
La représentation du handicap dans les séries
Cette semaine, le Daily Mars vous propose de vous pencher sur la question de la représentation des minorités dans les séries télés. Nous avons évoqué la question de la couleur de peau ce lundi, aujourd’hui, nous allons traiter du handicap.
Spoiler alert : Dark Angel, The Mentalist, The L Word, Glee
Deuxième sujet pour notre dossier sur les minorités, la représentation du handicap dans les séries télévisées. Si France 2 propose une visibilité sur le mode de la blague avec Vestiaires et un casting majoritairement composé de personnes handicapées, différentes, présentant leur corps avec naturel, le handicap est aussi présenté dans différentes séries composées de valides. Voilà une petite analyse des personnages qui nous ont marqués.
La cécité et le plot-twist : Dark Angel et The Mentalist
La cécité permet d’introduire des personnages différents mais aussi de les faire participer à une histoire plus grande qu’eux.
Ainsi dans The Mentalist, Patrick Jane est enfin sur la piste du tueur John le Rouge. Il retrouve une de ses ex, Rosalind Harker. Le spectateur se dit qu’enfin, il a une piste tangible, enfin, nous allons savoir quel est le visage du tueur. Sauf que la-dite petite amie est en fait aveugle. Et ne croit absolument pas Patrick Jane, ne voyant pas l’homme tel qu’il le décrit, présentant quelqu’un de « gentil », de chaleureux. Mais dans une ironie cynique et ultime, Patrick voit au-dessus du lit de la jeune femme, le smiley rouge et grimaçant, la signature de John le Rouge.
Si la cécité est alors moquée par John le Rouge dans The Mentalist, elle est mise en avant dans la saison 2 de Dark Angel a travers une histoire d’amour trans-humaine. En effet, dans cette série nous rencontrons Joshua, un être issu des manipulations génétiques de manticore, mi-homme, mi-chien. D’apparence effrayant, il est pourtant doux, simple et très doué pour la peinture. Il rencontre alors Annie, une femme aveugle avec qui il se lie d’affection. Elle sera choquée quand elle apprendra sa vraie nature mais lui pardonnera. Elle est tombée amoureuse avant de connaître son visage.
La cécité dans ces deux cas n’est pas désignée comme un handicap, dans le sens où les femmes qui en souffrent ne sont pas montrées dans leur vie de tous les jours. Mais dans le premier cas, on ne peut s’empêcher de se demander si John le Rouge est sorti avec Rosalind parce qu’elle était aveugle, et pour se moquer de Patrick. Ce qui fait de Rosalind une double victime : de son handicap et d’un tueur en série. Là où Anna est présentée comme un être noble qui « voit » au-delà de l’apparence.
La surdité dans the L Word
Ah! Jodi et Bette! Un couple passionnel, entreprenant ; une relation violente, qui finit mal. Et tout un apprentissage sur la langue des signes, le handicap, la conversation. Le fait de voir un personnage lesbien, sourd, sexuellement actif, qui est aussi une artiste reconnue… Qui a une ex sourde et sort avec une entendante (Bette). Montrer que les sourds peuvent aussi s’exprimer par des sons, parler, voir Bette apprendre à communiquer avec Jodi, apprendre la langue des signes, apprécier les talents d’actrice de Marlee Matlin (sourde elle-même, oscar de la meilleure actrice pour Les enfants du silence). Une histoire qui met en avant la communauté sourde, montrant comment on peut vivre au quotidien, même quand on est un sculpteur célèbre comme Jodi.
La série présente aussi un interprète en langage des signes, Tom, qui fait le lien entre Jodi et son public, qu’il s’agisse de ses cours (Jodi est aussi professeur) ou de conférence, ou même dans des têtes à têtes avec Bette. Et c’est aussi une série rare qui présente un personnage sourd dans une série d’entendants en tant que membre régulier du casting pendant deux saisons. Grâce à cela, Marlee a pu jouer un personnage riche et construit, communiquant avec des entendants et des sourds, indépendante et complexe, une vraie personne en somme.
Pour aller plus loin (en anglais)
Le cas Glee
Glee, c’est un peu la feel good série. Celle où on présente sans les jugés tout un tas de handicaps et leurs conséquences dans la vie quotidienne. Deux personnages sont ainsi traités : Artie et Becky.
Artie est un membre du glee club, en fauteuil roulant. Moqué pour son handicap, il est aussi un membre régulier de l’équipe et vivra deux histoires d’amour : avec Tina et avec Brittany. Ce n’est pas non plus un être parfait, il est profondément misogyne dans la première saison, accusant Tina de ne pas s’habiller de façon assez féminine.
Les problèmes d’Artie sont présentés de façon claire et nette : dans la saison 1 ainsi, il ne peut pas participer à un concours car l’école n’a pas de bus adapté. Dans la saison 4, Artie se blesse en glissant sur une rampe gelée et souhaite ne jamais avoir à être dans une chaise roulante. Les frustrations liées à sa situation sont donc mis en avant, sans pour autant l’empêcher de vivre une vie normale avec.
Autre personnage très attachant mais plus absent qu’Artie, il s’agit de Becky, une jeune femme atteinte du syndrome de Down (trisomie 21). Si certes, on ne connaît rien de la vie de Becky, c’est à travers les liens qu’elle tisse avec son enseignante Sue Sylvester qu’on apprend à mieux la connaître. Une situation d’autant plus touchante qu’en miroir nous avons la relation de Sue avec sa sœur, atteinte de la même maladie. Ainsi, proposant une place de cheerleader à Becky, Sue est accusée de vouloir la ridiculiser. En fait, cette dernière s’explique : elle veut que Becky ne soit pas trop protégée et apprenne à vivre seule. Une façon de posée la question et la place des personnes aidant dans ces cas très particuliers. La situation est abordée avec pudeur et sans côté larmoyant. C’est la mort de la soeur de Sue qui sera triste, mais pas sa vie.
