Shining in the Dark : pas très brillant, tout ça

Shining in the Dark : pas très brillant, tout ça

Note de l'auteur

Dans ce livre-hommage à un site spécialisé sur Stephen King, avec une nouvelle (sans réel intérêt) du Maître de l’Horreur himself, ce sont finalement les « Grands Anciens » Ramsey Campbell et Edgar Allan Poe qui s’en sortent le mieux.

Le livre : À l’occasion des vingt ans de Lilja’s Library, l’un des sites de référence sur l’œuvre de Stephen King, son responsable, Hans-Åke Lilja, a fait appel à la fine fleur de la littérature fantastique mondiale pour composer cette anthologie. Du King lui-même – avec un texte inédit en français – à Jack Ketchum, en passant par Clive Barker, John Ajvide Lindqvist ou Ramsey Campbell, vous trouverez dans ces pages de quoi alimenter quelques belles nuits cauchemardesques.

Mon avis : Voilà le genre de projet dont on voudrait dire du bien… et voici le genre d’intro qui dévoile que ce ne sera pas le cas. Une anthologie de nouvelles fantastiques old-school, avec des noms comme Stephen King bien sûr, mais aussi Clive Barker, Ramsey Campbell et Jack Ketchum… L’objectif affiché n’est donc pas de découvrir de nouveaux talents d’avant-garde mais de se faire plaisir, ce qui est évident dès la lecture de la préface. À la fin du volume, chaque auteur revient en quelques lignes sur son texte et sa genèse, ce qui est toujours appréciable.

Le premier écueil vient de la relecture/correction. On peut ainsi lire en début de volume : « Fêter les vingt ans de Lija’s Library » au lieu de « Lilja’s Library » alors même que le nom de son fondateur est indiqué – sans erreur – juste en-dessous.

Ce qui peut passer pour une simple coquille (après tout, plus le texte est gros, plus l’erreur a de chance de passer – les titres de Une de la presse papier reçoivent leur lot de coquilles) revient en tête lorsqu’à la page 30, la dernière phrase « pensée » (donc en italiques chez King) du texte français était en fait la première phrase du texte « suivi » (en romains), ainsi qu’un coup d’œil sur le récit original en anglais permet de le confirmer. Un détail ? Au contraire, c’est illogique et cela casse le flux de lecture, pourtant l’un des grands talents de King. Un crime de lèse-majesté…

Toujours sur la page 30, « on la distingue » au lieu de « on le distingue », puisque le pronom se rapporte à « cottage » (et non à une hypothétique « maison »). Franchement, ça pique aux yeux. Et mon cœur de SR saigne. Dans sa note de fin de livre, Richard Chizmar est affublé d’un « une des premières histoires que j’ai écrite » au lieu de « écrites ». N’en jetez plus.

Côté contenu, le recueil tient-il la route ? Guère. Certes, il s’agit de la première publication en français de la nouvelle « Le Compresseur bleu » (« The Blue Air Compressor », 1971) de Stephen King, un texte qui, même en anglais, n’a pas eu les honneurs de nombreuses éditions. Cela en fait-il un événement d’édition ? Peut-être pour les fans hardcore de l’auteur. Mais elle ne représente pas un événement de lecture, car elle n’a pratiquement aucun intérêt per se.

Jack Ketchum et Patricia D. Cacek signent à quatre mains « Le Réseau » (2006) : c’est long, chiant, sans chute digne de ce nom, sans idée, vieillot… On pourrait continuer ainsi, tant un texte insipide suit l’autre. On passe de l’assommant (« Le Roman de l’Holocauste » de Stewart O’Nan, 2006) au plat (« Charabia et Theresa » de Clive Barker, 1993), ça ne décolle jamais (« La Fin de toutes choses » au titre tellement survendeur, de Brian Keene, 2017). On s’offre au passage un quasi-pastiche raté de Stephen King himself (« L’Attraction des flammes » de Kevin Quigley, 2017). Quand Brian James Freeman mise tout sur la chute de sa nouvelle « L’Amour d’une mère » (2017), qu’elle se révèle particulièrement médiocre et qu’on la voit venir dès les premières lignes, on frise l’échec élevé au rang des beaux-arts.

Même John Ajvide Lindqvist, dont avait tant aimé le sublime Laisse-moi entrer, ne se sort pas d’une certaine mollesse. Pas d’intensité, pas vraiment d’idée dans son « Manuel du Gardien » (2017) aux relents un peu trop stranger-thingsiens pour être honnêtes. La cosmogonie lovecraftienne en version « banlieue cossue suédoise » ? On suit les yeux fermés. Mais le résultat, lui, ne suit pas. Sans compter qu’au rayon des coquilles innommables, ActuSF nous inflige tout au long de la nouvelle un « De Vermiis Mysteriis » (au lieu de « Vermis ») parfaitement inacceptable. Ce qui, en latin, n’a en outre aucun sens.

En définitive, celui qui s’en sort le mieux est encore le Britannique Ramsey Campbell avec un texte de 1976 : « Le Compagnon ». Un texte assez classique mais efficace, bien mené, bien écrit. Sans oublier une reprise du « Cœur révélateur » d’Edgar Allan Poe, évidemment une pure merveille. De là à dire que c’est dans les vieux pots…

Shining in the Dark
Ouvrage collectif
Traduit par
Éric Holstein, Annaïg Houesnard, Jean-Daniel Brèque et Charles Baudelaire
Édité
par ActuSF

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