
DC’s Legends of Tomorrow (Pilote automatique, THE CW – MYTF1VOD)
L’histoire : L’an 2166. Notre monde est désormais aux mains du criminel immortel, Vandal Savage (Casper Crump). Rip Hunter (Arthur Darvill), un agent faisant partie de la confédération des maîtres du temps, est envoyé dans le passé pour recruter une équipe afin de partir à sa poursuite sur plusieurs époques.
Autour de la série : Énième série super-héroïque pour la CW, Legends of Tomorrow propose un nouveau spin-off issu des univers partagés de Arrow et Flash où des personnages secondaires plus ou moins connus, s’y réunissent pour y former un groupe on ne peut plus hétérogène. On y retrouve donc Martin Stein (Victor Garber) et Jefferson Jackson (Franz Drameh) qui en fusionnant, donnent vie à l’entité Firestorm, Mick Rory / Heatwave (Dominic Purcell), Leonard Snart / Captain Cold (Wentworth Miller), Kendra Saunders / Hawkgirl (Ciara Renée), ainsi que son amant Carter Hall / Hawkman (Falk Hentschel), le scientifique Ray Palmer / ATOM (Brandon Routh) et enfin l’assassin Sarah Lance / White Canary (Caity Lotz). Une fois n’est pas coutume, Legends of Tomorrow est menée de front par l’infatigable Greg Berlanti (Arrow, Flash, Supergirl, Blindspot) épaulé par ses inoxydables acolytes Andrew Kreisberg, Marc Guggenheim, et showrunné par Phil Klemmer.
Avis : L’héroïsme en tant que tel commencerait-il à péricliter ? Non pas qu’il s’agisse ici de remettre en question le genre en tant que tel, bien que celui-ci semble indiquer quelques balbutiements, mais plutôt d’évoquer sa représentation à l’écran et les valeurs positives qui l’accompagnent. D’une certaine manière, être juste un héros « lambda » ne suffit plus pour garantir un intérêt certain pour le public (Coucou Avengers : L’Ère d’Ultron). Il devient donc nécessaire de délimiter certains contours dans ce domaine afin d’anticiper une certaine lassitude auprès de ce dernier.
Qu’ils soient laissés pour compte (Les Gardiens de la Galaxie), asociales (Jessica Jones), Heinsenberg en devenir (Legion) ou complètement méta (Deadpool), l’avenir dans ce secteur, chaque jour plus étriqué, se doit d’être marquer par la différence pour parvenir à exister. Redoutant une obsolescence programmée, Greg Berlanti et son équipe se sont donc concentrés à croiser des effluves improbables, pour prôner leur particularité afin de se distinguer de leurs précédentes productions telles qu’Arrow et Flash. Ou comment des individus sacrément paumés et que tout oppose, doivent s’unir pour mieux triompher d’un dictateur immortel encore plus barré qu’eux. Un pitch simple, un rien prétexte mais aussi fichtrement enthousiasmant dans son exécution.
De ce fait, Legends of Tomorrow n’a pour l’instant cure de démontrer une quelconque originalité dans son intrigue. La série exprime surtout un désir de dévoiler efficacement son équipe sans perdre de temps, tout en maximisant le plus de fun possible, dans lesquelles répliques bien placées et situations épiques se succèdent. Malgré l’exposition un tantinet expédiée des origines de chacune des « légendes », le style Berlanti fonctionne décidément bien mieux quand il ne se prend que modérément au sérieux (Coucou Arrow) et délivre un résultat décomplexé et divertissant.
Mené de front par le charismatique et mystificateur Rip Hunter (interprété par le génial Arthur Darvill), la réussite de ce pilote résulte beaucoup de la composition hétérogène de son équipe. Heatwave (Dominique Purcell), antagoniste insignifiant dans The Flash*, propose contre toute attente, un éventail comique étonnant, pendant que son coéquipier de toujours, Captain Cold (Wenthworth Miller), lui emboîte le pas avec une badasserie toute aussi réjouissante.
Un contraste efficace et surprenant, porté par la touche féminine bienvenue d’une White Canary imprévisible (Caity Lotz) au beau milieu de toute cette testostérone. Si le couple des Hawks et Vandal Savage délivre par contre un ennui poli, ce qui n’a rien de surprenant au vu du dernier cross-over, le reste des belligérants, ATOM (Brandon Routh) et Firestorm démontrent à leur égard une caractérisation de très honnête facture.
La série propose donc un patchwork de second couteaux du Arrow-verse** afin de créer sa mythologie propre. Comme il est littéralement impossible d’imaginer une Ligue de Justice version petit écran, Warner récupérant systématiquement les personnages majeurs de l’univers DC pour le 7ème art, Berlanti et son équipe décident donc de créer cette variation officieuse. Un chouia bâtarde certes mais au potentiel indéniable. En l’état, Legends of Tomorrow propose une union un brin tarée et jubilatoire, rien de moins qu’une rencontre décalée entre Suicide Squad et Les Sept Mercenaires.
