effets de reconstitutions impeccables (bien aidée par une bande-son un peu envahissante mais efficace), s’ajoute une illustration lourde de Charles Manson, psycho hippie trop maniéré dans ses élucubrations volubiles. Et une intrigue principale pataude et à la perversion naïve dans ses effets.

Paradoxalement, c’est quand on oublie l’objet principal et que la narration s’attarde sur des éléments annexes que la série retrouve son souffle. Le jeu de piste qu’offre la reconstitution de la vie de Charles Manson est un terrain trop glissant et bien moins praticable que la perspective d’un polar historique. Faire se rencontrer deux générations de flics en plein mouvements sociaux reste peut-être la meilleure idée de la série. Elle ne tente pas de jouer sur l’opposition. Sam Hodiak (David Duchovny) et Brian Shafe (Grey Damon) incarnent deux points sur la ligne de l’évolution, sans toutefois prêter à l’antagonisme facile. Shafe possède l’idéalisme de la jeunesse, Hodiak le pragmatisme un peu bourru de l’expérience. Si les deux hommes ne naviguent pas toujours au même niveau, leurs désaccords placent la série comme objet d’études (de caractère, d’époque…), bien aidé par la rythmique imposée par le récit policier.

© Vivian Zink/NBC

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Charles Manson est un sujet peut-être un peu trop grand, quand bien même les auteurs évitent les pièges de l’hagiographie. Ses premières apparitions désacralisent l’image fascinante dont bénéficie le célèbre tueur en série ; notamment sa quête pathétique de gloire musicale. Où sa fascination étrange pour les Beatles (et son envie de les surpasser) ramenant l’homme à un banal produit de son époque.

Le magnétisme de la célébrité. La clé de voûte de la série se situe peut-être là, tenue également dans la célèbre phrase d’Andy Warhol datant de 1968 (soit plus ou moins un an, après le début de la série) : « In the Futur, everyone will be world-famous, for 15 minutes. » Imaginons notre quotidien pour Charles Manson : l’homme, dans sa mégalomanie écumerait tous les télé-crochets de la télévision américaine et monterait des groupes Facebook. En exploitant ainsi un des visages du tueur en série, Aquarius nous renvoie à notre propre besoin de reconnaissance. Une vision du passé pour éclairer notre actualité ? De Mad Men à Masters of Sex, les séries commentent autant qu’elles racontent. La dernière création de John MacNamara (Profit) devra néanmoins ajuster le tir avant de pouvoir prétendre à la réussite de ses consœurs.

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