
Re-Anime: Evangelion 3.33 – You can (not) redo (de Hideaki Anno)
Parce qu’il n’y a pas que les mangas dans la vie, à compter d’aujourd’hui j’inaugure une nouvelle rubrique nommée « Re-Anime » dans laquelle vous l’aurez deviné, je vais revenir sur des films qui parcourent l’histoire de l’animation japonaise. En dehors des reviews de mangas, vous pourrez donc (re)découvrir des titres de la Japanimation. Pour ouvrir les hostilités, on commence avec Evangelion 3.33.
Sorti en 2012 au Japon, le troisième et avant-dernier épisode de la tétralogie intitulée Rebuild of Evangelion, déploie une profonde noirceur et nous rappelle que le titre est la matrice du genre. Entre hard sci-fi flamboyante, film d’auteur et réflexions existentielles, le projet Rebuild of Evangelion est une entreprise d’envergure et Evangelion 3.33 met d’emblée, une grosse claque dans la gueule. Techniquement et artistiquement, on est vraiment proche du sans faute et Hideaki Anno prouve une fois de plus qu’il est un réalisateur de grande envergure.
Attention, cette review peut contenir quelques spoilers!
Les deux premiers épisodes reprenaient globalement la série d’origine ainsi que le film The End of Evangelion en se permettant quelques libertés au niveau du scénario. Avec ce troisième opus, on découvre une partie totalement inédite donnant une nouvelle dimension au titre déjà assez compliqué, pour ne pas dire alambiqué. A la fin de Evangelion 2.22, Shinji fusionnait avec l’Eva-01 et provoquait par la même occasion le Troisième Impact. Cet épisode s’ouvre après une ellipse de 14 ans, période durant laquelle les choses ont quelque peu évolué. A vrai dire, les premières minutes du film, bien qu’impressionnantes, nous semblent confuses et on arrive pas forcément à recoller tout les morceaux (trop de temps de latence entre les visionnages n’aide pas trop). De plus, le jargon technique créé pour les besoins de la série, demande toujours un petit temps de réadaptation. Mais entendons-nous bien, ce jargon fait partie intégrante de l’ADN et de la «crédibilité» de l’univers Evangelion. Une fois remit dans le bain, on se délecte de cette tragédie à la fois intimiste et grandiloquente. Anno peut enfin nous donner une version définitive et inédite de son spleen futuriste, baroque et plein de fureur. Sa vision a incontestablement de la gueule dans les scènes de fight et le détail graphique concernant tous les engins, ordinateurs et mechas est assez sidérant. C’est d’une beauté incroyable!
On retiendra notamment la première scène dans l’espace ainsi que le combat entre Eva (geek alert à son maximum). D’ailleurs, je me permets une petite parenthèse mais on ne peut que songer au pompage/hommage (rayez la mention inutile) de Mr Del Toro avec son Pacific Rim et clairement, au-delà des gros mechas, la pachyderme hollywoodien ne tient pas la comparaison, de par son manque d’enjeu et de profondeur d’un point de vue humain. Juste de gros robots qui tapent sur de gros monstres, aussi fun que cela puisse t-il être, ce n’est pas suffisant… Fin de la parenthèse. Ce troisième opus redistribue donc les cartes avec d’un côté la mystérieuse organisation NERV poursuivant son projet de Complémentarité de l’Homme et de l’autre, la WILLE qui veut y mettre un terme et détruire les Eva jugés trop dangereux. Au milieu de tout ça, Shinji, toujours aussi introverti et torturé, se débat et tente désespérément de trouver sa place et autant dire que ce qu’il apprend durant le film ne risque pas d’inverser ses tendances névrotiques. En ça, le titre a toujours été sombre et tortueux mais Hideaki Anno en remet une couche supplémentaire, oscillant entre drame intimiste et délire mystico-apocalyptique. Laissant exploser par petites touches, des moments de violence très graphique ou d’autres plus psychédéliques.
Le réalisateur a une maîtrise absolue de son œuvre et nous balance un troisième opus, qui, il faut le dire, n’est pas abordable par le premier venu et même en ayant vu et lu tout ce qui concerne Evangelion, certaines voies de la série restent impénétrables. Ultra cryptique dans son scénario, la nébuleuse Evangelion en a déjà laissé plus d’un sur le carreau et le Rebuild confirme clairement la tendance. A ce stade, il est bien impossible d’anticiper ce que sera la fin et si même elle tiendra la promesse de réconcilier certains fans déçus par la fin du titre d’origine. Quoiqu’il en soit Rebuild of Evangelion est une tétralogie exigeante, sans compromis et jusqu’au-boutiste, de la science-fiction ambitieuse qui promet un final à la radicalité assumée. Une vraie bouffée d’air au milieu de tant de films animés ou non, qui en voulant plaire au plus grand nombre, finissent par en oublier leurs âmes. A suivre…
Evangelion 3.33 – You can (not) redo de Hideaki Anno (2012) – Studio Khara