• Home »
  • SÉRIES »
  • Mycroft a-t-il une âme ? (critique de Sherlock, The abominable bride)
Mycroft a-t-il une âme ? (critique de Sherlock, The abominable bride)

Mycroft a-t-il une âme ? (critique de Sherlock, The abominable bride)

Note de l'auteur

Bon, on avoue ce dernier épisode de Sherlock, ça sentait plus le « Coucou, on existe encore et on est cool » qu’un épisode à faire avancer l’intrigue. Mais, on ne peut dénier que quand c’est fait avec intelligence, c’est plutôt sympa. SPOILERS.

Bride_3539441bPremière surprise : le petit rappel de toutes les aventures de notre héros. Pas forcément nécessaire pour le fan acharné, mais bienvenue quand on sait le temps qui sépare chaque saison, la série ayant commencé il y a plus de cinq ans. Et donc, ce rappel prouve que l’épisode, bien que se passant majoritairement en habits du siècle dernier, se situe dans la lignée des épisodes précédents. Et cette lignée se joue avec intérêt quand un vieux fait divers du passé permet de comprendre le présent.

tumblr_o0awrx68Jk1rtem1xo3_1280Bien entendu, ce jeu est d’autant plus agréable quand on retrouve certaines lignes de dialogue dans les deux contextes. Mme Hudson râle toujours de son rôle, mais Lestrade s’est laissé pousser des favoris et Mary est demandée à participer à la cuisine. Chose, bien entendu, un brin absurde. Si le cynisme est poussé fortement, notamment sur la condition des femmes, véritables pivots de l’épisode, certains y voient notamment plus clairs. Et c’est Mycroft, obèse et bouffi, qui dirige et voit tout cela. Lui qui emploie les services délaissés de Mary. Lui qui sait que Sherlock mène un combat que tous doivent perdre. Molly Hooper elle-même en fait partie, travestie pour pouvoir exercer son métier.

tumblr_o0bdafnovc1tuf6e9o3_1280Car oui, la meurtrière a tué pour bien plus important. Pour le droit des femmes à être l’égal des hommes. Certes, les situations sont grotesques, exagérées pour plus de sexisme, même un peu trop parfois. Mais si Mycroft doit mourir, c’est aussi le cas de cette injustice. Mais est-elle vraiment morte de nos jours ? À son réveil, Sherlock est face à son frère. Aminci et inquiet. Puis dans un rêve emboîté, on voit John tenter d’imposer un retour à Mary avant une rapide remise en place (au cas où on aurait oublié qui est sa femme). Ce combat est-il pour autant terminé ? Ou encore en cours ? Point de réponse pour le moment. Il ne reste qu’au spectateur à y réfléchir, alors que dans un avion conversent trois hommes et une femme enceinte d’une petite fille. Il aurait été intéressant de voir un écho, malgré tout, de cette réflexion dans le présent.

sherlock-specialfinal885435Et dans une dernière prise de conscience, c’est Mycroft qui nous étonne. Entre le dernier épisode, où il avoue que le perdre « lui briserait le coeur » (sic), et le tout premier où il l’espionne et se bat avec lui, tout un nouveau monde se dessine. Une cigarette partagée entre eux et les voilà unis. Mycroft a toujours eu peur pour son petit frère, a toujours voulu le protéger, mais toujours dans son dos. Le voilà qui s’inscrit en plein, dans sa demande d’une liste, pour savoir quelles drogues Sherlock a ingérées. Le voilà à montrer son soutien, son amour en quelques sortes, pour en être rejeté, avance de demander à John de garder un œil sur lui.

Oui, Mycroft après avoir failli perdre son frère, a retrouvé son âme. S’il est vu sous la forme d’un monstre obèse dans le rêve, n’est-ce pas aussi parce que Sherlock sait que même en restant assis, son frère peut être perdu, à force de grappiller le pouvoir et les secrets ? Plus il en connaît, plus il risque sa vie. La connaissance comme une nourriture sans fin. Si c’est fait avec humour et pas mal de méchanceté, d’un dur mépris de la part du détective, la vérité devient brutale quand il ouvre ses yeux et que le spectateur voit Mycroft tel qu’il est : quelqu’un qui tient, maladroitement, au seul être de sa famille capable de le comprendre. Et donc un peu étrange, pour nous qui ne l’avions connu qu’à pas feutrés, en fond d’intrigue (et cela est peut-être même beaucoup trop rapide, un peu trop différent du Mycroft auquel nous étions habitués). Dans un flash-back, il devient ainsi le frère présent lors des overdoses.

Alors, oui, nous sommes dans un épisode où, clairement, Steven Moffat et Gatiss se sont faits plaisir, à jouer avec un épisode version XIXe. Clairement, c’est un jeu, un petit plaisir. Mais qui permet peut-être à Moffat de lutter contre les accusations de sexisme qui entourent sa série (et le showrunner en général), de manière un peu caricaturale, en attaquant de front un combat que les hommes doivent perdre. Et cela, tout en présentant un nouvel équilibre entre les deux frères (quand à Watson, ne vous inquiétez pas, il reste égal à lui-même, continuant même au bord des chutes d’eau, à sauver son ami. Et c’est sa femme qui porte bien le pantalon).

p0393pbf

Partager