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Représentation de Welcome to Night Vale : un conte d’Halloween à Paris

Représentation de Welcome to Night Vale : un conte d’Halloween à Paris

Note de l'auteur
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photo Déborah Gay / le Daily Mars

Il y a quatre mois, quand j’ai appris que Welcome to Night Vale allait faire une tournée européenne, dont un passage à Paris, je n’ai pas attendu 24 heures avant de prendre mes places pour ce rendez-vous. Si, certes, les tickets ne sont pas partis en une heure comme ça peut-être le cas pour leur tournée américaine, il n’empêche que le Café de la Danse affichait complet en ce soir d’Halloween.

 

Le rescapé russe, le glow cloud et Tamika Flynn.

Le rescapé russe, le glow cloud et Tamika Flynn. photo Déborah Gay / le Daily Mars

Welcome to Night Vale est d’abord un podcast bimensuel, créé par Joseph Fink et Jeffrey Cranor. Durant 25 minutes, l’auditeur peut écouter la radio communautaire de Night Vale, présenté par Cecil Baldwin. Or Night Vale est une ville où tout ce qui est anormal est considéré comme normal. Où les théories du complot sont réelles. Un nuage scintillant apparait et est idolâtré, des figures encapuchonnées se promènent et il ne faut, sous aucun prétexte, entrer dans le parc à chien. Le podcast est devenu le plus téléchargé de iTunes en 2013, et compte aujourd’hui 56 épisodes.

Si Welcome to Night Vale fonctionne aussi bien, c’est aussi grâce à un fandom très engagé. On peut trouver via Tumblr des fanfictions, des chansons, des transcripts des émissions, des fanarts… Le cast est aussi très soucieux de ses fans, très actif sur Twitter, où Cecil déclare par exemple aller traîner parfois sur Tumblr, voir le « monde qu’il a aidé à créer ». Des personnages deviennent récurrents, Cecil n’est pas toujours seul derrière le micro, où son petit ami Carlos le scientifique lui donne la réplique, certains de ses stagiaires, l’ancien maire Pamela Winshaw, la femme sans visage qui vit secrètement dans ta maison… Une série de personnages hauts en couleurs avec leurs gimmicks et leurs caractères.

les "hooded figures"

les « hooded figures ». photo Déborah Gay / le Daily Mars

Et dans la rue, de nombreuses personnes de ce fandom ont répondu présents. L’ambiance est déjà au rendez-vous, entre maquillages à base de violet et de noir, blagues d’initiés et représentation de personnages imaginaires. Certains sont venus déguisés en eux-même, c’était déjà assez terrorisant. Le public était majoritairement composé de femmes (environ 65%), toutes les nationalités se mélangent, et on entendait parler français aussi bien qu’anglais. Dans la salle surchauffée, des coussins au sol pour ceux qui voulaient être au plus près de la scène, et les gradins se remplissent rapidement. Face à nous, trois micros. Les gens se charrient : « All Hail the Glow Cloud » retentit, ceux qui ne connaissaient pas le show se demandent ce qu’ils font là. En entrée, Mary Epworth chante cinq chansons franchement applaudis, même si nous attendions tous Cecil. Elle sera aussi notre pause météo.

Cecil Baldwin, présentateur du Welcome To Night Vale.

Cecil Baldwin, présentateur du Welcome To Night Vale. photo Déborah Gay / le Daily Mars

Et le voilà : veste pourpre, sourire aux lèvres, le show commence. La difficulté d’un tel spectacle est sans doute de passer de l’oral au visuel. C’est un roman d’une heure qui nous parle, comme à l’heure des contes. Il n’y a pas de décor, juste notre imagination. Et pourtant quelle maîtrise de la salle et de la scène. Cecil Baldwin possède certes une voix extra-ordinaire et sait en jouer sans pour autant que ses effets ne deviennent trop caricaturaux. Ses rares mimiques sont d’une précision chirurgicale, ses mains arachnéennes scandent parfois le texte, hypnotiques. Entrer dans l’histoire est légèrement difficile au départ, la faute à l’anglais et au fait que ce n’est pas le genre de théâtre auquel nous sommes habitués. Pourtant bientôt, tout le monde est captivé, les rires et les interjections fusent pendant un horoscope, oui, même ceux pour qui c’est une « première ».

Cecil et Joseph Fink. photo Déborah Gay / le Daily Mars

Cecil et Joseph Fink. photo Déborah Gay / le Daily Mars

Cecil n’est pas seul sur scène et cinq autres personnages vont passer, deux d’entre eux étant même interprétés par les créateurs de Welcome To Night Vale, Jeffrey Cranor et Joseph Fink : un professeur de musique fou, une marchande de CD dépressive, l’ancienne maire Pamela Winchell, un stagiaire et une page de pub. L’histoire en elle-même importe presque peu : mais en gros, un libraire s’est échappé de la bibliothèque. Et comme tout le monde le sait, les bibliothécaires sont des créatures dangereuses, mortelles même, qui se nomment d’ailleurs toutes Randall. La magie est telle que le public, plusieurs fois mis à contribution, regarde sous ses chaises, serre la main de son voisin, se met à hurler en coeur. Un moment de communion, pour fans de la première heure et petits nouveaux.

Après une heure et demie de spectacle, il faut bien se dire au-revoir. Tout le monde sort encore médusé d’avoir partagé une telle expérience, où le temps d’une soirée d’Halloween, nous nous sommes tous retrouvés dans la petite ville de Night Vale, au milieu du désert. Mais, non seulement l’expérience a été de toute beauté, grâce aux textes et interprétations, mais de plus, c’est une forme de théâtre qui manque en France. Ce n’est pas une comédie, ce n’est pas un stand up caractéristique. Ça a un goût de nouveauté, de fraîcheur, d’immersion totale.

Welcome to Night Vale en live, c’est un conte, c’est une histoire, c’est un jeu entre le public et l’acteur. Prêtez moi l’oreille et donnez moi la main. C’est une puissance qui se joue des codes de la radio et les mets à la page. Interactions avec le public, regards dirigés vers la salle et interpellation de l’auditeur. C’est créatif et interactif, c’est jouissif, et surtout…. c’est génial.

L'ensemble du cast, dont les deux créateurs du show, venu saluer sous les applaudissements.

L’ensemble du cast, dont les deux créateurs du show, venus saluer sous les applaudissements. photo Déborah Gay / le Daily Mars

 

 

 

 

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