
Récap : Serendipity (The Handmaid’s Tale 2.06 / Hulu /OCS)
Alors que cette saison 2 s’approche de la mi-chemin, la série est plus que jamais un symbole de protestation. Les associations fustigent les dernières prises de position sur l’avortement de Donald Trump en évoquant directement The Handmaid’s Tale et la tenue des servantes a servi ces jours-ci à soutenir la même cause en Irlande alors qu’un référendum a eu lieu sur la question vendredi. Ce sixième volet, justement, ne devrait pas diminuer la valeur symbolique de la tunique rouge, loin de là. Récapitulatif.
Attention : le texte qui suit est un commentaire détaillé ; il s’adresse à un.e lect.eur.rice ayant vu ledit épisode !
Nous avions laissé June (Elisabeth Moss) sur un lit d’hôpital certes mais ragaillardie par la combativité de son bébé (voir récap’ précédent). Le docteur va confirmer la bonne nouvelle, arrachant un « Praised be » libérateur à Serena (Yvonne Strahovski). Une Serena tellement soulagée qu’elle va faire un geste vers sa servante et lui accorder le droit d’observer l’écran de l’échographie.
De retour chez les Waterford, June se permet alors de refuser le smoothie « à la sauce Lydia » et Serena boit ses paroles comme du petit lait, lui proposant — presque affectueusement — une soupe à la place ! On croit rêver…
She needs plenty of rest. Just take things slowly.
Nous ne sommes pas au bout de nos surprises. Le soir, June a le droit de s’installer sur le canapé du salon (pour lui éviter de monter les escaliers) et Serena s’installe auprès d’elle pour la surveiller. June n’en revient pas et propose même à l’épouse de toucher son ventre après que cette dernière se soit enquise des sensations de la grossesse.
Le lendemain, Serena tient bon le cap et s’est permise d’inviter quatre servantes pour un déjeuner surprise : Ofrobert (Nina Kiri), Oferic (Bahia Watson), Ofglen deuxième du nom (Tattiawna Jones) et Ofsamuel (Jenessa Grant) sont ravis de pouvoir, à leur tour, toucher le ventre de June.
On commencerait presque à penser que ces deux-là vont vraiment s’entendre, mais alors que Serena montre à June la chambre du futur bébé, la conversation dérive vers Hannah et June demande la permission de voir sa fille. Serena refuse sèchement et la congédie vers sa chambre.
Pendant ce temps-là, tante Lydia (Ann Dowd) titille précisément le commandant (Joseph Fiennes) sur les caractères bien trempés de sa femme et de sa servante. Ce dernier, qui prépare l’ouverture du nouveau centre Rachel & Léah, se voit conseiller par la tante d’arbitrer le match entre ses deux femmes, de prendre ses « responsabilités d’homme ». Une requête que fera précisément Serena auprès de son homme dans une série de séquences flashback distillées dans l’épisode. On y voit une Serena faisant la promotion de son livre sous les huées d’un auditoire d’université.
You’re spoilt! You’re privileged and you’re living in an academic bubble.
On devine qu’elle défend une position très religieuse de la place de la femme (son livre s’intitule « A Woman’s Place ») en expliquant que la chute du taux de natalité l’impose. C’est peu de dire que son message est fraîchement accueilli. Elle est même prise pour cible par un sniper au sortir du bâtiment. Une assistante semble succomber et Serena est blessée au bas ventre. Loin de s’apitoyer, Serena tance son mari, décidément le maillon faible, qui ne trouve rien de mieux que d’assassiner lâchement la femme du tireur.
Mais le commandant a peut-être d’autre dons… ou pas, à commencer par la diplomatie. Il vient donc tenter d’apaiser Serena et June, à sa manière… Il va trouver la première dans son jardin d’hiver et la caresse dans le sens de l’épine. Puis il essaie d’apaiser l’esprit de la servante en lui donnant une photo d’Hannah. Le geste est élégant mais le commandant attend une rétribution immédiate en retour et commence à palper les seins de la femme enceinte. Il faut une June déterminée, prétextant sa grossesse, pour empêcher rien moins qu’un viol supplémentaire.
What if Nick’s a gender traitor?
L’autre mari de la maison (Max Minghella) est beaucoup moins enchanté à l’idée de baisser son pantalon. Eden (Sydney Sweeney) s’en inquiète d’ailleurs auprès de June. Cette dernière la rassure mais s’assure surtout auprès du chauffeur qu’il fera ce qu’il faut pour ne pas être éloigné des Waterford, qu’importe si cela doit passer par le dépucelage — à travers un drap opportunément troué — d’une adolescente.
