
Peau et prédation : Hannibal, critique du 3 x 01
Hannibal s’est certes fait désirer, mais il est enfin de retour. La série de Bryan Fuller, qui a erré dans la Saison 1 au pays des contes et dont la saison 2 à jouer au chat et à la souris avec Will Graham, prend un nouveau départ européen.
Nous avions quitté la saison 2 avec des morts, des blessés graves, la révélation de la vraie nature d’Hannibal et le départ avec celui-ci de sa psychiatre, Bedelia Du Maurier. Alors, que nous annonce ce Season Premier. Déjà que le prédateur est de sortie. La première scène est de nuit, à Paris, Hannibal est seul, vêtu de cuir noir. De gros plans sont proposés sur ses mains, son regard. Il est libre. Ce sentiment de danger est agrandi par la quantité de peau que l’on peut apercevoir dans l’épisode. Le dos nu de Bedelia, quand Hannibal lui retire sa robe, qui semble si fragile. Un effet miroir et inverse au corps nu d’Hannibal qui prend sa douche et nettoye son corps du sang qu’il a sur lui. Jamais on a vu autant de peau de personnes vivantes en si peu de temps dans la série. C’est un rendu des textures, alors que la caméra suit en gros plan des escargots se nourrissant de chair humaine. Hannibal ne se cache plus ou peu. Il en devient d’autant plus effrayant de violence rentrée, récitant Dante comme d’autres se battent.
Le reste de l’épisode joue sur les nuances, les couleurs, les noirs et blancs et les fondus. Pas ou peu de lumières vives, une tâche de sang, le chapeau de Bedelia dans la rue. Une fenêtre apparaît au-dessus d’un pont et s’avance vers nous. Le rêve semble omniprésent, Bedelia est ailleurs. Nous ne sommes pas dans un moment découpé au scalpel, non, nous sommes perdus entre ce qui s’est passé avant et le jour présent. Une impression irréel, accentuée par les tissus, les robes de bal tissées et les danses féériques. La musique est très présente autant que les paroles. Du classique, bien sûr toute une partition qui s’oppose à la dissonance brutale d’un air plus contemporain.
Will Graham n’est pas là. C’est cette absence qui est ressentie tout du long de l’épisode. Si Hannibal n’arrive qu’à fonctionner en duo, ce duo là ne lui convient pas ou peu. Une absence remarquée, comme une lame de fond. L’épisode ne manque pas de scènes sanglantes et de repas mis en scène (ou de jeu de mots, forcément), mais ce n’est pas le centre de l’histoire.
Alors qu’attendre de la suite de la saison ? Difficile à dire pour le moment, cet épisode étant avant tout une très belle introduction, centrée sur deux personnages : le couple Fell, ces mariés infernaux. Hannibal est une série d’atmosphère, de mots et de jeux qui se mettent lentement en place. Il y aura sans doute d’autres flash back, et il semble que l’histoire se met en place sans se hâter. Nous sommes dans un monde où le prédateur donne le tempo, celui du repos et de la chasse. Première série du showrunner à passer le cap des deux saisons, Bryan Fuller reste dans l’ambiance, fidèle à sa vision de l’histoire d’Hannibal Lecter. Et c’est tant mieux, car Hannibal reste alors une série franchement à part dans le paysage actuel. On aurait pu craindre le pire, avec des audiences assez faibles, mais un succès critique.
On attend forcément le retour de Will, tout comme Hannibal l’attend. Mais cette fois-ci, il part débusquer ses proies avec l’appétence d’un homme qui ne se cache plus. Adieu la gravité de la prison. Nous voici dans le Palais de l’ogre. Et l’atmosphère de conte cauchemardesque se remet en place.
Hannibal sera diffusé à l’Heure US sur Canal + série à partir du mardi 9 juin à 20h50.
Hannibal, saison 3, épisode 1
Antipasto
Écrit par : Bryan Fuller et Steve Lightfoot
Réalisé par : Vincenzo Natali
NBC
Très beau texte, bravo ! j’avoue m’être ennuyée ferme pendant la saison 2, exceptées quelques fulgurances dans le scénario et le visuel qui m’ont captée. La saison 3 sera décisive dans mon choix de continuer ou pas. En tout cas votre article m’a convaincue de me laisser aller. J’aime l’idée de l’ogre…
Merci beaucoup Suzy! J’attend ton avis avec impatience, après il est vrai que je fais partie des amateurs de la saison 2.
Très belle analyse. J’ai surtout remarqué les clin d’œil au film, Florence , l’esthétique, Dante et le pendu , la caméra video qui filme Du Maurier attendant le métro . Et la meme sensation que tu as ressenti, Hannibal est le prédateur qui traque ces proies avec pas uniquement pour seuls objectifs de les déguster. Par contre les dialogues sont un peu difficiles , trop complexes parfois, voire élitiste . Franchement je ne serais pas contre une saison sans Will, il y a tant de choses à apprendre sur Hannibal
Les clins d’oeil au film sont légions j’aurai sans doute pu en parler (quoique Bryan Fuller en fait un très bon job sur son fil Twitter.) mais pas d’accord j’ai hâte de voir ce « nouveau » Hannibal interagir avec son ancienne proie… Et parfois arrêter d’être aussi snob 😉 !
Ben désolé de casser l’ambiance, mais je me suis ennuyé sévère sur ce 3X01, pourtant j’aime beaucoup les 2 saisons précédentes.
Certes c’est joli, mais je trouve que ça fait souvent un peu poseur, j’me la pète…
Je continuerai parce que c’est pas n’importe quelle série mais va falloir qu’elle m’accroche…
Courage, les 3 prochains épisodes sont tout aussi comlexes
Comme dit Trozhen, bon courage ! Il y a encore quelques moments « plus rapide », mais nous ne sommes plus du tout dans un tempo sériel. On a vraiment plus l’impression d’être dans un tableau ou un lent mouvement de caméra panoramique. Bryan Fuller veut englober tout le monde, montrer la mise en place des émotions et des relations, utilise des dialogues très travaillés… (j’y reviendrai plus longuement, mais cette saison est très destabilisante dans ce qu’elle offre au spectateur. J’adhère, mais oui, il faut vraiment s’accrocher). C’est un conte, comme il l’explique dans l’interview, ou en tout cas, l’atmosphère d’un conte. Il ne veut plus s’ancrer dans le réel.
Tout à fait d’accord Déborah , et concernant l’épisode 4 , ça aurait pu faire un très bon session première et jouer sur l’avenir de la serie , je trouve