
XCOM 2: Independence Day
Après un reboot réussi en 2012, Firaxis Games ne s’est pas reposé sur ses lauriers et a continué sur sa lancée avec XCOM 2. Alors que beaucoup attendaient une simple suite, les développeurs nous ont pris à contre-pied avec un jeu à la fois plus complet et différent. Exit la guerre ouverte contre l’envahisseur, le monde est désormais sous la botte alien et l’unité XCOM s’est métamorphosée en une armée de guérilla. Avant d’analyser les différentes nouveautés, je reviendrais d’abord sur le long chemin parcouru par cette licence mythique. Je vous invite d’ailleurs dès maintenant à jeter un coup d’œil aux excellents articles de Kaern ici et ici.
La Naissance d’une Légende
La série X-COM n’est pas nouvelle dans le monde du jeu vidéo, bien au contraire. Bien avant le reboot en 2012, la série a connu de nombreux titres plus au moins réussis. Tout a commencé dans les 90’s, quand les jeux de stratégie et de tactique étaient alors au sommet de la pyramide vidéoludique. Au commencement, nous retrouvons donc quatre jeux qui ont forgé la légende de la série. Tout d’abord, nous avons le mythique X-COM: UFO Defense. Sorti en 1994 sous la houlette des deux frères et talentueux game designer Julian et Nick Gollop, X-COM: UFO Defense a posé les bases de la série en adoptant une approche très tactique avec un système de combat au tour par tour. En 1998, notre chère planète bleue doit faire face à une invasion alien. Incapables de faire face à la menace, toutes les nations du monde se rejoignent pour mettre sur pied une équipe paramilitaire d’élite et internationale nommé X-COM (« eXtraterrial COMbat unit »). Cette force, qui ne connaît donc pas de frontières, représente le dernier espoir de l’humanité. Le joueur était alors plongé dans cette guerre impitoyable en prenant la casquette de commandant du XCOM avec pour mission de traquer et repousser les aliens hors de la Terre.
Le deuxième opus, X-COM: Terror from the Deep, sorti seulement un an après UFO Defense, a été développé par une autre équipe en interne chez MicroProse. Basé sur le même moteur et les mécanismes que le premier jeu, Terror from the Deep n’a pas pris de risques mis à part son cadre : les abysses froids et mystérieux. Nous sommes cette fois en 2040 et la menace alien ne vient pas des cieux mais du plus profond des océans.
Deux ans après les combats aquatiques, la série revient en 1997 avec X-COM: Apocalypse en même temps que Julian et Nick Gollop. Dans une tentative de moderniser quelque peu la formule, les développeurs de chez Mythos Game ont ajouté de nombreuses petites nouveautés dont plusieurs éléments de RTS (Real Time Strategy). Ce troisième opus passé assez inaperçu malgré ses qualités est une suite directe de Terror from the Deep où on retrouve la biosphère de la Terre fortement endommagée. Cinquante ans après cette catastrophe environnementale, les humains se sont regroupés autour de plusieurs mégalopoles géantes et autosuffisantes au design rétrofuturiste. Apocalypse se concentre sur la cité MegaPrimus, bâtie sur les ruines de Toronto, où de mystérieux portails dimensionnels sont apparus permettant l’invasion d’une nouvelle forme d’aliens.
Toujours avec sa casquette de commandant du XCOM, le joueur est en charge de la contre-attaque en allant porter la guerre en territoire ennemi. Plutôt alléchant, non ? Le quatrième et dernier jeu de la série développé par MicroProse (responsable de Terror from the Deep) est X-COM: Interceptor sorti en 1998. Véritable ovni, Interceptor est un curieux mélange entre jeu de stratégie et shoot spatial. Situé chronologiquement avant X-COM: Apocalypse, Interceptor met en avant la conquête spatiale des humains dans une zone appelée « la Frontière » pour faire mains basses sur de précieuses ressources. Manque de bol, les aliens du tout premier jeu X-COM: UFO Defense sont déjà sur place. Le jeu s’est écoulé à seulement 30 000 copies entraînant avec lui la fin du premier chapitre X-COM.
Entre annulations et clones
En 1998, MicroProse est rachetée par Hasbro Interactive. Pour la licence X-COM, c’est le début d’une longue traversée du désert qui fait encore aujourd’hui beaucoup de mal aux fans. Entre un jeu par email (si si vous avez bien lu), l’immonde Third Person Shooter X-COM: Enforcer et plusieurs titres annulés comme X-COM: Alliance ou X-COM: Genesis, la série légendaire s’est éteinte sans gloire. En 2001, Mythos Game et son game designer Julian Gollop tentent un baroud d’honneur en développant un reboot non officiel et en 3D de X-COM: UFO Defense intitulé The Dreamland Chronicles: Freedom Ridge. Mais face à l’acharnement du destin, Mythos Game doit mettre la clé sous la porte et stoppant définitivement son rêve.
