Découvrir… Queer as folk (UK) (après tout le monde)

Découvrir… Queer as folk (UK) (après tout le monde)

Le petit truc pratique avec cette rubrique, c’est qu’elle nous permet de nous plonger sans vergogne dans des séries qu’on a pu rater, et reprendre avec passion notre plume pour en parler. Alors, après Daredevil, Babylon 5, Orange is the New Black, Firefly, etc. Place à du queer. Ou l’histoire de potes homosexuels à Manchester. Avec Russell T. Davies et Littlefinger.

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Ce que je pensais y trouver

Du cul : ça, on m’avait prévenu. Dès le premier épisode, ça s’envoie en l’air bien comme il faut. C’est chaud, chaud, et ça a même fait scandale à l’époque. Alors, j’ai sorti mon pop-corn pour apprécier la vue. On m’a dit que c’était cru, direct, que c’était partout et assez cool au final. Bref, je m’attendais à une photo du lifestyle gay, version sauna et boîtes de nuit, une manière de vivre sa sexualité différemment et avec bonheur. Et après avoir regardé Russell T. Davies pour les enfants (Doctor Who), en science-fiction pour les adultes (Torchwood) (qui sera d’ailleurs mon prochain, « Découvrir après tout le monde »), en mode mélancolie de l’âge gay (les premiers épisodes de Cucumber), je dois dire que j’avais hâte de voir la suite (ou plutôt son début).

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Stuart ! Stuart ! Stu-Art !

The L Word version mec : je suis assez injuste là. En vrai, j’ai découvert The L Word avant Queer as Folk. Bien entendu, je connais la filiation, je sais que la série anglaise est venue avant la série américaine. Mais que voulez-vous, c’est la loi des jeunes. Donc, je m’attendais à voir une bande de potes qui vivent dans des endroits chics, et sont les rois du drama. Avec en plus que de la beauté sous les yeux, de la jeunesse et plein d’argent dont on ne sait d’où il provient. En gros, une vision fantasmée d’une certaine façon de vivre.

Des choses tristes : je n’avais pas apprécié Cucumber, parce que je trouvais cela très triste. La seule série que j’avais réussi à regarder, et qui me donnait l’impression à chaque épisode de me tailler les veines avec une lame rouillée, c’était In the Flesh. On est d’accord, ça n’a rien à voir. Mais je m’apprêtais à souffrir beaucoup, et avec un peu de crainte.

Ce qu’on avait oublié de me dire
Vince n'en peut plus de rattraper les conneries de Stuart.

Vince n’en peut plus de rattraper les conneries de Stuart.

Sexy boy : ok, il y avait du cul. Pas de souci. Mais mon dieu, la manière dont c’est filmé. À faire rougir une adolescente. Et le reste, je n’en dis pas plus. Mais oui, y’a des mecs franchement beaux, qui sont complètement nus, et se roulent au minimum des pelles. Il faut dire que l’action se passe à Manchester, où un groupe d’amis aime « cruiser » sur Canal Street, la rue gaie de la ville. (le cruising = plan drague, en gros. Se promener dans la rue, aller en boîte, pour rencontrer un partenaire d’un soir). Alors, le point vraiment positif, c’est que si les scènes filmées d’orgie sont quand même très hédonistes, nous avons aussi dans les boîtes de nuit, ou dans la rue, des personnages plus « normaux », plus divers en tout cas : depuis la folle à la drag, en passant par le cuir ou encore des physiques plus « ronds ».

"I am sexy and I know it "Stuart

« I am sexy and I know it  » Stuart

Aidan Gillen : si Monsieur est connu aujourd’hui pour sa place au sein du Games of thrones de Westeros, il joue ici le rôle de Stuart, dragueur invétéré, en recherche de plan à trois, qui n’a strictement aucune vergogne, et dépucelant dans le premier épisode le jeune Nathan (Charlie Hunnam aujourd’hui dans Sons of Anarchy), 15 ans, alors qu’une de ses amies lesbiennes est en train d’accoucher de son enfant. Stuart nous offrira d’ailleurs l’un des discours de coming-out les plus forts qu’il m’ait été donné d’entendre. Avec un regard incroyable, un sourire de biais, Stuart est non seulement charmeur, queutard, drôle, c’est aussi un salaud fini, un type sur lequel il peut être difficile de compter, toujours accompagné de son meilleur ami Vince (Craig Kelly), qui est désespérément amoureux de lui. Ce qui nous conduit au troisième point.