Malgré « son devoir » rempli, Nick cherche à fuir. Il intercepte Pryce (Robert Curtis Brown) lors de l’inauguration du nouveau centre et demande à être déplacé vers une autre affectation, en impliquant le commandant Waterford.
À cet instant-là, la demande de Nick soulève plusieurs interrogations ? Que peut-il révéler sur Fred ? Pourquoi cherche-t-il à s’éloigner maintenant ? Pryce est-il sincère lorsqu’il promet qu’il protégera June ?
Mais ces questions sont ensuite éparpillées par une détonation spectaculaire. Alors que les commandants du régime sont rassemblés et entourés par un cordon de servantes, Ofglen, deuxième du nom, quitte le rang et vient se faire exploser au milieu de l’assemblée, en ayant pris toutefois le temps de montrer à ses camarades ce qu’elle s’apprêtait à faire.
There’s a lot I haven’t told you about him.
Le titre de l’épisode (First Blood) annonçait donc bien des débuts ensanglantés. Si l’on écarte la coupure de Serena avec une rose ou la perte de virginité d’Eden, le sang qui coule annonce des lendemains forcément conflictuels dans la série. On devine que l’attentat contre Serena à l’université à certainement déclenché d’autres événements. Le suicide d’Ofglen aura lui aussi d’importantes conséquences, et cela sans parler de l’identité des victimes.
Ce coup de théâtre tumultueux laisse toutefois l’impression d’une construction artificielle. The Handmaid’s Tale se complaît et excelle même dans le domaine de l’association narrative entre arcs parallèles. Mais la juxtaposition de l’opposition entre June et Serena d’une part et l’attentat au Centre d’autre part est plutôt grossière. En prenant du recul, on imagine même assez nettement l’embarras des auteurs alors qu’ils devaient décider du positionnement de cette scène forcément cruciale pour la suite. Peut être était-ce le choix le plus adapté mais il dénature significativement l’ensemble d’un épisode pour le reste très convaincant.
À ce titre, la performance d’Yvonne Strahovski est remarquable. On ne cesse de louer les variations du jeu d’Elisabeth Moss, mais l’émotion affichée par l’actrice australienne au travers d’une personnalité froide et intimidante force le respect. La séquence qui la voit affirmer un refus à June au sujet d’Hannah et qu’elle prolonge ensuite par des spasmes du visage est bouleversante. On savait tout le talent de Moss. On ne peut désormais plus ignorer celui de Strahovski.
Alors, quel commandant a la peau dure ?
Musique :
- Peace par Norah Jones, lorsque Serena invite quelques servantes pour un déjeuner surprise en l’honneur d’Offred.
- Oh Bondage! Up yours! par X-Ray Spex. Un titre tout à fait opportun pour ce final explosif. À noter que les X-Ray Spex ont eu une courte carrière au sein de la scène punk anglaise à la fin des années 70 mais très remarquée du fait de leur incorporation du saxophone ainsi que par le talent de leur chanteuse remarquable (Poly Styrene).
Remarques :
- Le centre Rachel & Leah correspond au lieu de formation des servantes. Il est aussi appelé officieusement le “Red Center” (la couleur rouge mais aussi en référence à sa vocation de « rééducation »). Rachel et Léah sont issus de la bible et leur histoire inspire les « cerveaux » de Gilead quant à la fonction des servantes.
- Boylston Street est l’artère principale qui traverse Boston d’Est en Ouest.
- Le passage durant lequel Serena vient promouvoir son livre devant l’auditoire d’une université est peut-être inspiré d’une situation réelle très similaire durant laquelle Ann Coulter (Fervente supportrice de Trump) avait été chaudement accueillie à Berkeley.
- Vous pressentez aussi que Serena a sûrement perdu avec cette blessure par balle la possibilité d’avoir des enfants.
Liens :
- Pour The Hollywood Reporter, Elisabeth Moss (Offred / June) explique notamment qu’elle a le dernier mot pour toute scène de nudité.
THE HANDMAID’S TALE (HULU) saison 2 en 13 épisodes,
Diffusée en US+24 et VM sur OCS depuis le 26 avril.
Épisodes 2.06 (First Blood).
Série créée par Bruce Miller.
D’après le roman de Margaret Atwood.
Épisode écrit par Eric Tuchman.
Épisode réalisé par Mike Barker.
Avec Elisabeth Moss, Ann Dowd, Yvonne Strahovski, Joseph Fiennes, Amanda Brugel, Robert Curtis Brown, Tattiawna Jones, Nina Kiri, Jenessa Grant, Bahia Watson, Stephen Kunken, Greg Bryk, Max Minghella, Kristian Bruun et Sydney Sweeney.
Musique originale d’Adam Taylor.
Visuels : The Handmaid’s Tale © MGM / Hulu