Somewhere back in time, Lost 1×01 : Pilot

Somewhere back in time, Lost 1×01 : Pilot

Le 22 septembre 2004 débutait Lost sur ABC. A cette occasion et durant toute la semaine, le Daily Mars fêtera dignement l’anniversaire de cette oeuvre importante dans l’histoire de la télévision. Géniale ou vilipendée, elle laisse rarement indifférent et son final pourrait occuper une place aux côtés du Prisonnier par la violence des réactions. Aujourd’hui, nous faisons un bond dans le passé pour une critique du pilote dans les conditions de sa découverte. La série ayant souvent jouée les balles rebondissantes dans l’espace-temps, il devenait logique d’effectuer une trajectoire similaire pour célébrer cet anniversaire.

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A la télévision, l’ouïe est souvent privilégiée à la vue. Pourtant, c’est bien l’inverse qui est ressenti dans les premières minutes. Il y a l’image inaugurale, comme un commandement : ouvrez les yeux. Puis, la solitude d’un homme a priori blessé et perdu dans une végétation foisonnante. Les mots sont une information pour le spectateur, ici, tout semble le déposséder du moindre renseignement : un homme blessé se réveille. Et court. Nous parlons d’un instant très court, deux minutes tout au plus. Mais cette sécheresse illustrera tout ce pilote à la carcasse décharnée.

maggieTout en se passant de mots, l’ouïe révèle la situation : des cris, un bourdonnement désagréable, de la tôle froissée, une explosion. Une véritable agression sonore. La caméra sera prise d’un mouvement de panique, rebondissant de corps en corps, incapable de s’arrêter sur un point précis, dépassée par le chaos. Les mots sont des cris, tout juste pouvons-nous comprendre des appels à l’aide. Mais tout est dépersonnalisé. Désincarné. Ce ne sont pas des hommes, femmes ou enfant qui errent sur la plage mais des étiquettes : un médecin, une femme enceinte, un jeune sauveteur…

La privation s’explique par le sentiment d’urgence, le recours à l’instinct de conservation. Les scénaristes privilégient une écriture reptilienne. Une écriture physique où le geste est plus important que la parole. Même lors de micro-accalmies, les confidences se feront sur un mode réfréné ou prorogé par “ils viendront nous chercher”. Où l’on ne sait pas si c’est par conviction ou pour se rassurer. Tout le pilote est construit sur une logique de provisoire : réflexions à court terme, réaction dans l’urgence, sens des priorités arbitraire. Il n’y a pas de communication dans cet épisode. Pas d’échange. Les rares tentatives sont levés d’un désintérêt poli. Priorité au physique, aux éléments. Une marche dans la nature propice aux conversations est marquée d’une pluie diluvienne et la découverte du cockpit. Même le calme de la nuit est interrompu par d’étranges bruits inquiétants, de mouvements invisibles, d’arbres violentés.

L’épisode s’ouvrait sur un oeil, en plongée verticale. Il s’achève sur un plan en contre plongée, d’un corps suspendu par des branches. Ce 180° dans l’espace où l’on passe d’un corps qui se réveille à celui d’un mort, semble annoncer la pesanteur du danger. C’est aussi voir les personnages tourner leur regard vers le ciel en espérant remarquer les secours et ne découvrir que la mort. Le danger semble être partout.

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