
Re-Anime : Saint Young Men (de Noriko Takao)
Aujourd’hui, je vous propose que nous nous élevions ensemble, en quête de plénitude. Non, je vous arrête tout de suite, je ne suis sous l’emprise d’aucune substance, rassurez-vous. C’est juste que la spiritualité transpire dans beaucoup d’œuvres japonaises, que ce soit en manga ou en anime, mais elle a rarement été abordée de la sorte. Saint Young Men renommé en français, Les Vacances de Jésus et Bouddha, ou comment rire avec les religions et leurs idoles. En ces temps troublés, où le nom de dieu est brandit comme une arme de guerre par certains tarés, l’humour, la poésie et la légèreté de Saint Young Men a franchement de quoi vous menez au paradis… ou au Nirvana… Bref, là où vous vous sentez bien, quoi !
À l’origine, comme toujours, Saint Young Men est un manga de Hikaru Nakamura commencé en 2006 et publié chez nous par l’éditeur Kurokawa. C’est en 2013 que le titre se voit adapté sur grand écran par le studio A-1 Pictures (Fairy Tail, Blue Exorcist) avec à la réalisation, l’inconnu Noriko Takao. Comme son titre français l’indique, le titre repose sur une idée simple mais assez géniale. Après des millénaires de bons et loyaux services, Jésus et Bouddha, copains comme cochons, décident de prendre des vacances sur notre bonne vieille Terre, plus précisément au Japon. Venus incognitos, ils se fondent dans la masse des mortels et jouent les touristes en goguette. La rencontre avec le monde terrestre donne lieu à des situations parfaitement absurdes mais pas dénuées de profondeur, ni même de poésie. Nakamura laisse de côté la satyre, la caricature, la critique ou le jugement, jouant plutôt sur un comique de situation avec un humour fin et parfaitement décalé qui fait mouche à de nombreuses reprises. Que ce soit Jésus que deux ados prennent pour Johnny Depp ou Bouddha en joueur de Nintendo DS et adepte des soldes, le film regorge d’idées improbables.
Voir ces deux potes en vadrouille à la découverte du Japon et de ses traditions, tenter de se fondre au mieux dans la population, alors qu’ils produisent des miracles à la chaîne, donne lieu à quelques scènes assez désopilantes. À titre d’exemple, tentez d’imaginer Jésus, ouvrant la « mer » en deux dans une piscine municipale, suite au stress de devoir plonger la tête sous l’eau… Ou Bouddha se la jouer Neo dans Matrix ! Avouez, c’est drôle ! Saint Young Men séduit aussi bien par le fond que par la forme. En passant par la case animation, le studio et le réalisateur ont tenu à conserver le trait du manga. Le rendu dans un style crayonné reproduit à merveille son identité graphique. Si l’animation dans son ensemble n’est pas incroyable, elle nous réserve cependant quelques scènes esthétiquement et techniquement bluffantes. En termes de chara-design, une attention toute particulière est apportée à la panoplie d’expressions débiles et hilarantes des deux divinités qui accumulent les gaffes. Dans une certaine forme de respect toute japonaise, Saint Young Men épingle de manière décalée les religions. Entre loufoqueries et réflexion, loin de l’horreur et de l’indignation que peuvent provoquer certains dessins, voici un film, qui loin d’être blasphématoire, rapproche les dieux et les hommes dans un grand éclat de rire. Amen.
Saint Young Men de Noriko Takao (2013) – Studio A-1 Pictures