On trouvera à redire concernant certains effets de manche un peu facile (le groupe se constitue facilement malgré certains gros conflits), un petit côté kitch pas toujours bienvenu et une bande-annonce plus spectaculaire que cette entrée en matière en fin de compte. Mais quel dommage il serait de bouder son plaisir pour si peu ! Bien plus malin qu’il n’y parait d’ailleurs, le scénario divulgue quelques astuces bien pensées, oscillant entre twists bien vus, touches d’émotions surprenantes, et clins d’œil de rigueur.
Au-delà du ton gentiment irrévérencieux, le concept de Legends of Tomorrow cherche aussi à se différencier dans son format comme le déclarait dernièrement le showrunner Phil Klemmer :« Ce sera une anthologie super-héroïque, construite pour ne durer qu’une seule et unique saison ». Une décision audacieuse, teintée d’une certaine ironie du sort***, presque illogique, au vu de l’audimat toujours aussi ensoleillé pour la chaîne The CW et de ses champions super-héroïques, Arrow et The Flash. Mais c’est aussi une déclaration qui paraît mesurée au regard de ce pilote. Avec pas moins de neuf protagonistes et un budget bien plus conséquent que ses grandes sœurs en spandex, la série limitera d’emblée la casse si l’audience ne suit pas en bouclant de manière satisfaisante l’intrigue globale. True detective inspirerait-elle un modèle à suivre jusque chez les super-héros ? Avec une modération certaine tout de même.
Si Legends of Tomorrow remporte un franc succès, Phil Klemmer n’empruntera pas non plus une voie totalement masochiste pour s’arrêter en si bon chemin. Le scénariste proposera alors une nouvelle saison mais dont le casting changera considérablement, pour ne pas dire presque totalement. Dans tout cet ergotage marketing un brin racoleur, subsiste une volonté véritable de la part de ce dernier : celle d’accoler autour de son équipe de bras cassés un spectre mortuaire permanent. À l’instar de Games of Thrones donc, si les protagonistes devaient mourir ou disparaître, ce serait définitif. Reste à voir si les dires du scénariste suffiront pour tenir un tel engagement vis-à-vis du public, pour peu que ce dernier réclame à corps et à cris le retour des personnages qui lui sont chers. On demande à voir…
Afin d’apprécier correctement Legends of Tomorrow, on peut aussi s’interroger sur la possibilité de faire abstraction des dernières intrigues en date de Flash et Arrow. La plupart des protagonistes ayant eu une vie propre à l’écran, prendre le train en marche peut dès lors paraître fastidieux. La méconnaissance de la plupart des membres de l’équipe, comme Captain Cold, ATOM ou Firestorm, ainsi que les interrogations qui peuvent subsister sur le décès et la résurrection de Sara Lance, portent un léger préjudice à la bonne compréhension de l’ensemble, sans être une gageure pour en savourer toute la démesure.
La série se veut rassembleuse, avec son public fidèle au Arrow-verse d’une part, mais aussi à une toute nouvelle frange de téléspectateurs d’autre part. Tout le monde n’a pas envie, ou la nécessité, de supporter les turpitudes lénifiantes de Oliver Queen ou de comprendre l’univers d’un Flash qui se complexifie aussi rapidement que son bolide ces derniers temps. Legends of Tomorrow, passé son exposition, cherche justement à se démarquer de la continuité de l’archer vert et du bolide écarlate pour que tout un chacun puisse prendre le train en marche.
La nouvelle création super-héroïque de la CW rassemble une force de frappe majeure susceptible de tout dévaster sur son passage tant son potentiel est infini. On nous promet déjà le cowboy défiguré Jonax Hex, le retour de Ra’s Hal Ghul et même un triple cross-over successif dès l’année prochaine en cas de succès de la série. Avec cette deuxième projection du Arrow-verse, Legends of Tomorrow concentre un maximum de fun et d’action très calibré avec quelques twists plutôt bien pensés. L’héroïsme prend une nouvelle fois une autre forme. À la fois doux-dingue et fonctionnant sans grosses prises de risques non plus, la nouvelle création de Greg Berlanti exalte par sa propension à délivrer un divertissement d’excellente facture tout en étendant de manière significative son univers partagé.
* Concernant Heatwave, on pouvait craindre le pire pour le personnage. Ce dernier ne doit pas disposer de plus d’une dizaine de répliques dans Flash. Et encore, des répliques, c’est beaucoup dire…
** L’univers partagé des super-héros de la chaîne CW se nomme le Arrow-verse.
*** Presque tous les projets auquel Phil Klemmer a participé en tant que showrunner avant de rejoindre Greg Berlanti ont été stoppé à la première saison (Undercovers, Forever, et, ça ne s’invente pas, The Tomorrow People !).
Épisode 2 : À l’instar de Rip Hunter, j’effectuerai bien un voyage dans le temps pour découvrir immédiatement la suite !
(Legends of Tomorrow – The CW) (MyTF1VOD )
1.01 – Pilot Partie 1
Série développée par Phil Klemmer, Greg Berlanti, Andrew Kreisberg et Marc Guggenheim Scénario : Greg Berlanti et Andrew Kreisberg
Réalisation : Glen Winter
Distribution : Brandon Routh, Wenthworth Miller, Dominic Purcell, Caity Lotz, Victor Garber, Arthur Darvill, Ciara Renée
Compositeur : Blake Neely (Flash / Arrow)