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Quentin Tarantino vu par… Benoît Delépine et Agnès B. (par Marc Godin)

Quentin Tarantino vu par… Benoît Delépine et Agnès B. (par Marc Godin)

Suite (et presque fin) de la mini-série d’interviews signées Marc Godin de quelques personnalités mordues de filmo Tarantinienne. La semaine dernière, vous avez pu lire les déclarations d’amour de l’attaché de presse ciné Jean-Pierre Vincent, du comédien Denis Ménochet, de l’ex-égérie du X Ovidie, de l’artiste JonOne et du chef opérateur Renaud Chassaing. Aujourd’hui, les regards de deux autres fans, eux aussi trublions dans leurs spécialités respectives :  l’acteur réalisateur Benoît Delépine et la créatrice Agnès B qui confie à Marc Godin de précieux souvenirs de sa collaboration de longue date avec le réalisateur. Hé oui !

 

BENOIT DELEPINE : « J’aime la force de sa mise en scène mais son maniérisme peut m’énerver »

Ex-auteur prodige des Guignols, journaliste-star de Groland, Benoît Delépine est devenu, avec son complice Gustave Kervern, un des meilleurs réalisateurs du cinéma français.

« En tant que fan d’humour noir, j’ai vraiment adoré ses deux premiers films. J’aime moins ce qu’il a fait ensuite, même si j’ai apprécié Inglourious Basterds. Son travail, c’est exactement l’inverse de ce que je fais avec Gustave. Nous sommes des instinctifs, nous ne faisons référence à aucun autre film. Tarantino est toujours dans la référence, dans la citation cinéphilique au western ou au cinéma japonais. J’aime bien son habileté, la force de sa mise en scène. Je pense notamment à deux scènes de Basterds : celle du début avec Denis Ménochet qui cache des gens sous son plancher et celle dans le restaurant. Mais s’il n’y a pas de fond, une idée géniale derrière, son maniérisme peut m’énerver et me sembler très superficiel. Ce sera mon seul bémol. »

 

AGNES B. : « Parler cinéma avec Quentin est une expérience extraordinaire »

Depuis plus de trente ans, Agnès B. ré-enchante la mode. Elle a habillé les gangsters de Reservoir Dogs, sans oublier John Travolta et Uma Thurman dans Pulp Fiction. Très investie dans l’art et le cinéma, elle termine son premier long-métrage, Je m’appelle hmmm, qui sortira cette année.

« Pour Reservoir Dogs, j’ai découvert à l’écran que les gangsters du film portaient des costumes Agnès B. Une belle surprise ! Quentin avait envoyé son habilleuse chez moi, dans ma boutique de Los Angeles, car il devait estimer que mes costumes étaient parfaits pour ses Dogs. Cela s’est donc fait sans que je connaisse Tarantino, ils avaient acheté le costume anthracite T 051. C’est un costume que je refais d’ailleurs, car il y a une demande, des gens qui veulent porter le costume de Reservoir Dogs… Harvey Keitel, que je connais bien, a toujours le sien. Je continue à lui faire des vêtements sur-mesure, exclusivement pour lui. Il ne veut que des pantalons larges, en jersey, avec élastiques et poches zippées. J’habille également David Lynch depuis 25 ans. La chemise boutonnée jusqu’au col de David Lynch est donc une Agnès B., la Planète, comme ses cravates ou costumes.

Pour Pulp Fiction, nous avons créé une veste en lin noir avec col en cuir pour John Travolta. Dix ans plus tard, Travolta m’en a demandé une à l’identique car la sienne était complètement usée tellement il l’avait portée. Uma Thurman porte également une chemise blanche Agnès B., avec les manches en pointe, dans la scène culte de la danse avec Travolta. Au générique, Quentin a très gentiment mis « Wardrobe by Agnès B. », comme Lynch. Je l’ai enfin rencontré après Pulp Fiction, au Lancaster. Il voulait me voir pour me remercier d’avoir participé à ses films. C’était vers midi, nous devions prendre un café et en fait nous avons déjeuné et nous sommes restés trois heures à parler de films et de son enfance avec son beau-père.

Il est fou, simple, tellement sympa. Son attachée de presse essayait de l’arrêter : impossible. Et parler cinéma avec Quentin est une expérience extraordinaire. En 2009, je l’ai revu à Cannes lors de la présentation d’Inglourious Basterds. Il me voit passer sur la plage pour une fête et m’a assis sur ses genoux. Il parlait aux gens, avec moi sur ses genoux, me demandant si je devais rester ou me lever. C’était trop marrant… Je n’ai jamais parlé vêtements avec lui, c’est drôle, non ? Peut-être a-t-il choisi mes vêtements à cause de la culture rock et cinéma que nous avons en commun ? Ou du côté intemporel de ma mode qui fait que les films sont moins datés ? A la ville, Quentin Tarantino s’habille souvent avec des survêtements informes pour, je crois, masquer son embonpoint. Mais il a un tel visage avec son menton en galoche, son sourire, sa voix, qu’il peut porter ce qu’il veut… »

Propos recueillis par Marc Godin. 

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