
Rétro sur le studio Clamp : les Moires du Manga… (Part 1/2)
Elles règnent en maître sur le shôjo (manga pour vous mesdemoiselles) depuis 20 ans et leurs titres sont des références absolues. Entre mysticisme, cartomancie et déterminisme, Clamp c’est quoi?
Tôkyô Babylon, X-1999, Rg Veda, Clover, Code Geass, derrière ces titres désormais cultes, se cache le collectif Clamp. Quatre jeunes femmes scénaristes et dessinatrices (7 au départ) qui ont fait du nom de leur studio une institution, voir une marque. Nanase Ôkawa, leader du groupe, s’occupe principalement des scénario, Mokona est la dessinatrice principale, Tsubaki Nekoi est la seconde dessinatrice spécialisée dans les SD (Super Deformed: personnages un peu ridicules avec un tout petit corps et une grosse tête) et Satsuki Igarashi s’occupe des trames et du design des livres reliés.
Au début des années 90, elles font une entrée remarquée dans l’univers (très masculin) du manga avec deux séries et très vite, elles imposent leur style et leur patte graphique. Dans Tôkyô Babylon, Subaru Sumeragi, jeune exorciste travaillant à Tokyo, est confronté à la violence quotidienne et aux plus bas instincts de l’Homme: suicide, meurtre, viol ou sectes… Alors oui, dit comme ça c’est pas très engageant, mais heureusement Clamp ne tombe jamais dans le sordide et par ailleurs, le titre possède quelques ressorts comiques. Le manga esquisse également une relation ambiguë entre Subaru et un autre homme, sans que rien ne soit explicitement dit ou montré. Une prise de risque de la part des auteures à l ‘époque, car même si le yaoi (genre traitant de l’homosexualité entre hommes) est très prisé par la gente féminine, le sujet reste assez tabou au Japon. Peut-être pas la plus intéressante série de leur catalogue, Tôkyô Babylon n’en demeure pas moins la pierre fondatrice de l’édifice Clamp.
Plus flamboyant, plus ambitieux, Rg Veda (prononcer Rigue Véda), dont le nom est tiré d’un ancien texte hindou, puise ses sources dans la mythologie orientale. Le pouvoir dans le royaume de cieux a été renversé et une prophétie annonce la venue au monde d’un enfant qui mènera la rébellion contre le dictateur. On sort les violons, les trompettes et tout l’orchestre car voilà une œuvre épique et violente.
Comme le veut le genre du shôjo, la psychologie et les états d’âme des personnages sont plus fouillés et mis en avant. Entre trahison, prophétie et vengeance, le manga s’apparente à une véritable tragédie grecque et reste aujourd’hui encore une référence. Le dessin, d’une grande finesse, installe définitivement le style Clamp, assurément l’un de leurs meilleurs titres. Je vous conseille vivement l’édition spéciale 20ème anniversaire, en 7 tomes chez Tonkam, qui est tout simplement sublime.
Avec ces 2 collections, Clamp trace les grandes lignes de son œuvre, entre destinée, mysticisme, cartomancie, exorcisme et religions shintoïste et hindouiste. Leurs personnages se baladent sur plusieurs plans astraux, tandis que d’autres voient l’avenir et voyagent dans les rêves. La tournure tragique des événements les force à faire des choix cornéliens, à lutter contre le destin. Le destin… Un concept omniprésent dans le travail du studio, qui n’a de cesse de s’interroger sur le déterminisme.
En 92, la série X-1999 (18 tomes sur les 21 prévus, chez Pika) réunit et cristallise tous ces éléments. Voulu comme une relecture de l’Apocalypse selon Saint Jean, X-1999 est une œuvre sombre et violente. Kamui, de retour au Japon après le décès de sa mère, se retrouve malgré lui, engagé dans une guerre entre les 7 Anges, voulant exterminer l’Humanité corrompue et les 7 Sceaux souhaitant la sauver. Son choix déterminera le sort du monde. Pas moins ! Le manga, avec sa catch-phrase plus qu’évocatrice: «Their destiny was foreordained» (Leur Destin était tracé), explore la psyché des personnages et nous questionne sur les concepts de déterminisme et de libre-arbitre, sur fond de guerre biblique. Le dessin s’affirme un peu plus, les visages anguleux deviennent une marque de fabrique et Mokona (dessinatrice principale) s’inspire du travail de H. R. Giger, graphiste et illustrateur de la saga Alien, pour certaines de ses planches.
Le studio Clamp utilise ici un principe dont il raffole: le cross-over (procédé qui consiste à mélanger 2 univers et réunir des personnages de différents titres). X-1999 demeure la clé de voûte des œuvres du studio, même si les derniers tomes n’ont jamais vu le jour. Par la suite, Clamp n’aura de cesse de mixer leurs différentes séries et des créer des passerelles entres les récits. Mais si vous le voulez bien, on se met ça de côté et on reviendra là-dessus plus tard…
Merci pour ce petit instant « nostalgie ».
En effet, les CLAMP riment avec le lycée où je découvris émerveillée l’univers du manga et les CLAMP furent les premières à attiser ma curiosité surtout « X » qui fut une révélation où amour, amitié, destinée étaient intimement liés. Je ne parlerai pas de « RG Veda » dont la mythologie a eu raison de mon engouement pour les mythes grecs (Saint Seiya).
En somme, les titres publiés à cette époque m’ont pris de développer mon intérêt pour la psychologie de personnages de papier.
Il me tarde de lire la suite !
De rien!
La seconde partie, ce sera pour jeudi prochain.
Et une chronique sur Saint Seiya est en prépa… 😉
Petit moment sympathique (il faudra vraiment que je me penche sur RG Veda)… Sait-on si un jour peut-être X aura enfin une suite?
A priori, non! Mais on peut toujours rêver… 😉