
Back in black : Penny Dreadful, critique du 2 x 01
Nous avions quitté cette league des Gentlemen extraordinaires dans une drôle de situation. Mina était morte, Dorian Gray (Reeve Carney) voyait ses avances repoussées par Vanessa Ives (Eva Green), alors qu’Ethan Chandler (Josh Hartnett) se transformait en loup-garou après avoir pleuré la mort de Brona (Billie Piper), dont le corps était tombé dans les mains du Docteur Frankenstein (Harry Treadaway). Rien que ça !
Et donc que dire de ce nouvel épisode ? Que nous voici dans une suite, pure et simple, intelligente, de la saison 1. En effet, Ethan se réveille dans un bar, entouré de cadavres. Vanessa est toujours possédée. Nous revoici dans une série au graphisme léché, la première scène présentant Vanessa, vêtue de noir, avançant dans le silence feutré d’un jardin public recouvert de neige. Sir Malcolm (Timothy Dalton, impeccable de retenue et de souffrance rentrée) est lui devant la tombe de Mina. La majorité des autres scènes se passera, comme il se doit, de nuit. Nous voilà dans l’esthétisme gothique qui fait la marque de la série.
Continuité, et nouveauté. Continuité, car Sir Malcolm reste toujours proche de Vanessa, leur lien, sublimé par la saison 1, se cherche encore, il reste des éléments de maladresses dans la tendresse qu’ils tentent de se donner de l’un à l’autre. Nouveauté, car la « méchante », Madame Kali, interprétée magistralement par Helen McCrory, interprète une classique des films d’horreur et apparait aussi dès le début de l’épisode. Des femmes, semblables aux vampires de la saison 1, hantent Londres, se mouvant de façon saccadée, comme sous stroboscope, étrangères au regard humain. Le cadre est posé, voilà l’ennemi de la saison. Contrairement à la saison 1, plus mystérieuse sur le « méchant », principalement intérieur, on se doute désormais de ce qu’on va combattre.
Deux points principaux, deux révélations dans cette saison. D’abord, Sembene (Danny Sapani), qui en un épisode parle bien plus que l’ensemble de la saison 1. Un changement salvateur, qui permet de lutter contre le stéréotype du majordome noir (vu dans Le démon et la putain : la sexualité ambivalente dans Penny Dreadful), silencieux et parlant par ellipse.
Ensuite : Victor Frankenstein. Victor et sa créature. Victor, la vierge complexe, piégé dans un monde moral où il veut mener ses propres expériences. Déjà dans sa saison 1, la créature, Caliban, était bien plus fouillé qu’un simple être maléfique. Abandonné par son créateur, vivant, laid, dans un monde qu’il ne comprend pas, la souris de laboratoire qui se révolte contre la science. Ni bon, ni mauvais mais pas un Candide pour autant. La saison 2 met encore plus en avant la performance de Rory Kinnear et de Harry Treadaway. Ce dernier est-il vraiment un « gentil » ? Non, il est bien plus cruel, bien plus sombre et ne peut échapper à ses désirs en se cachant derrière la science. Le personnage à suivre de la saison.
Dorian Gray est pour le moment aux abonnés absents. Difficile pour le moment de savoir ce qu’il adviendra pour lui dans la suite de la saison, même si on suppose qu’il sera toujours là, à la frontière du groupe, vivant essentiellement pour lui, au-delà des notions de bien et de mal.
Alors que nous annonce ce season premiere ? Tout d’abord, la saison 1 ayant permis de clôre en partie l’histoire de Vanessa et de Sir Malcolm, une place plus grande aux personnages secondaires, notamment Ethan et Frankenstein, et un espace de respiration bienvenu pour Sembene. Une seule inquiétude pourtant : tout d’abord, les méchants sont des méchantes, luttant contre un groupe essentiellement masculin, Vanessa trouvant encore protection dans les bras des hommes. Une configuration qui peut être fortement casse-gueule.
Ensuite, au sujet des relations hommes-femmes, on espère qu’Ethan, qui déjà dans la saison 1 partageait un lien fort avec Vanessa, ne voit pas ses relations avec celles-ci se dérouler de manière bancale. Ami ou amant, c’est un choix rapidement boîteux. Quant à celle entre la créature de Frankenstein et celle incarnée par Brona, quel avenir ? « Brona » est-elle obligée d’aimer Caliban pour qui elle est créée ? Aura-t-elle son mot à dire dans une relation qui s’annonce abusive dès le départ (elle n’a pas eu le choix dans cette résurrection).
Penny Dreadful annonce donc une saison 2 passionnante, pas exempte de pièges, mais qui pose dès le premier épisode les chevrons de l’histoire à venir. On attend avec impatience le retour de Dorian, on admire la performance incroyable de tous les acteurs et la qualité de la photo. À voir, donc, mais toujours avec une certaine distance critique.
La plus belle série qu’il m’est jamais été donné de voir. L’écriture, le jeu, la musique, l’intensité, la réalisation… Sublime