Re-Anime: La Tour au-delà des Nuages (de Makoto Shinkai)

Re-Anime: La Tour au-delà des Nuages (de Makoto Shinkai)

Note de l'auteur

la-tour-au-dela-des-nuages-19091Un triangle presque amoureux, une tour mystérieuse qui captive tout les regards, des avions et la guerre qui gronde, le Re-Anime du jour a de l’ambition. Pour son premier film, Makoto Shinkai (5 cm par Seconde, The Garden of Words) lorgne du côté de Ghibli mais a les yeux plus gros que le ventre et il ne parvient pas à aller au bout des pistes qu’il lance. Reste un film intéressant, beau et rempli d’idées. On passe tout ça en revue!

 

1974, une division de l’archipel japonnais, s’opère. L’île d’Hokkaido est occupée par l’Union, tandis que le reste du Japon est sous contrôle des américains. Une immense et mystérieuse tour est alors construite sur l’île et devient un véritable objet de fascination si ce n’est de fantasmes. Hiroki et Takuya sont amis d’enfance et désire ardemment atteindre cet endroit inaccessible. Pour y parvenir, ils construisent un avion. Sayuri, amoureuse de Hiroki, en profite pour se rapprocher des deux garçons et fait le vœu de partir avec eux. La première demi-heure esquisse les personnages et leurs relations et déjà, un premier regret: les protagonistes manquent d’épaisseur. De plus, la dynamique du trio est presque inexistante. Par exemple, le principe du triangle amoureux est archi vu mais quand c’est bien fait, ça fonctionne. Or, là on se retrouve juste avec deux potes et une fille amoureuse de l’un d’entre eux. Les enjeux entre les protagonistes sont un peu maigres et c’est assez dommage.

 

la-tour-au-dela-des-nuages-kumo-no-mukou-yakusoku-no-basho-the-place-prom-4-gDeuxième piste sous-exploitée et du coup, quelque peu artificielle: la fameuse tour. Omniprésente, elle est de tout les plans comme une promesse, comme une menace. Sa représentation toujours lointaine telle un trait vertical qui sépare le ciel en deux et va tutoyer les étoiles, renforce ce sentiment de fascination. Le réalisateur la rend inaccessible à tous et met le spectateur à la hauteur des personnages. Cet édifice révèle alors peu à peu ses secrets à base de manipulations quantiques, permettant de créer des passages vers des univers parallèles. Même si l’idée selon laquelle notre univers rêve et que ses songes sont autant de mondes parallèles n’est pas dépourvue de poésie, le délire quantique est assez incompréhensible notamment en raison d’une construction et d’un découpage un peu bordéliques. Le lien entre la disparition et la catalepsie (sorte de comas) de Sayuri et la tour, surgit de nulle part et enfin, le concept de mondes parallèles n’est absolument pas exploité. On reste complètement sur notre faim avec un final vite expédié et la fascination devient frustration.

 

Dernier point qui aurait mérité d’être plus développé: la scission du Japon. Qui se cache derrière l’Union? Quels les tenants et les aboutissants de la guerre? Les questions demeurent sans réponses. Finalement, Makoto Shinkai ne parvient à aller au bout d’aucune de ses idées et accouche d’un film ambitieux mais déséquilibré et sans réel point de chute. Oui, il reste l’histoire d’amour, oui, les personnages finissent par être attachants mais on ne peut s’empêcher de penser que le film manque de finesse et de finitions en terme d’intrigues, de personnages et de background. Niveau dessins et animation, c’est beau et fluide mais on reste dans le standard. Les décors qu’ils soient urbains ou plus champêtres sortent toutefois du lot et nous en balancent plein la vue à travers une palette de couleurs incroyable même si Shinkai multiplie un peu trop les effets de lumières et utilise le lens flare jusqu’à l’overdose. On retient également la dernière scène qui se passe dans les airs et qui brille par ces qualités techniques et esthétiques. La Tour au-delà des Nuages est un premier film bancal, pas totalement abouti mais généreux et plein de promesses. Et aujourd’hui, quand on regarde 5 cm par Seconde (Re-Anime ici) et The Garden of Words (Mini Movie Review ), on se dit qu’on ne s’était pas trompé de croire en Makoto Shinkai.

 

 

 

La Tour au-delà des Nuages de Makoto Shinkai (2004) – CoMix Wave Inc.

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