Le syndrome de Down est alors abordé par le biais d’un personnage que l’on croit cruel et méchant, Sue Sylvester qui se révèle d’une grande tendresse. Si les difficultés de vivre avec un tel syndrome sont peu abordées, elles le sont quand même et c’est encore plus rare de voir un personnage atteint de ce syndrome, adolescent, dans un lycée. Et elle donne un message positif, osant s’inscrire à l’université poussée par Artie, dans un programme spécial. Becky est interprétée par Lauren Porter, atteinte du syndrome de Down, très investie dans la lutte contre le harcèlement à l’école.
Il y aurait encore beaucoup à dire sur Glee, sur la place des personnes de couleur et minorités sexuelles, gays et bi, qui sont présentées de façon crédible et touchante dans le show. C’est une série qui a voulu être représentative de plusieurs façons de vivre son adolescence.
(Si vous avez d’autres exemples, d’autres séries n’hésitez pas à nous en parler dans les commentaires !)
j’ai beaucoup d’admiration pour le traitement accordé au personnage (et à l’acteur) de Brick dans The Middle. L’acteur a la la maladie des os de verres, ca se voit à son physique atypique, mais à aucun moment dans la série ce n’est évoqué pour son personnage qui est » normal » physiquement. Il y a de subtils montages dès que le personnage se prend des coups ou doit porter un poids etc.
mais je reconnais que je suis un peu hors sujet car pour le coup ce n’est pas une représentation d’un handicap dans une série.
C’est une maladie génétique,et c’est un handicap au quotidien, donc si, si, c’est dans le sujet, merci!
L’ayant revu récemment, je donnerais en exemple supplémentaire le cas du Docteur Amanda Perry dans Stargate Universe, une brillante scientifique tétraplégique. Via une technologie extra-terrestre, elle échange son corps plusieurs fois dans la série avec une autre personne. Ce qui rend la chose intéressante, c’est que nous avons du coup deux visions : celle d’une personne sans handicap qui se retrouve en quelques secondes tétraplégique et celle d’une tétraplégique qui découvre les joies de choses que tout le monde considère comme banales comme marcher ou manger des aliments solides.
Le fils dans Breaking Bad. Bel exemple de jeune homme handicapé qui est parfaitement intégré à l’histoire. Son handicap n’est jamais une excuse ou pirouette scénaristique. On présente son quotidien sans jamais forcer le trais.
et il est en plus joué, comme dans le cas de Jodi, par un acteur atteint d’une maladie similaire (mais plus faible) que le role joué. Je ne dis pas que pour jouer un handicapé, il faut être handicapé, mais par contre, cela donne des roles et des idées de carrière à ceux qui sont atteints par ce handicap 🙂
Tu cites Vestiaire, mais il y a d’autres séries françaises qui abordent plus ou moins bien le handicap – surtout moteur. Je pense notamment à Caïn qui met en scène un héros qui a perdu l’usage de ses jambes et qui, derrière les sarcasmes semble énormément en souffrir. Le regard des autres y est important. Le personnage est d’ailleurs similaire à Greg House.
Je suis moins sûr de mon coup mais dans R.I.S, la fille d’un des personnages principaux est-elle aussi handicapée moteur. Apparemment aussi à la suite d’un accident – mais j’avoue, j’ai cherché sur Internet. C’est assez bizarre, d’ailleurs. Comme si dans les séries, le handicap moteur ne pouvait pas être dû à un problème de naissance. C’est peut-être pour ça que tu n’en parles pas ?
Disons que je voulais faire un petit panorama de personnages handicapés moteurs apparaissant dans des séries, sans que cela soit forcément le moteur de la série, ou le personnage central (parce que sinon, effectivement Dr House…).
Après, je l’avoue, je ne me suis pas intéressée à la raison de l’handicap et plutôt au traitement d’un personnage handicapé dans une série (la différence du traitement de la cécité entre Dark Angel et The Mentalist, et comment un personnage sourd entre dans une série d’entendants).
Ainsi, Artie est devenu handicapé suite à un accident, tandis que Becky est née malade. Effectivement, c’est intéressant de voir que comment ces pathologies sont traitées (naissance, maladie, accident ?) . Après, comme le montre Julien H, dans The Middle, la maladie des os de verre est liée à une maladie génétique et c’est pareil dans Breaking Bad pour Walter White Jr.
Merci pour tes exemples!
Je pense à Augustus Hill dans Oz (Harold Perrineau Jr.)
J’ai très envie de citer The West Wing et le personnage de Joey Lucas (et donc à nouveau Marlee Matlin). Sans être présentée comme une wonder woman accomplie qui irait jusqu’à nier sa surdité, sa réussite à la fois en tant que sourde dans un monde d’entendants mais également en tant que femme dans un monde d’homme, rendent son personnage riche, intelligent et d’une justesse impeccable.
Marlee Matlin, excellente actrice, la femme de ma vie…
Personnellement je citerais la série « switch at birth » étant donné la grande présence de la surdité dans cette série. De plus, avec la situation, on voit aussi l’apprentissage des parents à communiquer avec leur fille sourde.
J’ai oublié aussi qu’on y voit un couple apprendre à élever leur enfant atteint du syndrôme de down, je pense donc que c’est un bel exemple de série « présentant » le handicap.