Entre temps, des clones plus au moins réussis débarquent sur nos machines, les plus connus étant Xenonauts et UFO: Aftermath. Ce dernier, développé par ALTAR Interactive, est à la base le projet avorté de Mythos Game The Dreamland Chronicles: Freedom Ridge. Malgré ses nombreux défauts, le jeu a su préserver la tradition des X-COM et a su faire patienter les fans en attendant le retour du messie. UFO: Aftermath a d’ailleurs connu deux suites sympathiques avec UFO: Aftershock en 2005 et UFO: Afterlight en 2007.
Le Retour du Roi
Un an plus tard, le géant 2K (Bioshock, Borderlands, GTA, Max Payne) rachète la licence et, avec un gros budget, confie le développement d’un nouveau X-COM au célèbre studio Firaxis Games responsable de la mythique série 4X Civilization et ses dérivés comme Alpha Centauri. Le jeu est alors pensé à la fois comme un reboot et un remake du tout premier opus de 1994 X-COM: UFO Defense. XCOM: Enemy Unknown est un véritable retour aux sources avec des combats au tour par tour, une gestion poussée de sa base (recherches militaires pour créer de nouvelles technologies, armes et armures) et évidemment une personnalisation de ses escouades d’élites avec des éléments de RPG. Au fur et à mesure que les missions s’enchaînent, le joueur débloque des habilités pour ses soldats.
Mais la grosse nouveauté du reboot est, bien sûr, ses graphismes en 3D sous le moteur Unreal Engine 3 qui donne une dimension encore plus épique au titre. Côté scénario, nous sommes cette fois en 2015, quand la Terre fait face à une invasion alien en bonne et due forme. Face à cette menace, le Conseil des Nations – en quelque sorte l’ONU – annonce la création du XCOM, une armée d’élite composée des meilleurs soldats du monde entier, chargée de défendre l’humanité coûte que coûte. Sorti fin 2012, le reboot est un immense succès, à tel point qu’une excellente extension nommée Enemy Within est parue seulement un an plus tard. Bien sûr, ce nouvel opus n’est pas exempt de défauts.
Les fans hardcore diront que le jeu est moins difficile et plus casual que le titre d’origine. Néanmoins, si vous comptez refaire ce premier opus avant de vous attaquer à XCOM 2, je vous conseille en plus de l’extension de jouer avec l’un des meilleurs mods de tous les temps : XCOM Long War. Le mod, qui est disponible depuis fin 2015 dans sa version définitive, promet une campagne bien plus longue, difficile et définitivement jouissive. Le mod a connu tellement de succès que les développeurs ont fondé leur propre studio Long War Studios et ont reçu XCOM 2 en avance de la part de Firaxis Games, histoire de s’attaquer déjà aux futurs mods.
Toutefois, à la surprise (et au mécontentement) de nombreux fans, le reboot n’est pas le seul jeu X-COM que 2K a sous la main, puisque en 2013 sort The Bureau: XCOM Declassified. À l’origine pensé comme un FPS similaire à Bioshock en s’inspirant de X-Files, XCOM Declassified est ensuite devenu un TPS avec quelques éléments tactiques. Le jeu sans être vraiment mauvais, bien au contraire, a cependant trahi l’univers de la série en mettant en scène une invasion alien en plein milieu de la guerre froide. Le jeu, pourtant sympathique, n’est pas vraiment un succès commercial et 2K abandonne pour l’instant l’idée d’un FPS ou TPS dans l’univers de la série pour se concentrer sur la suite de XCOM: Ennemy Unknown, c’est-à-dire XCOM 2.
XCOM 2, la Résistance a besoin de vous !
Malgré tous vos efforts pour bouter les aliens hors de notre chère planète bleue, l’humanité a fini par capituler et a choisi la voie de la collaboration. Alors qu’un gouvernement mondial contrôlé par les extraterrestres se met en place, la légendaire division XCOM, loin de perdre espoir, passe en clandestinité et tente tant bien que mal de poursuivre ses opérations. Vingt longues années sont passées depuis la capitulation et c’est un monde nouveau qui s’offre au joueur. Un monde où règnent l’ordre absolu, la prospérité, la propagande et une résistance au bord du gouffre. Pendant une mission de sauvetage risquée qui fait office de prologue, XCOM met la main sur le commandeur (c’est-à-dire vous) du premier opus. Le commandeur, en état de stase pendant ces vingt dernières années, semble avoir fait l’objet de manipulations génétiques de la part des aliens pour améliorer les capacités tactiques de ses soldats hybrides. Le joueur prend alors une fois de plus la tête de la résistance pour essayer de freiner coûte que coûte les sombres desseins des extraterrestres et notamment le mystérieux projet AVATAR.
