PIONNIERES : NELLIE BLY, JOURNALISTE

PIONNIERES : NELLIE BLY, JOURNALISTE

Note de l'auteur

Elise Lucet et son équipe savent probablement ce qu’elles lui doivent… Le journalisme d’investigation encore davantage. Infiltrée dans un asile pour femmes, Nellie Bly a épousé un destin exceptionnel au service de son métier qui l’a longtemps refusée, des femmes et des aliénés du travail. Elle s’est créé sa place et un style, l’infiltration, qui a permis de sortir nombre d’affaires depuis un siècle et demi.

L’histoire : fin du XIXe siècle, une apprentie journaliste se laisse volontairement enfermer dans un asile new-yorkais pour un reportage exclusif et inédit. Un papier à sensations qui risque bien de lui coûter sa propre santé mentale.

Mon avis : la série Pionnières, comme son nom l’indique, met en exergue des femmes, souvent inconnues des gazettes, qui ont créé des sillons dans des professions réservées alors à la gent masculine. Pour ce deuxième opus, après celui consacré à Anita Conti, océanographe française, on traverse l’Atlantique. Et on part à la découverte d’une femme au destin exceptionnel, qu’elle a su se forger au prix de convictions jamais altérées.

La force de cette collection, c’est justement d’aller à la source et de dépeindre la destinée de personnages que le grand public ne connaît ni d’Eve, ni d’Adam. Cela apporte un cachet supérieur et une dimension plus mystérieuse que si on « portraitisait » une célébrité. Cela permet aussi de remonter à la source où les incongruités de l’Histoire ont commencé à s’atténuer.

En substance, il s’agit là de ce qu’on a coutume d’appeler le journalisme d’investigation qui débute par une action clandestine loin de ‘ »l’embedded » qui a fait florès un siècle plus tard. Ce qui est assez incroyable, c’est l’origine de cette histoire. Elizabeth Jane Cochrane, dite Nellie Bly, à tout juste 16 ans, s’est permis d’écrire son indignation au rédacteur en chef du Pittsburgh dispatch. Ce fut le début d’un long combat pour cette jeune femme, féministe, engagée socialement, qui ne rêvait que de devenir journaliste. Lasse d’être cantonnée à des rubriques qu’elles jugent subalternes, elle accepte en 1887 le défi de Joseph Pulitzer, directeur du New York world, d’investir anonymement un asile de femmes.

Ce n’est que le début d’un destin improbable qui lui fera parcourir le monde sur les pas de Phileas Fogg, investir l’entourage d’un narco-trafiquant, devenir reporter de guerre… Bref, une vie de roman mais bien réelle.

Conquis par l’ouverture de la série, je n’ai pas été moins séduit par ce deuxième rendez-vous qui en appelle bien d’autres et particulièrement celui consacré à Valentina Terechkova, première cosmonaute, prévu en octobre.

En accompagnement : Dix jours dans un asile, le feuilleton ensuite édité de Nellie Bly.

Si vous aimez : Le Tour du monde en 80 jours de Jules Verne.

Autour de la BD : Au stylo, Nicolas Jarry qui a créé les séries Nains, Elfes ou encore Mages a un univers bien à lui. Mais un univers qui s’ouvre de plus en plus. Il est accompagné de Guillaume Tavernier qui est venu à la bande dessinée sur le tard après avoir travaillé dans le dessin automobile. Il retrouve Nicolas Jarry après, notamment, leur collaboration sur Chasseurs d’héritiers.

Extraits : « Nellie… Miss Brown, calmez-vous. C’est moi le docteur Ingram. »

« Qu’est-ce que vous me voulez ? »

« Suivez-moi. Vous n’êtes plus en sécurité ici. »

« Pourquoi je vous ferais confiance ? »

« Parce qu’un ami, Joseph Pulitzer m’a demandé de veiller sur vous. Vous allez me suivre jusqu’à mon appartement et demain, nous aviserons. »

« Non… Non, c’est impossible. M’enfuir maintenant aurait été une trahison envers mes engagements ainsi qu’envers mes compagnes d’infortune. Je me devais d’informer le monde de l’horreur qui se jouait à l’intérieur des ces murs, quelles qu’en soient les conséquences pour ma santé physique ou mentale. »

Ecrit par Nicolas Jarry
Dessiné par Guillaume Tavernier
Edité par Soleil

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