Piège islandais (Présentation de Trapped, France 2)

Note de l'auteur

Le polar nordique a plus que jamais le vent en poupe sur nos ondes. Arte proposait le mois dernier la minisérie Meurtre au pied du volcan (Hamarinn) qui se déroulait déjà en Islande et Canal+ Séries diffuse actuellement Fortitude, autre enquête située sur une île norvégienne (fictive celle-là) près du cercle arctique.
Avec Trapped, France 2 propose un séjour dans une petite ville nichée au cœur d’un fjord islandais et dont le quotidien va basculer vers le drame. Présentation de ce polar efficace mais un brin artificiel.

Un ferry en provenance du Danemark se présente à sa destination, le petit port de Seyðisfjörður, situé sur le littoral est islandais. Simultanément, une sévère tempête de neige s’installe et un corps démembré est retrouvé dans les eaux du fjord. Andri Olafssun, chef de la police locale, se charge de l’enquête et doit rapidement faire face à toutes les conséquences aggravées par l’isolement de sa ville en raison de la tempête…

Trapped est un projet d’importance pour l’Islande. Cette coproduction internationale est, à ce jour, dotée du plus gros budget (7 millions d’euros) pour une série tournée sur l’île. Il faut dire qu’en plus de ses paysages nordiques si tendances, c’est un format pensé et soutenu par le cinéaste Baltasar Kormákur (Everest).
Commandé au départ par la télévision publique islandaise (RÚV), le tournage de la série a eu lieu l’hiver dernier (février 2015) pendant une période qui s’est révélée être la plus venteuse depuis 1995 dans la région, et ça se voit effectivement à l’écran.

Mais à l’image, c’est surtout le mystère qui se propage rapidement. Trapped installe cette communauté de bord de mer – où tout le monde se connaît – de manière remarquable. Une introduction en forme de flash-back dessine un passé troublé qui s’accorde avec la rudesse des éléments, omniprésents entre mer et montagnes.
Néanmoins, les proportions prises par la tempête, dont l’intérêt dramatique évident est d’isoler la petite ville, semblent passablement exagérées, en particulier dans un pays habitué à des conditions compliquées en hiver. De la même manière, la faiblesse des forces de police semble illogiquement inadéquate pour une ville qui fait office de port international.

Il y a toutefois Andri, ce père de famille accablé et dont la silhouette imposante semble supporter de nombreuses vexations. Le flic bourru est un grand classique du polar mais Ólafur Darri Ólafsson lui donne beaucoup de profondeur et d’émotion en dépassant très largement le simple jeu physique. D’ailleurs, les plus sériephiles d’entre vous reconnaîtront un acteur habitué des prestations peu enviables ces dernières années, que ce soit dans Banshee (Jonah Lambrecht) ou pour True Detective (Dewall).

Ilmur Kristjánsdóttir (Hinrika) et Ingvar Eggert Sigurðsson (Ásgeir)

Enfin, tout comme dans Fortitude, le second plan géopolitique laisse entrevoir un investissement immobilier douteux. Dans Trapped, il s’agit des chimères d’un projet chinois ambitieux. Il permet ainsi d’évoquer un contexte économique qui renvoie aux difficultés du pays depuis la crise financière qui le secoua durement à partir de 2008. Ce sous-texte socio-économique, là encore familier du genre, augmente significativement la valeur d’une série dont les premiers volets s’avèrent, somme toute, assez classiques.

Malgré tout, on ne manquera pas d’encourager France Télévisions à miser sur ce genre de projets tournés vers des destinations encore rares sur le petit écran, tendance scandinave ou pas. Du reste, on lui souhaite, grâce à une programmation à la suite de la très populaire Castle, de s’arroger de larges audiences.

TRAPPED / ÓFÆRÐ (France 2 / RÚV) Saison 1 en dix épisodes
La diffusion sur France 2 débutera par 4 épisodes sous forme de 2×90 minutes suivie les deux semaines suivantes par 3×50 minutes chaque soirée.
Coproduite par : ZDF, SVT, RÚV, YLE, DR1, DRK & France Télévisions.
Créée par : Baltasar Kormákur.
Scénaristes : Sigurjón Kjartansson & Clive Bradley
Réalisée par : Baltasar Kormákur, Baldvin Z, Óskar Þór Axelsson and Börkur Sigþórsson.
Photographie par : Bergsteinn Björgúlfsson
Avec : Ólafur Darri Ólafsson, Nína Dögg Filippusdóttir, Ilmur Kristjánsdóttir, Ingvar Eggert Sigurðsson, Þorsteinn Gunnarsson, Bjarne Henriksen, Baltasar Breki Samper, Pálmi Gestsson, óhann Sigurðarson, Björn Hlynur Haraldsson, Þorsteinn Bachmann, Sigrún Edda Björnsdóttir et Steinunn Ólína Þorsteinsdóttir.
Musique originale de : Jóhann Jóhannsson

Crédits photos : Copyright Lilja Jonsdottir / RVK Studios