Pour vous assister dans votre quête vengeresse et frapper dans le monde entier, XCOM possède un vaisseau ennemi qui est en quelque sorte une base mobile géante qui m’a fait penser aux planeurs du SHIELD dans Avengers. La victoire sera difficile. Pour cela, le joueur devra unifier la résistance mondiale, retarder les opérations aliens et au final les repousser hors de la Terre une bonne fois pour toute. Le scénario, très sympathique sans être transcendant, m’a sans cesse rappelé la bonne série TV Falling Skies et pose les bases d’un jeu complètement nouveau.
SG1 au rapport !
XCOM 2 est tout comme son aîné un jeu de stratégie tactique au tour par tour. Le joueur commande une petite escouade de quatre à six soldats (limite qui change en fonction de vos recherches) que vous pouvez choisir entre chaque mission. Chaque soldat possède sa propre classe. On retrouve évidemment les classiques comme le Sniper qui a été légèrement revu mais reste toujours surpuissant ou le gros bourrin grenadier. Du côté des nouveautés, nous avons maintenant le Ranger, éclaireur ultra mobile et spécialiste du corps à corps, qui a remplacé la classe commando de Ennemy Unknown ; le spécialiste, expert en technologies et aidé par un mini drone qui fait office de support ; et pour finir, l’agent psy, soldat aux pouvoirs psychiques ultra (un peu trop même) puissant.
Au fur et à mesure des missions, les soldats vont gagner en expérience et en grades (allant de 2ème classe à Colonel) à condition bien sûr de les promouvoir. Les grades confèrent des bonus divers et variés et débloquent certaines armes ou capacités uniques. Au final, le degré de personnalisation des soldats est extrêmement poussé (background, nationalité, physique), ce qui va beaucoup plaire aux amateurs de rôle play. Les développeurs ont accordé énormément d’attention aux petits détails pour encore toujours plus d’immersion. Les soldats ne sont pas les seuls qu’on peut améliorer puisque qu’il existe toute une partie crafting d’armes en récupérant des équipements aliens pendant les missions.
Black Hawk Down
Le système de combat est non seulement toujours aussi jouissif, mais il a également été amélioré par rapport à Ennemy Unknown. Dans XCOM 2, les opérations doivent être rapides et efficaces. Le gameplay encourage le joueur à rester constamment en mouvement et à prendre des risques. On a vraiment cette impression d’être à présent en territoire ennemi et d’exécuter une black ops des forces spéciales. Cet aspect commando est notamment renforcé par une nouvelle mécanique, la dissimulation. Au début de chaque mission, votre escouade commence la partie en étant donc dissimulée. Concrètement, cela veut dire que l’ennemi ne sait pas que vous êtes là. Ce nouvel élément d’infiltration est très bien amené et permet au joueur de finir une mission sans tirer une seule balle (bien que très difficile). Mais il permet surtout au joueur de préparer son assaut en mettant en place des embuscades ou une attaque sur deux fronts.
Autre nouveauté, le hacking rajoute un petit plus sympathique mais anecdotique aux combats en octroyant des bonus au joueur ou en désactivant un robot. Vous pouvez à présent placer vous-même le point d’extraction, très utile quand vous êtes dans des missions avec un compte à rebours. Le temps est en effet devenu un élément crucial de XCOM 2, à cause de l’obscur projet alien AVATAR. Les cartes sont maintenant générées de façon procédurale avec une dimension verticale plus appuyée. Les éléments sont entièrement destructibles, particulièrement utile pour créer un raccourci lors d’une situation désespérée. Cette nouvelle possibilité de destruction modifie constamment le level design et ouvre la voie à de nombreuses possibilités. Pour finir sur les combats, XCOM 2 propose vraiment une grande variété de missions : capturer des extraterrestres, exécuter une cible, sauver des civils en cas d’attaques aliens ou bien des ingénieurs/scientifiques retenus en otage, détruire des bases ennemis etc. Face à votre escouade, on retrouve un bestiaire plus varié et plus dangereux, en logique avec le scénario de domination alien dont on peut rencontrer plusieurs espèces durant une mission.