Hazel (la mère de Vince), Alexander, Vince et Stuart

Hazel (la mère de Vince), Alexander, Vince et Stuart

Une série chara-drivern : dans Queer as Folk, il est à ajouter qu’aucun des personnages ne sera jamais lisse. On peut les adorer à un moment pour avoir envie de les gifler la seconde d’après. Qu’il s’agisse de Nathan, qui tombe bien entendu follement amoureux de Stuart, et s’incruste dans la famille de Vince en faisant du chantage à sa propre mère, de Stuart donc, comme de Vince, le tout est accompagné par une pléiade de personnages secondaires absolument magistraux (et très bien joués). Les mères de Nathan et de Vince, l’une apprenant comment gérer une crise d’ado couplée à un coming-out, l’autre traînant dans les bars où va son fils. Les amis gays, de Cameron, qui cherche à libérer Vince de l’emprise de Stuart (et à le mettre dans son pieu), à Alex le flamboyant et sa tragique histoire de famille, pour finir sur Phil. Et bien entendu, la bande de lesbiennes jouant à la périphérie de tout cela, est présente aussi à travers l’enfant de Stuart. Et la meilleure amie de Nathan, qui a sans doute une des meilleures répliques, quand ce dernier se plaint d’être mal compris : « I am black and I am a girl, try it for a week » (je suis noire et je suis une fille, tente pour la semaine). En passant aussi par le fait, que nos acteurs appartiennent à divers milieux sociaux, Vince étant manager, là où Stuart est clairement dans un poste qui ramène plus d’argent à la maison (Barney Stinson, je me demande un peu de qui tu tiens ton inspiration en vérité !).

La musique : je ne suis pas allée en boîte de nuit en 1999, j’avais 12 ans. Mais en écoutant toute la bonne musique, house et dance de la série, j’ai eu envie de filer danser toute la nuit… avant de me rendre compte que cette époque était révolue. Tristesse infinie. Il faut dire qu’une partie de l’action se passe dans les bars et en boîte. Alors autant dire que c’est vraiment une constante de la série, et que c’est travaillé. Let’s dance!

Ce que j’ai pensé des deux saisons (SPOILERS)
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Juste amis ?

Saison 1 : Alternant entre humour, sexe et tragédie, la série parvient à faire voir l’ensemble du monde de la nuit gaie mancunienne. Le tout ne passant pas du tout sous silence ses difficultés, à travers le tag d’une voiture, ou la réaction d’une famille, une école plutôt homophobe, où cette question, belle et triste, suite au décès d’un personnage après une mauvaise réaction à la drogue : « Mon fils serait-il mort ainsi s’il avait été hétéro ? ». Vie et mort au pays arc-en-ciel, la naissance d’un bébé avec deux mamans et un papa, et surtout où l’on suit le cheminement de Nathan, depuis le jeune puceau au roi de la nuit (transformation qui s’achèvera dans la saison 2). On peut voir effectivement cette faune nocturne, sans qu’elle ne soit jugéz, mais dans l’art de la nuance. Des histoires complexes et pas clichées, une tranche de vie. Le final se révèle d’une très belle humanité, et on se demande alors pourquoi une saison 2…

Saison 2 : … La réponse ? Parce que deux monologues importants n’avaient pas été écrits et le seront dans le cadre de ces deux derniers épisodes. L’histoire est toujours centrée sur la relation Vince-Stuart, qui n’ont toujours pas consommé leur amour. Arrivent les neveux de Stuart, l’un menaçant de dévoiler son homosexualité, et surtout de l’accuser de pédophilie, sauf s’il le paye. Alexandre, de son côté, voit son père en train de mourir d’un cancer, alors que sa mère lui demande de signer un papier l’engageant à ne pas toucher son héritage. Bref, ça commence dans un constat glaçant. Et puis arrive ce monologue incroyable de Stuart.

Une scène finale aussi entraînante que le final de la saison 1, même si bien moins optimiste, dans un appel que lance Russell T. Davies a sortir du ghetto, à se battre contre l’oppression. Tout en offrant à Nathan les clés de Canal Street, et la beauté d’une certaine sous-culture, des rencontres et des amours gays. Un deuxième monologue, aussi offert par Stuart, qui est magistral. Un seul défaut, peut-être, si je chipote : le changement de sexe d’Alex, que l’on peut voir lors du générique de fin. Déjà, parce qu’il existe des gays très folles et très efféminés, qui sont pourtant cisgenres, et que si Alex est trans, cela aurait pu être un des arcs de la saison, tout en gardant son traitement, et sa tristesse vis-à-vis du rejet de sa famille, très pudiques.

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