X-Men Dark Phoenix : Singer créé, Kinberg détruit

X-Men Dark Phoenix : Singer créé, Kinberg détruit

Note de l'auteur

1992. Les X-Men sont maintenant des héros de la nation après l’attaque d’Apocalypse. Lors d’une mission de sauvetage spatiale, Jean Grey se retrouve traversée par une éruption solaire qui aurait dû lui être fatale. Au lieu de ça, elle revient sur Terre plus forte que jamais, mais aussi plus dangereuse pour ses camarades, pendant que des mystérieux extraterrestres débarquent sur la planète à sa recherche.

Rarement une saga de super-héros aura été aussi bordélique que celle des X-Men. Après une première trilogie solide, on aura eu droit à une nouvelle série de trois films, débutant par l’excellent First Class et s’achevant sur le très très moyen Apocalypse. Entre tout ça, se seront succédé une chouette réunion parents-élèves coincée dans un imbroglio temporel (Days of Future Past) et trois spin-offs consacrés à Wolverine, dont leurs qualités variables s’inscrivent sur un spectre très large. Maintenant que la Fox est la propriété du grand Disney, il fallait bien jouer ses dernières cartes avant le grand ravalement de façade et les derniers coups de peintures aux couleurs du MCU. Avant un New Mutants disparus dans les limbes depuis 2017, c’est à Simon Kinberg, scénariste de la saga depuis Days of Future Past, qu’incombe la tâche d’achever une saga longue d’une dizaine de films.

S’il y a bien quelque chose à retenir (toute proportion gardée) de ce Dark Phoenix, c’est bien son introduction, fluide et efficace, qui pose d’emblée des enjeux suffisamment clairs : les X-Men sont aux sommets de leurs gloire, et la mission spatiale qui les attend représente un palier encore plus dangereux pour l’équipe des super-héros. Les personnages, la mise en scène, toute cette séquence fonctionne, si on omet la crédibilité de la situation, où chaque personnage parvient à s’accommoder au vide spatial plutôt aisément. Niveau suspension d’incrédulité, les 30 premières minutes de ce Dark Phoenix se posent là, mais soit, passons.

C’est par la suite que le film se vautre dans tous les pires défauts de la saga, et ce pour une raison toute simple : la licence en l’état actuel, n’a plus rien à raconter. En particulier les personnages emblématiques, dont leurs arcs narratifs tournent à vide depuis déjà deux films. Charles Xavier passe tout son temps à justifier ses actes d’arrogance, Mystique n’en a déjà plus rien à faire depuis belle lurette, et même des personnages comme Quicksilver (le sidekick comique) ou Cyclope (l’amoureux transi) ne sont traités que par le prisme de leur caractère, et c’est tout. La palme revient à Magnéto, dont la construction de son personnage (méchant-gentil) devient une blague qui se répète à chaque épisode. Et le fameux moment « émotion » que nous vend la bande-annonce tombe comme un soufflé : éventé si on réfléchit deux minutes face aux trailers, ce climax donne la sensation d’un passage obligatoire dans le parcours émotionnel de Jean Grey, s’éjectant de l’équation tout aussi vite qu’il est arrivé. Même la mort de Xavier et la scène finale entre Jean et Logan dans X-Men 3 étaient bien plus réussis que tout ce qu’essaye de faire ce X-Men Dark Phoenix.

C’est donc la Phoenix du titre qui peut s’enorgueillir de prendre toute la couverture, avec une Jean Grey presque omni-présente. Si ce choix audacieux permet de centrer toute l’histoire autour de cette lutte intérieure entre sa force incommensurable et ses émotions contradictoires, il est dommage de tout mettre sur les frêles épaules de Sophie Turner, pas suffisamment charismatique pour porter un film entier à elle seule. Elle n’est pas aidée par un script famélique et soporifique, ni par une Jessica Chastain peroxydée qui devra se débrouiller avec quelques lignes de dialogues sans inspiration. Et ce ne sont pas les scènes d’actions qui donneront de quoi manger aux fans des supers : entre une séquence de combat dans une rue new-yorkaise insipide et mal montée et une autre plus honnête à bord d’un train mais sans grande envergure, on ne peut pas dire que ce Dark Phoenix se lâche sur ses ambitions.

Chacun ira de son petit préféré pour se demander quel est l’épisode X-Men de trop. Pour moi, ce sera sans doute celui-là : un épisode d’une mollesse incroyable, écrit avec l’idée d’en finir au plus vite, et expédiant des personnages historiques dont l’implication des acteurs n’est plus que le vague souvenir d’un First Class qui relançait la saga d’une fort belle manière. Même l’ambition de scènes spectaculaires s’est faite la malle, alors que la présence de Phoenix était là pour placer quelques envolées funestes et épiques. De Dark Phoenix, on en garde que la volonté de clôturer l’histoire rapidement avant de repartir sur de nouvelles bases.

X-Men Dark Phoenix
Réalisé par Simon Kinberg
Avec Sophie Turner, James McAvoy, Michael Fassbender, Jennifer Lawrence…
Sortie le 5 juin 2019

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