Une Guerre contre le Temps
De retour sur le Talion, la nouvelle base volante du XCOM, le joueur va s’apercevoir qu’il a plusieurs zones à débloquer (douze pour être exact). Dans ces emplacements, vous devrez établir des salles spécifiques comme un laboratoire, une armurerie ou bien un centre d’ingénierie. Mais c’est surtout à partir du Talion, et plus particulièrement sur la plate-forme Geoscape, que le joueur va organiser la résistance humaine face à l’envahisseur. Contacter toutes les cellules locales et unifier les résistants autour de votre noble cause, voilà votre mission dans un premier temps. Et je dis bien dans un premier temps, puisque très rapidement apparaît l’opération AVATAR qui se traduit par une jauge en haut de l’écran.
Concrètement, les aliens sont eux aussi en train de jouer leur propre campagne et ont des plans machiavéliques pour lesquelles vous allez tout tenter pour les arrêter. Cela se traduit par les « Dark Events » qui représentent des missions urgentes concernant le projet AVATAR où le joueur doit souvent faire un choix acceptant les conséquences qui vont avec. Au final, malgré toutes les bonnes intentions du monde, le joueur ne peut pas tout gérer et devra faire des sacrifices en privilégiant telle ou telle mission. Cette notion de sacrifice encourage le joueur à se sentir vraiment concerné en tant que commandant du dernier espoir de l’humanité.
Une Difficulté mal dosée
Néanmoins, la gestion de la base est un poil trop simpliste, ce qui est positif pour le joueur lambda, mais un peu moins pour un amateur des X-COM. Le contrôle des zones sur le Hologlobe n’est pas assez mis en avant. Il n’est d’ailleurs pas nécessaire de délivrer toutes les zones pour terminer le jeu, ce qui casse un peu l’immersion. De plus, on ne ressent pas vraiment le sentiment de libérer les zones de l’oppresseur alien. En outre, le projet AVATAR, qui est en soit une très bonne idée, ajoute une contrainte temporelle parfois très frustrante. Il va falloir finir la campagne avant la fin du compte à rebours sous peine d’avoir un bon gros game over sur l’écran.
D’autre part, certaines missions sont vraiment limitées en tour et conduisent le joueur à rush les missions en sacrifiant parfois des soldats. C’est notamment le cas au début du jeu, et on en vient à l’un des défauts de XCOM 2 : sa difficulté. Clairement, ce nouvel opus est plus difficile que son prédécesseur, ce qui n’aurait pas été un mal si cette difficulté avait été mieux dosée. En effet, le début du jeu se révèle être très dur tandis que vers la fin, ça devient clairement trop facile. Même si je peux comprendre que c’est notamment lié au contexte de guérilla du jeu, j’aurais aimé une montée en puissance des aliens en même temps que du XCOM.
De gros soucis d’optimisations
Graphiquement, le jeu est très beau et tourne sur le flambant neuf Unreal Engine 4. Toutefois, le moteur du jeu est toujours aussi buggé et a été visiblement optimisé avec les pieds. J’ai eu le droit à assez de bugs pour que je m’en aperçoive, mais c’est surtout les nombreuses chutes de FPS qui sont impardonnables. Sans oublier les nombreux temps morts pendant les combats et les chargements super longs qui viennent parfois plomber l’immersion et l’excitation du joueur. Encore une fois, j’ai cette sale impression que le jeu n’a pas été peaufiné comme il se doit et qu’on va nous balancer d’énormes patchs dans les prochains mois. Je trouve cela dommage pour XCOM 2 qui sans ces problèmes d’optimisations aurait pu être un jeu excellent, d’autant plus que sa direction artistique semblant s’inspirer de Mass Effect est assez jolie.
Conclusion
En changeant de contexte avec un monde sous domination alien, Firaxis Games a réussi son pari avec brio en proposant une expérience nouvelle et différente de XCOM: Enemy Unknown. Plus beau que jamais, XCOM 2 reprend les bases solides de son aîné tout en les améliorant avec de nombreuses nouvelles mécaniques plus que bienvenues (la dissimulation, la destruction complète des décors, le hacking). Sans ces gros problèmes d’optimisations et sa difficulté mal dosée, XCOM 2 aurait pu être le jeu parfait. Avant de terminer ce test, je tiens particulièrement à saluer les développeurs pour leur important soutien envers la communauté modding via le Steam Workshop. On se retrouve très bientôt pour un spécial Mods du Prof !
Développeur : Firaxis Games
Prix : 50 euros