« Tuez De Gaulle »

« Tuez De Gaulle »

Note de l'auteur

Pourquoi ont-ils tué Jaurès ? Et pourquoi ont-ils tenté d’assassiner De Gaulle ? Ce ne sont évidemment pas les mêmes même s’ils se partagent l’extrême partie de l’échiquier politique. « Tuez De Gaulle » va apporter quelques réponses à la deuxième question et contextualiser tout ça. Ceux qui se sont mouillés ont été traduits en Justice même si les commanditaires sont plus flous. Accrochez votre ceinture de sécurité, même si elle n’était pas obligatoire à l’époque, et faites crisser les pneus de la DS…

L’histoire : le général De Gaulle est mort dans son grand lit de Colombey-les-deux-Eglises le 9 novembre 1970. Mais la grande Zohra, surnom que lui a conféré la peu amène Organisation armée secrète (OAS), aurait bien pu tomber assassiné bien avant. Le 8 septembre 1961, par exemple, où sur le trajet le menant à la Boisserie, une bombe sauta au passage de sa DS immatriculée 912 HC 75. C’est ce premier attentat que les auteurs se proposent de reconstituer 60 ans plus tard. Avec ses éclairages et ses parts d’ombre.

Mon avis : on a beau avoir bachoté quelques écrits d’histoire contemporaine, deci delà, pendant nos études, cette BD nous a plus que rafraîchi la mémoire. Elle nous a appris pas mal de choses. Plus exactement, elle nous permet de mettre des noms, des dates, des lieux sur un moment tragi-comique de la Ve République. Tragi-comique car c’est un attentat complètement raté par une bande de six pieds nickelés qui se feront barboter quelques heures après l’opération avortée. Tous des anciens d’Algérie, plus ou moins proches de l’OAS, avec un fort sentiment de trahison à l’égard du président d’alors de la France. Au regard du déroulement grand-guignolesque, seul un dixième des 40 kg de plastic et de dynamite a explosé, la faute à l’humidité et à une mise en place trop hâtive, certains à l’époque, complotistes de la première heure, ont même estimé que l’attaque avait été préparée par les services gouvernementaux pour alerter le Général sur la dangerosité potentielle de l’officine d’extrême droite.

Les auteurs ne retiennent, ni n’abordent cette théorie. Ils ne donnent d’ailleurs pas de réponse définitive car même avec le recul, on en reste au stade des suppositions et des conjectures quant aux véritables donneurs d’ordres. Les exécutants, on les connaît ; ceux qui les ont armés, on est davantage dans le probable que dans le « à coup sûr ». Cette bande dessinée n’a rien à envier à bon thriller…

A l’exception près, que parfois, on s’y perd un peu. Les flash-backs incessants ont le don de provoquer des interrogations pas toujours vite levées sur le moment raconté. Il y a, à mon sens, un vrai abus de cette technique de narration. L’autre déception, graphique cette fois, le rendu du Grand Charles. On a plus l’impression de voir Lino Ventura dans Le gorille vous salue bien que De Gaulle.

Ce sont les deux seules limites de ce premier tome qui sera suivi d’un second sur l’attentat du Petit-Clamart. A la fois pédagogique et empreint d’un doux suspense, ce « Tuez De Gaulle » mérite le coup d’œil.

Si vous aimez : les ambiances automobiles des années 60 avec de très jolies Peugeot 404, des Aronde du plus bel effet, des Renault estafette ou, bien sûr des DS… Et bien d’autres.

En accompagnement : l’excellent article de Michel Legris, titré Les conjurés de Pont-sur-Seine, paru dans Le Monde le 29 août 1962, jour d’ouverture du procès des six accusés.

Autour de le BD : Simon Treins a travaillé sur la série Les reines de sang et particulièrement Kahina la Berbère. Ancien DJ et propriétaire de discothèque, Munch a, notamment collaboré sur Insiders.

Extraits : « Ne t’arrête pas, suis-les !! Suis-les. »

« C’était quoi, bon Dieu ? »

« A ton avis ? Une bombe, dans le tas de sable! »

De Gaulle : « C’était vraiment de la cochonnerie leur explosif… »

Écrit par Simon Treins
Dessiné par Munch
Édité par Delcourt

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